Tchad : La Sotel sous administration provisoire
De ces réflexions, explique le ministre, plusieurs stratégies de sortie de crise ont été élaborées, mais leur mise en oeuvre se heurte à diverses pesanteurs liées principalement au manque de ressources financières pour enclencher les actions préconisées. Quelques tentatives de privatisation ou de partenariat stratégique ont été menées, sans qu’elles puissent aboutir à des résultats probants.
En effet, fin mai 2000, soit deux ans seulement après sa création, la Sotel a été dessaisie de 57 % de ses recettes au profit de la Société tchadienne des postes et de l’épargne (STPE) et de l’Office tchadien de régulation des télécommunications (aujourd’hui ARCEP, Autorité de régulation des communications électroniques et des postes) et se préparait à une privatisation appuyée par la Banque mondiale. Mais la société est reprise par Libertis, une entreprise privée étrangère, qui se contente de fonctionner avec l’ancienne licence.
Ceci mécontente la Banque mondiale qui met fin à son accompagnement. Seule face à son destin, la Sotel cumule les passifs. L’État décide alors de sauver son entreprise, éponge un passif de 55 milliards de F.CFA (83,9 millions d’euros) pour permettre au groupe de repartir sur de nouvelles bases et de faire face un tant soit peu à ses deux concurrents qui gagnent très vite du terrain. La privatisation est à nouveau à l’ordre du jour ; de potentiels repreneurs se signalent.
En 2010, avec l’intervention de Mouammar Kadhafi, le rachat est attribué à une entreprise libyenne, Green Network, pour 45 milliards de F.CFA (68,6 millions d’euros). Une avance de 10 milliards est versée au Tchad.
Mais la chute du régime Kadhafi fait à nouveau capoter cette deuxième tentative de privatisation. Et la Sotel replonge dans les dettes qui dépassent aujourd’hui la trentaine de milliards. Pour l’ancien ministre de tutelle, Daoussa Déby Itno, « privatiser la Sotel, c’est lui trouver une porte de sortie » ; sachant qu’une privatisation passe par un plan social acceptable pour la réinsertion des 556 employés du groupe.
Une responsabilité sociale
Un pacte social, accepté par la direction générale de la Sotel et ses partenaires sociaux, mi-février 2014, prévoyait en effet une prime incitative au départ pour les agents ayant 15 ans ou plus d’ancien- neté. Cette prime incitative, qui représente soixante mois de salaire, avait été calculée sur la moyenne des douze derniers salaires bruts, rehaussée du dixième de toutes les primes allouées à l’agent.
Au siège de la Sotel, il règne toujours ce climat morose et plein de suspicion. « Aujourd’hui, l’heure est grave car les difficultés éprouvées par la Sotel Tchad la mettent dans une situation de quasi-cessa-tion de paiement et il importe d’opérer sa mue afin de permettre à cette société de jouer pleinement son rôle économique et social dans le cadre du développement de notre pays », insiste Mahamat Allahou Taher.
Pour le ministre, il est inadmissible qu’à l’ère où l’économie numérique est un des facteurs de croissance des nations, la Sotel Tchad soit dans la situation qui la caractérise actuellement et qui fait que le concours de l’État se révèle son seul moyen de survie.