L’ancrage à l’euro réduit les risques inflationnistes

Selon les constats de la Banque de France, les pays dont la monnaie est arrimée à l’euro présentent des facteurs de risques moindres que les autres, en Afrique subsaharienne. La perte de croissance sera limitée en 2020 et l’inflation est maîtrisée.
Par Marie-Anne Lubin
Une synthèse d’études publiée par la Banque de France, le 28 octobre, met en relief les capacités de résilience des pays africains membres des zones franc CFA.
Elles présentent des perspectives de croissance – ou plus exactement de ralentissement de croissance – plus favorables que leurs voisins, en 2020. Surtout, les craintes inflationnistes qui s’étaient exprimées au début de la pandémie sont, pour l’heure, non justifiées.
« L’intégration des marchés régionaux dans le cadre des deux unions est sans doute un facteur de limitation des tensions de prix. Mais elle suppose que la fluidité des transports et de la logistique intrarégionale. »
Les pays arrimés à l’euro « devraient faire face en 2020 à une récession de 0,4 %, nettement moins marquée que celle de l’Afrique subsaharienne dans son ensemble » (-3,0 %), selon la Banque centrale française.
En 2019, la croissance était en moyenne de 4,5 % dans les pays de l’Uemoa (Union économique et monétaire ouest-africaine et de la Cemac (Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale) et de l’Union des Comores. Soit davantage que les 3,2 % enregistrés par l’ensemble de l’Afrique subsaharienne.
Cette année, la croissance devrait rester positive dans l’UEMOA (1,3 %), ce qui marquera néanmoins un recul du PIB/habitant étant donné la croissance démographique élevée de ces pays. En revanche, la Cemac doit s’attendre à une récession de 3,1 %, la zone étant davantage dépendante des exportations de pétrole.
Enfin, dans l’attente de la mise au point de vaccins, une diffusion fractionnée de la Covid-19 demeure possible, à l’image des multiples résurgences du virus Ebola au cours des périodes 2014-2016 et 2019-2020.
D’autre part, à 0,3 % en 2019, le niveau d’inflation est dans l’ensemble de la zone franc beaucoup plus bas que dans l’ensemble de l’Afrique subsaharienne (8,4 %). Un bon point pour la « croissance inclusive », car les populations les plus démunies sont en général les premières victimes de l’inflation. L’an dernier, l’Uemoa a même enregistré une baisse des prix (-0,7%) après 1,2% en 2018, en raison « de récoltes abondantes ».
Nul danger de déflation (baisse durable des prix), toutefois. En Uemoa, un taux d’inflation structurellement faible est en partie la conséquence de l’ancrage du franc CFA à l’euro, constate la Banque de France. « Ces pays ont un niveau d’inflation qui est très lié à celui de la zone euro, mais qui est normalement plus proche de 2 % », a expliqué à l’AFP Vincent Fleuriet, chef de la division Afrique et développement de la Banque de France.
Un gage de stabilité
Pour cette année dans la zone franc, « l’inflation progresserait, en dépit du ralentissement économique, à 2,1 %, contre 10,6 % dans l’ensemble de l’Afrique subsaharienne », prédit la Banque de France. Le repli de l’activité s’accompagnerait dans l’ensemble d’un ralentissement marqué de l’inflation et d’une dégradation forte et globale des soldes courants et budgétaires, notamment en raison des plans de relance à caractère contracyclique mis en œuvre pour limiter la récession.
À cause de la récession mondiale provoquée par la pandémie de Covid-19, des pays comme le Nigeria ou l’Afrique du Sud, poids lourds économiques du continent, « ont vu leur taux de change reculer fortement et des tensions inflationnistes s’ajouter à la crise économique pour réduire le pouvoir d’achat et la consommation », poursuit l’économiste de la Banque de France.