Maroc : Dessalement de l’eau de mer
Le Maroc se doit de préserver dans la mesure du possible ses ressources en eau, tout en assurant la disponibilité nécessaire. Des solutions innovantes sont mises en œuvre à cet effet.
Par Gérard Choisnet
Mohammed Boussaid, ministre de l’Économie et des finances, et Aziz Akhannouch, ministre de l’Agriculture, de la pêche maritime, du développement rural et des eaux et forêts, ont présidé le 29 juin à Rabat la cérémonie de signature des documents contractuels pour la réalisation du projet de dessalement de l’eau de mer pour l’irrigation et l’alimentation en eau potable dans la région du Souss Massa (Agadir).
Selon le ministre de l’Économie, ce projet, d’une approche innovante au niveau de la conception et du montage reposant sur un partenariat public-privé (PPP), est le plus grand projet de dessalement de l’eau de mer mutualisé d’irrigation et d’eau potable dans le monde. Cette expérience est de nature à être dupliquée dans d’autres régions du royaume, mais aussi dans certaines régions du monde.
Le recours au dessalement de l’eau de mer a été dicté par la nécessité d’accompagner le développement de la région du Souss Massa, caractérisé par un grand dynamisme socioéconomique, urbanistique et touristique, dans la mesure où cette région est alimentée actuellement à partir de ressources superficielles à raison de 80% (barrages de Moulay Abdellah et de Abdelmoumen).
Et ainsi à partir de ressources souterraines à hauteur de 20% (nappe de Souss) qui permettent de satisfaire les besoins en eau potable à l’horizon 2020 seulement.
À terme, le projet permettra de sécuriser l’approvisionnement en eau potable du Grand Agadir et de fournir l’eau pour l’agriculture irriguée à haute valeur ajoutée de la zone de Chtouka. Il vise la sécurisation de l’alimentation en eau potable d’une population de 2,3 millions d’habitants à l’horizon 2030, dont 20 % en milieu rural.
L’entreprise espagnole Abengoa a signé les contrats de développement de ce projet mutualisé, évalué à 309 millions d’euros (près de 4 milliards Dh), qui prévoit la construction d’une usine de dessalement d’une capacité de production de 275 000 m3 d’eau par jour, la plus grande usine conçue pour l’eau potable et l’irrigation. Le contrat prévoit également une possibilité d’extension jusqu’à 450 000 m3/j.
La première partie du projet porte sur l’augmentation de 50 % de la capacité de production au titre d’un contrat d’Abengoa développé pour l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE), portant la capacité à 150 000 m3/j d’eau potable.
Le projet initial, redimensionné, change de site : au lieu de Cap Ghir, où les premiers travaux avaient été entrepris en 2015 par Abengoa, l’usine sera finalement implantée à quelque 30 km au sud d’Agadir, vers Tiznit.
La deuxième partie du projet, promue par le ministère de l’Agriculture, de la pêche maritime, du développement rural et des eaux et forêts, porte sur une production additionnelle de 125 000 m3/j d’eau d’irrigation, ainsi que la construction du réseau d’irrigation correspondant pour un total de 13 600 ha.
Outre l’investissement lié à l’usine de dessalement de l’eau de mer de près de 2 milliards de Dh pour sa composante eau potable, l’ONEE réalisera des investissements additionnels de 600 millions Dh HT pour la pose de 44 km de conduites, la construction d’un réservoir d’eau potable de 35.000 m3, l’installation de 3 lignes électriques HT sur 55 km à partir du poste source de Tiznit connecté au complexe solaire Noor Ouarzazate, et la construction de 2 stations de pompage et 2 réservoirs de mise en charge. Il est prévu une option pour l’alimentation du projet par énergie éolienne.
La structuration du projet en PPP permet la cohabitation, au sein d’un même ouvrage public, de deux délégations de service public, respectivement consenties aux partenaires privés par le ministère de l’Agriculture et l’Office régional de mise en valeur du Souss Massa d’une part, et par l’ONEE d’autre part.
Abengoa assurera l’ingénierie, la construction, l’exploitation et la maintenance sur une période de 27 ans. Abengoa et le fonds d’investissement marocain InfraMaroc (CDG) sont les partenaires de l’investissement et les responsables du financement du projet (État marocain, partenaires privés et emprunt bancaire de 1,5 milliard Dh auprès de la BMCE).
Le groupe Abengoa est présent au Maroc depuis 1977 et dispose de bureaux à Rabat et Casablanca. Il a réalisé d’importants projets à grande échelle dans ce pays, comme la première usine mondiale ISCC (cycle combiné solaire intégré) située à Ain Beni Mathar.
Norton Rose Fulbright, cabinet d’avocats d’affaires international, a assisté le consortium Abengoa/InfraMaroc dans la structuration, la rédaction et la négociation de la documentation contractuelle relative au projet d’usine de dessalement de l’eau de mer.
Le ministère de l’Agriculture et l’Office régional de mise en valeur du Souss-Massa étaient conseillés sur le plan juridique par Maria Bahnini et sur le plan technique et financier par Hassan Benabderrazik, dans le cadre d’un contrat avec Agro Concept et BRLi. L’ONEE était assisté par son propre conseil juridique.
À terme, le projet permettra de sécuriser l’approvisionnement en eau potable du Grand Agadir et de fournir l’eau pour l’agriculture irriguée à haute valeur ajoutée de la zone de Chtouka. Il vise la sécurisation de l’alimentation en eau potable d’une population de 2,3 millions d’habitants à l’horizon 2030, dont 20 % en milieu rural.
Ce projet de grande envergure permettra également de porter le taux d’accès à l’eau potable en milieu rural à 100 % au niveau du Grand Agadir, d’accompagner le développement socio-économique de la région et de préserver les ressources en eau souterraines.