Kenneth Campbell et la data

L’opérateur téléphonique Ooredoo Tunisie, anciennement Tunisiana, filiale du qatari Ooredoo, a beau être leader, son directeur général, Kenneth Campbell, recherche les relais de croissance de demain. Il mise sur l’accès et le transfert des données, tant en téléphonie fixe que mobile.
Depuis votre arrivée, quel a été votre plan d’action ?
Je suis en Tunisie depuis trois ans. Ma mission était, au départ, de gérer une entreprise dans un pays qui connaissait de grands changements, suite aux événements du 14-Janvier. Les priorités de mon action depuis cette période se déclinaient ainsi : stabiliser et assurer la bonne marche de l’activité ; obtenir la licence 3G et fixe afin de constituer une nouvelle plateforme. Ces choix ont conditionné la croissance et l’avenir de Tunisiana. Nous avons obtenu la licence 3G et nous sommes en train de mettre en place tous les éléments nécessaires pour démocratiser l’offre des données, comme cela avait été le cas avec le mobile. Notre aventure en Tunisie a commencé 2002. J’étais déjà présent à cette époque, en tant que directeur du marketing et, donc, pendant ces 12 dernières années, nous avons été au cœur de la création du marché du mobile. Aujourd’hui, nous en sommes le leader, avec plus de 54 % de parts de marché, et environ 6,5 millions d’abonnés. Nous avons mis le mobile dans la main de chaque Tunisien ! Nous voulons faire la même chose avec l’accès et le transfert des données. C’est l’avenir !
Votre marché est très concurrentiel, bien que de taille limitée. Est-il en mesure de supporter la présence de plusieurs acteurs ? En quoi jouez-vous votre différence ?
La Tunisie compte trois opérateurs et la compétition est très vive. Les prix sont avantageux, ce qui bénéficie au consommateur. Dans un marché ayant atteint ce niveau de maturité, la qualité de l’offre fait la différence. Nous différons par la qualité du service clientèle et celle de notre réseau, la notoriété de la marque et la fiabilité de nos centres d’appels. Nos atouts expliquent nos bons résultats ces dernières années. Effectivement, nous avons créé « un écosystème » qui marche très bien !
Quel est le volume de vos investissements pour assurer cette qualité et poursuivre votre expansion ?
Pour la 3G et la téléphonie fixe, par exemple, nous avons déboursé 205 millions de dinars. L’investissement va permettre à Ooredoo Tunisie de lancer de nouveaux services de données mobile à ses clients et de devenir un acteur incontournable, dans ce domaine, auprès des entreprises et des particuliers. Nous investissons chaque année quelque 200 millions de dinars dans les réseaux à travers les infrastructures, afin de nous assurer de la qualité du réseau pour être toujours le meilleur sur le marché.
Pour réduire certains coûts concernant les infrastructures et autres relais, menez-vous des actions de mutualisation avec les autres opérateurs ?
Nous avons partagé, en effet, quelques tours ou pylônes avec nos concurrents ; mais la majorité des sites nous appartient. Vous avez raison de souligner cette réalité : aux États-Unis, en Europe, et même en Afrique, les opérateurs partagent de plus en plus leurs infrastructures. Cette mutualisation constitue sûrement un enjeu d’avenir. Car la croissance réalisée par le marché ne peut pas se poursuivre au même rythme que celui des deux dernières années.
Dans votre stratégie, vous avez la volonté de constituer une « culture maison », en formant des équipes, un encadrement structuré…
Cet élément est très important pour nous ! Ce qui distingue Tunisiana – Ooredoo aujourd’hui – de ses concurrents, c’est justement cette « culture maison ». Nous avons démarré avec quelques personnes et aujourd’hui nous sommes 1 900 ! Le taux de couverture du pays atteint les 100 %. C’est ce qui explique, 12 ans après, notre place de numéro un du marché. Nous privilégions, dans notre culture d’entreprise, auprès de nos salariés, la recherche d’amélioration continue.
Quel est le retour sur investissement ? Et comment réinvestissez-vous vos bénéfices ?
Nous gagnons de l’argent, mais nous en donnons beaucoup aussi à l’État ! Notre chiffre d’affaires avoisine le milliard de dinars. La rentabilité est inférieure à 20 %. Certes, nos affaires marchent très fort, avec une croissance interne de 2 % à 3 % l’an. Cependant, l’environnement est risqué. Par exemple, le taux d’inflation est de 9 %. Dans un contexte des affaires telles que les nôtres, s’il n’y a pas de croissance, les coûts grèvent les marges. Il est nécessaire d’intégrer tous ces paramètres. C’est pour cette raison que nous nous engageons vers d’autres innovations, comme les données, le fixe, etc.