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Ecobank, Emmanuel Ikazoboh parle

  • Publiéseptembre 11, 2015

Emmanuel Ikazoboh, PDG de Ecobank. Juin 2014 : tandis que Ecobank traverse une tempête, Emmanuel Ikazoboh accède à la présidence. Un an plus tard, le navire semble s’être stabilisé. African Banker l’a rencontré, en marge de l’Assemblée générale 2015.

Emmanuel Ikazoboh l’affirme : il n’a pas été intimidé par l’ampleur de la tâche qui l’attendait à Ecobank ; en tant que panafricain, le défi le séduisait. Ses années chez Deloitte, où il a passé la plus grande partie de sa carrière et dirigé les cabinets d’Afrique centrale et de l’Ouest, lui ont donné l’expérience des affaires au niveau panafricain. Membre du conseil d’administration africain chez Deloitte, il a fait partie de l’équipe qui a coordonné l’intégration des cabinets Deloitte à travers le continent. Néanmoins, chez Ecobank, la tâche s’est avérée plus ardue que prévu : « C’était plus complexe que ce que je croyais. La banque avait connu une expansion telle au cours des sept ou huit années précédentes que certains processus et structures n’avaient pas été mis pas en place. Nous avons dû intégrer les processus de gouvernance pour consolider l’expansion. »

Sur 90 personnes, trois candidats ont été retenus : deux internes et un externe. Enfin, le conseil a choisi le vétéran de Citigroup, Adebayo Ayeyemi, qui prendra les rênes de la société  le 1er septembre. Les deux candidats internes ont bien accueilli cette décision, fait observer Emmanuel Ikazoboh

En effet, Emmanuel Ikazoboh a consacré une bonne partie de l’année à régler ces problèmes. Il a mis en oeuvre un plan d’actions en 51 points pour améliorer les contrôles internes et la gouvernance d’entreprise. « La gouvernance d’entreprise ne signifie pas la même chose pour Ecobank que dans d’autres banques qui sont implantées dans un seul pays. Nous possédons des filiales dans divers pays possédant des cultures et des réglementations différentes. Nous avons dû établir une norme minimale commune à toutes les filiales, puis dans chaque pays, nous avons dû mettre en place certaines structures pour nous adapter aux besoins locaux. » Autre point urgent de sa liste : la nomination du nouveau directeur général.

Albert Essien, qui avait succédé à Thierry Tanoh en mars 2014, devait se retirer en juin 2015, à son 60e anniversaire. En plus de trouver la bonne personne, le président devait veiller à ce que le processus de recrutement soit complet et transparent. Il a formé un comité et recruté des chasseurs de têtes internationaux comme Stuart Spencer, qui ont porté des choix sur des candidats internes et externes. Sur 90 personnes, trois candidats ont été retenus : deux internes et un externe. Enfin, le conseil a choisi le vétéran de Citigroup, Adebayo Ayeyemi, qui prendra les rênes de la société  le 1er septembre. Les deux candidats internes ont bien accueilli cette décision, fait observer Emmanuel Ikazoboh pour qui leur attitude « témoigne de leur dévouement envers la banque. Ces candidats ont considéré que l’établissement passait d’abord et étaient satisfaits que la procédure de recrutement se soit faite sur la base de la méritocratie ».

Une culture d’innovation

Bien plus qu’un établissement bancaire, Ecobank se distingue par différents aspects, mais une société panafricaine peut-elle être une entreprise florissante au niveau mondial ? Emmanuel Ikazoboh est convaincu qu’Adebayo Ayeyemi est l’homme qu’il faut. Après tant de changements dans sa direction, la banque n’a plus droit à l’erreur. Le président estime qu’Adebayo Ayeyemi possède l’expérience nécessaire – en tant que premier Noir africain nommé directeur général Afrique subsaharienne à Citibank – et de précieuses qualités pour diriger la banque, en particulier une culture de l’innovation : « Pour fonder un établissement bancaire et réaliser une expansion aussi rapide, il fallait une culture autoritaire. À présent que cette expansion a été réalisée, nous avons besoin d’une culture d’innovation, où les personnes peuvent proposer différentes idées. Nous recherchions quelqu’un qui avait travaillé dans un environnement novateur pour faire progresser la banque. »

Après une année difficile en 2013, où la banque a enregistré des dépréciations d’actifs, Ecobank a obtenu de bien meilleurs résultats l’année suivante, avec une hausse de 14 % du produit net bancaire et de 230 % du résultat net consolidé qui s’est établi à 339 millions. Bien qu’en diminution, le coefficient d’exploitation est toujours plus élevé que chez ses concurrents, aussi Emmanuel Ikazoboh reconnaît qu’il faut poursuivre les eff orts de réduction des coûts. Plus inquiétants, en apparence, sont le poids de la fi liale nigériane dans les résultats (un peu moins de la moitié), ainsi que l’importance du service de trésorerie dans la rentabilité. À 45 %, cette part est nettement supérieure à la moyenne du secteur. Emmanuel Ikazoboh ne trouve pas ces signes préoccupants.

Il attribue les résultats actuels de Ecobank à la consolidation bancaire, à la réduction des coûts et à une meilleure gestion du capital et se félicite de la vaste présence géographique de la banque. « Notre présence dans 36 pays nous donne une position qu’aucune autre banque d’Afrique ne possède. Les fonds peuvent circuler facilement entre les différents pays et nous sommes équipés d’une plateforme technologique commune. Nous bénéficions là d’avantages concurrentiels certains sur les autres banques en Afrique. Nous devons considérer chaque fi liale individuellement et savoir où l’on doit proposer uniquement des services aux particuliers, où l’on doit proposer unique-ment des services aux entreprises et où l’on doit proposer les deux. Ce sont les restructurations que nous effectuons actuellement pour nous assurer d’une utilisation efficace du capital dans chaque pays. »

Des risques maîtrisés

Au cours de l’Assemblée générale qui s’est tenue fin juin 2015 en Tanzanie, Emmanuel Ikazoboh a rappelé que la banque devait faire face à des conditions économiques mondiales difficiles et à la chute des prix du pétrole et d’autres matières premières. Mais il s’est montré très optimiste quant aux résultats de l’année 2015. La banque n’a pas versé de dividendes ces deux dernières années, suscitant la critique des actionnaires. Selon le président d’Ecobank, cette situation s’explique principalement par les exigences réglementaires dans chacune des filiales.

Qu’en est-il du litige toujours non résolu entre l’ancien directeur général Thierry Tanoh qui a poursuivi Ecobank pour diffamation et licenciement abusif ? Thierry Tanoh a gagné ses procès devant les tribunaux ivoiriens et togolais, qui ont condamné la banque à lui verser plus de 20 millions d’euros, mais celle-ci a fait appel de cette décision

La réglementation transfrontalière est devenue une question centrale quand des problèmes sont survenus l’an dernier. Comment les régulateurs pouvaient-ils s’assurer que les mauvais résultats d’une filiale ne créeraient pas de risque systémique pour les filiales d’autres pays ? Le président Ikazoboh estime que la société holding, dont le siège se trouve au Togo (ETI) et qui est soumise à la législation togolaise joue déjà ce rôle de réglementation : « Vous avez dû lire le rapport du FMI sur ce sujet ; certains estiment qu’ETI est un cauchemar pour les régulateurs en raison de sa structure. Nous nous sommes efforcés de leur faire comprendre que nous essayons d’isoler chacune de nos implantations afi n qu’en cas de difficulté, les autres ne soient pas touchées. ETI supervise toutes les filiales et non les transactions. Quant aux transactions entre les filiales, elles sont réalisées selon le principe de pleine concurrence pour s’assurer qu’il n’y a pas de conséquences nuisibles sur les activités d’autres fi liales. Nous veillons à ce que ces transactions soient effectuées comme si elles étaient réalisées avec n’importe quelle autre banque, afin de conserver une certaine indépendance. »

Emmanuel Ikazoboh insiste, avec cette discrétion qui le caractérise, sur le fait que les gouvernements et les régulateurs devaient valoriser le travail et les eff orts réalisés par le personnel de la banque.

Qu’en est-il du litige toujours non résolu entre l’ancien directeur général Thierry Tanoh qui a poursuivi Ecobank pour diffamation et licenciement abusif ? Thierry Tanoh a gagné ses procès devant les tribunaux ivoiriens et togolais, qui ont condamné la banque à lui verser plus de 20 millions d’euros, mais celle-ci a fait appel de cette décision. Emmanuel Ikazoboh a fait savoir que la banque préférerait négocier avec lui à l’amiable, mais suite à un récent jugement de la Haute Cour de Justice britannique annulant une injonction bloquant les paiements, elle pourrait se résigner à limiter les pertes et conclure rapidement un accord. Un an après sa nomination, regrette-t-il être devenu président ? « Cela a été difficile, plus que je ne le pensais, non pas en raison de la banque elle-même, mais en raison des problèmes qui existaient auparavant et qu’il fallait résoudre. On les résout progressivement. Mais je n’ai jamais regretté ma décision… Je crois dans le panafricanisme et je savais qu’il y aurait des défis à surmonter. C’est le meilleur Conseil d’administration avec lequel il m’ait été donné de travailler. Le talent et l’implication de ses membres, qui veulent tous que la banque soit un succès, sont impressionnants. Ce sont des personnes qui ont travaillé dans des banques et qui, pour la plupart, sont retraitées, mais veulent donner le meilleur d’elles-mêmes et laisser quelque chose pour leurs enfants et petits-enfants. Tous les membres du conseil ont des objectifs communs ».

Emmanuel Ikazoboh insiste, avec cette discrétion qui le caractérise, sur le fait que les gouvernements et les régulateurs devaient valoriser le travail et les eff orts réalisés par le personnel de la banque. Difficile de certifier s’il s’agissait d’un message voilé destiné aux autorités togolaises et ivoiriennes, mais Emma-nuel Ikazoboh ne peut douter du dévouement total de son équipe : « Le personnel est tellement dévoué à cette institution qu’il devrait être encouragé. J’estime que les gouvernements d’Afrique devraient encourager leurs banques et leur apporter l’appui nécessaire pour qu’elles puissent réaliser l’intégration économique de l’Afrique, qui est la vocation de notre banque».  

Écrit par
African Banker

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