Donner le leadership à la jeunesse La jeunesse africaine est à la fois un atout et un défi (formation, emploi). Lotfi Saïbi veut contribuer à former de nouveaux esprits et de nouveaux leaders. Rencontre.
Dakar, Seydou Ka
Dans son costume bleu ciel assorti d’une chemise noire, sans cravate, cheveux frisés, Lotfi Saïbi dégage incontestablement une certaine empathie. Il peut passer « toute la journée devant un café» à causer sur des questions liées à la jeunesse africaine. Il maîtrise les codes de communication moderne, comme en atteste sa présence sur la Toile.
Lorsque nous l’avons rencontré, dans un hôtel dakarois, il venait de faire ses « premiers pas » en Afrique, en compagnie d’une délégation d’hommes d’affaires tunisiens en mission de prospection au Sénégal.
Paradoxalement, à 57 ans et après vingt ans de voyage à travers le monde, Lotfi Saïbi connaît peu le continent. « Connaître l’Afrique, c’est connaître son histoire, sa richesse, ses habitants et ses traditions. » Il se dit « ravi » de ce premier voyage au Sénégal, où il a noué des contacts avec la Chambre de commerce de Dakar et l’Agence sénégalaise de développement et d’encadrement des petites et moyennes entreprises (Adepme) pour accompagner les jeunes porteurs de projets.
Il veut identifier, dans chaque pays, des jeunes pour les former au « self determination » afin de créer « des noyaux » de leaders sur le continent.
Origines modestes
Originaire d’un petit village de Sidi Bouzid, dans le Sud tunisien, Lotfi Saïbi a fait du chemin. Jeune bachelier, il quitte la Tunisie, au début des années 1980, à l’âge de 17 ans, pour rejoindre les États-Unis, précisément Boston, « pour quatre ans, le temps d’étudier pour revenir », pensait-il. Son séjour états-unien durera plus de trente ans. « J’ai raté la dictature de Ben Ali », sourit-il, d’une voix sans regret.
En 2011, il revient au pays « pour six mois afin d’aider la transition», pensait-il, là aussi. Depuis lors, Lotfi Saïbi est resté, constatant que six mois, c’est « insuffisant pour contribuer à redonner la confiance et l’autonomie de pensée à une jeunesse biberonnée, depuis plusieurs années, à une culture top-down, où c’est toujours quelqu’un qui décide à sa place.
«La jeunesse tunisienne n’était pas prête pour la démocratie, il lui manquait la confiance en soi», constate Lotfi Saïbi, qui se dit frappé par le paradoxe entre la révolution digitale qui permet aux jeunes Africains d’avoir accès à toutes les informations, alors qu’ils sont « incapables de réfléchir par eux-mêmes ». Ce qui explique, pour ce qui est de la Tunisie, «le retour des oligarques».
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