Diversifier les financements
Le Togo met en oeuvre une série de réformes qui lui ont valu d’abriter la 1re édition de l’Africa Best Practices Forum, fin février 2015, à Lomé. Ce rendez-vous d’experts et de décideurs économiques a recadré la voie de l’émergence.
Selon des chiffres de la Banque mondiale, il faudra investir « 100 milliards $ par an en Afrique pour atteindre l’émergence à l’horizon 2020, dans un contexte général d’Aides publiques au développement (APD) en régression ». Cette analyse souligne indirectement le rôle prépondérant que devra jouer le secteur privé dans la marche vers l’émergence. « Une nouvelle donne qui commande prioritairement une transformation structurelle qui prenne en compte une meilleure gouvernance politique et économique. Le tout débouchant sur une croissance diversifiée de 7 % qui devrait durablement maintenir le cap de l’Afrique vers l’émergence », commente le Premier ministre du Togo, Kwesi Ahoomey- Zunu.
Il faut nécessairement une cohérence des politiques publiques entre le court et le long termes pour atteindre l’émergence. D’où l’importance de mettre davantage en valeur la mobilisation de financements régionaux
L’une des solutions pour accélérer l’émergence de l’Afrique réside dans la diversification des financements innovants qui font éclore, lorsqu’ils sont bien pensés, divers partenariats public-privé (PPP) porteurs. Le Forum de Lomé, qui s’est tenu fin février a exploré d’autres solutions gagnantes. Il a été coorganisé par deux Togolais, Didier Acouetey du Cabinet AfricSearch, spécialisé dans la détection de talents, et par le discret et influent homme d’affaires Arsène Johnson.
« Il faut surtout et avant tout réformer les esprits », tranche le ministre Kako Nubukpo, en charge de l’Évaluation des politiques publiques au Togo. « La cohérence des politiques publiques commande une hiérarchisation incontournable. Le Togo a été classé « 2e meilleur réformateur dans l’Uemoa » par le Doing Business 2014. « Le cadre tarifaire en vigueur en fait la zone la plus ouverte dans le monde au commerce, avec une monnaie forte. Aucune industrie de transformation ne peut émerger dans un tel contexte », explique Kako Nubukpo.
Dans un espace financier mondial bâti sur la concurrence et la compétitivité, « il faut nécessairement une cohérence des politiques publiques entre le court et le long termes pour atteindre l’émergence. D’où l’importance de mettre davantage en valeur la mobilisation de financements régionaux », considère Bassary Touré, vice-président de la Boad, le bras financier de l’Uemoa. Des déclarations, des faits et gestes qui convergent vers une même conclusion : le développement et l’émergence ne sont pas une gageure en Afrique, à condition de s’en donner les moyens.
« L’émergence des Africains sera le fruit d’efforts efficaces sur la durée. L’innovation entrepreneuriale est primordiale pour se démarquer de ses concurrents. Il faudra encourager par la même occasion le nationalisme économique, à travers des mécanismes qui ne rebute pas pour autant l’investisseur étranger. À Singapour, 30 % de l’actionnariat de tout type d’investissement doit être singapourien ; c’est une règle qui a montré son efficacité », décrypte Nazri Muhd, consultant financier international, lui-même Singapourien. Dans le nouvel ordre financier dans lequel veut s’inscrire l’Afrique, « l’APD doit donc constituer un complément et non la base même du développement. Les États africains doivent ainsi diversifier la structure de leur endettement, en le rendant plus privé que public », confirme Stanislas Zézé, PDG de l’agence africaine de notation Bloomfield.