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Silamaka Soukouna : Mon combat avec Silax pâtisserie ? Ode aux jeunes…

Silamaka Soukouna : Mon combat avec Silax pâtisserie ? Ode aux jeunes…
  • Publiéfévrier 7, 2022

Adossé sur ses vingt ans d’expérience, Silamaka Soukouna, bouscule les codes de la pâtisserie. A Fontenay-sous-Bois en banlieue parisienne, il crée et revisite des mets gourmands aux saveurs originales à Silax pâtisserie.

Interview réalisée par Cindy Ahodehou

Silamaka Soukouna, depuis ces vingt dernières années, vous avez travaillé dans toutes sortes de pâtisseries, notamment pour de grandes maisons…

En effet, j’ai vingt ans d’expérience dans la pâtisserie. J’ai travaillé dans des établissements qui proposent de la pâtisserie dite « bas de gamme », mais également avec les plus grands tels que Philippe Andrieux, le chef à l’origine de l’expansion des pâtisseries « La durée » à l’international. J’ai également eu la chance d’apprendre avec Thierry Bridron, en charge des pâtissiers à l’hôtel Lutetia à Paris.

Aujourd’hui encore quand je suis dans ma boutique, certains clients me viennent me demander à rencontrer le chef pâtissier. Lorsque j’annonce que je suis le chef, la stupeur se lit sur leur visage.

J’ai pu pâtisser à l’étranger, notamment à Londres, au Koweït, au Maroc…

et au Mali pendant deux ans

J’ai eu l’occasion d’y tenir une pâtisserie. Je me suis associé à une connaissance qui tenait un restaurant qui marchait plutôt bien. Il avait un local mitoyen au restaurant qui ne servait pas, j’ai donc eu la charge d’en faire une pâtisserie. Toutes ces expériences m’ont permis de me lancer dans la création de ma propre pâtisserie ici en France.

Le label Silax pâtisserie, c’est un peu la concrétisation de ce que vous avez appris ces vingt dernières années ?

Silax pâtisserie a vraiment été créée à brûle-pourpoint. Pendant le premier confinement en mars 2020 comme beaucoup de Français, je n’ai pas pu travailler. J’ai donc eu l’idée de poster mes créations sur mon compte Instagram @silaxpatisserie, entre autres, des entremets, des tartes, des gâteaux d’anniversaire, il y en avait pour tous les goûts.

Mes followers ont aimé mes créations et petit à petit je recevais des messages de personnes qui souhaitaient commander mes pâtisseries. C’est à ce moment-là que je m’aperçois que mes créations plaisent beaucoup ! Ça a été le déclencheur. La période de la Covid m’a poussé à ouvrir ma structure.

Depuis l’ouverture le 13 décembre 2021, j’accueille une clientèle variée de toute l’île de France, ce qui n’est pas fait pour me déplaire.

Je reçois beaucoup de soutien et surtout des personnes qui reviennent, parce qu’elles ont aimé ma carte. Mon « Paris-Brest » et mon éclair au chocolat sont les stars demandées le plus souvent.

Nous travaillons avec les mêmes partenaires qui fournissent les grandes maisons afin de proposer une pâtisserie fine haut de gamme et accessible au plus grand nombre.

On peut vous rétorquer pourquoi la pâtisserie ?

Une création Silamaka Soukouna

La passion de la pâtisserie m’est venue, d’une part en regardant mon père qui cuisinait très souvent.

Vers l’âge de 10 ans, d’autre part, je me souviens qu’on avait une voisine française qui faisait des gâteaux tous les dimanches. Elle m’invitait parfois à venir pâtisser avec elle. Ce sont de très bons souvenirs qui je pense sont à l’origine de cette passion devenue travail.

Aujourd’hui vous avez une jolie pâtisserie, le processus a-t-il été compliqué pour en arriver-là ?

Je savais que je voulais m’installer à Fontenay-sous-Bois, parce que c’est la ville dans laquelle j’ai grandi. Quand j’ai décidé d’ouvrir ma pâtisserie, j’ai commencé à chercher un local. Lorsque je suis tombé sur cette boutique, je me suis tout de suite dit, c’est la bonne. Je me suis auto-financé pour l’achat du local, pour les machines et autres marchandises.

Le plus dur, c’est de se faire « prendre au sérieux ». Par exemple lorsque je suis allé à la banque pour ouvrir un compte professionnel, le responsable de la banque a d’abord dû venir à la boutique pour s’assurer que celle-ci servirait bien pour une pâtisserie. Tout ça juste pour l’ouverture d’un compte. Imaginez si j’avais fait une demande de prêt (rire).

Et ce genre de comportements, je l’ai toujours vécu. On me prenait pour « le gars qui faisait la plonge ». Aujourd’hui encore quand je suis dans ma boutique, certains clients viennent me demander à rencontrer le chef pâtissier. Lorsque j’annonce que je suis le chef, la stupeur se lit sur leur visage.

Malheureusement, aujourd’hui, je constate que notre jeunesse entrevoit son devenir dans trois ou quatre domaines : Le football, le Rap, les Réseaux sociaux ou encore dans des activités illicites. Mon combat, c’est de lui montrer qu’il y a pleins de bonnes choses à faire dans la vie.

Mes amis aussi m’ont pris pour un fou quand je leur ai parlé de mon projet et aujourd’hui quand ils voient tout ce que j’ai mis en place, ils sont bouche bée.

J’ai une belle boutique, enfin je l’espère, j’emploie une vendeuse à temps plein et j’ai deux stagiaires à qui j’aimerais transmettre ma passion.

Pour un Noir est-ce difficile d’intégrer ce secteur d’activités ?

C’est très compliqué d’intégrer certaines brigades. On va être honnête. Je suis un jeune, Noir, sans diplôme qui décide de se faire un nom dans ce milieu. Je casse un peu les codes. Je suis quelqu’un d’assez audacieux, pour obtenir ce que je voulais, je n’hésitais pas à appeler les hôtels ou pâtisseries pour parler au chef pâtissier et postuler auprès de lui directement.

S’il n’était pas disponible par téléphone, je me déplaçais pour obtenir ne serait-ce que quelques minutes d’échanges.

Une activité comme la vôtre nécessite des projets pour demain, en avez-vous pris la teneur ?

En premier lieu, j’aimerais vraiment pouvoir ouvrir une pâtisserie au Mali dont je suis originaire. Ça me tient à cœur, d’autant plus que c’est quelque chose de très demandé et je connais plutôt bien le pays.

Par la suite, j’aimerai me développer dans toute l’Europe et à plus long terme m’étendre dans le reste de l’Afrique.

Mon rêve ultime serait de créer une Académie de pâtisserie pour transmettre à la jeunesse des quartiers et d’ailleurs mon savoir-faire. J’aimerais qu’ils se rendent compte que tout est possible avec de la volonté. Si moi qui suis issu d’une famille pauvre et qui a grandi dans la banlieue, j’y suis arrivé, alors tout le monde peut le faire. J’ai toujours été une sorte de « conseiller » pour les jeunes de mon quartier.

Malheureusement, aujourd’hui, je constate que notre jeunesse entrevoit son devenir dans trois ou quatre domaines : Le football, le Rap, les Réseaux sociaux ou encore dans des activités illicites. Mon combat, c’est de lui montrer qu’il y a pleins de bonnes choses à faire dans la vie.

La diaspora africaine se sent-elle solidaire dans votre démarche professionnelle ?

Je reçois des messages de soutien. Beaucoup. Quand les clients issus de la diaspora viennent à la boutique, ils demandent à me voir. La seule chose qui me manquait, c’est pouvoir raconter mon histoire à un journal panafricain et maintenant c’est chose faite.

Je pense que c’est très important de pouvoir être représenté dans tous les milieux. Le fait même d’avoir ouvert un établissement qui propose que de la pâtisserie c’est unique.

Une personne comme moi « qui n’a pas de nom » dans ce milieu et qui ouvre ce genre de boutique, ça n’a encore jamais été fait. Je suis fier que les membres de la communauté reconnaissent mon travail et surtout qu’ils en parlent.

@CA

ENCADRE

Silamaka Soukouna, un pâtissier singulier pluralisant

Jeune fontenaisien (Fontenay-sous-Bois) d’origine malienne, Silamaka Soukouna a eu un parcours atypique et une enfance semée d’embuches.

Membre d’une famille de 17 enfants, il a connu des moments difficiles rythmés entre les nuits dans les tentes de Vincennes et les habitations modulaires frappées du logo Algeco qui leur servaient de domicile.

Très tôt, il a été en échec scolaire. Ma vie ne sera pas celle d’un gueux ou d’un grabataire tendant la main, se dit-il. Aussi se tourne-t-il vers la vie professionnelle à pas forcés.

La pâtisserie de Silamaka Soukouna

De 14 à 15 ans, il travaille sur les marchés pour ensuite débuter un pré-apprentissage dans la pâtisserie à l’âge de 15 ans.

Silamaka Soukouna a dû se débrouiller seul pour atteindre ses objectifs. Aujourd’hui, il est propriétaire de sa pâtisserie basée dans le quartier du vieux Fontenay-sous-Bois dans le Val-de-Marne en banlieue parisienne.

@CA

Écrit par
Par Cindy Ahodehou

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