Atteindre les sommets
À la tête de la première banque privée mauritanienne, la BMCI, Moulay Abbas ne recule devant aucun défi , y compris sportif ! Dans un pays faiblement bancarisé, le jeune patron envisage l’étape de la monétique.
Le jeune patron de la Banque maurita-nienne pour le commerce international (BMCI) ne s’en laisse pas conter. La banque, fondée par son père, dont il a pris la tête après le décès de ce dernier en 1999, est leader sur la place, quasiment depuis sa création en 1974. Sa plongée dans le milieu bancaire mauritanien s’est faite précipitamment. Alors qu’il préparait un MBA aux États-Unis, après l’obtention de son diplôme à Sup de Co Poitiers, il est rappelé à ses obligations. « J’ai dû rentrer en Mauritanie. Étant l’aîné des garçons – j’ai deux grandes soeurs et deux plus jeunes – j’avais été désigné pour être son successeur mais il n’était pas prévu que je lui succède aussi vite. Je n’avais alors que 23 ans ! » Il apprend le métier au contact des collaborateurs de son père. « Je n’étais pas préparé à gérer une grande banque à cet âge mais j’ai été soutenu, formé par les partenaires de mon père. Les choses n’ont pas été évidentes au début. Il a fallu parfois batailler. Je suis le fils de mon père donc j’ai un très fort caractère, aussi si une personne cherche le conflit, elle a intérêt à bien savoir ce qu’elle fait ! »
Et le jeune homme, grand compétiteur, compte bien conserver sa place de champion. Avec un total de bilan, en 2014, de 93,5 milliards de ouguiyas (près de 296 millions d’euros) et 68,7 milliards de ouguiyas (217,6 millions d’euros) de dépôts pour l’ensemble de ses 104 895 clients, la banque privée se taille la part du lion en Mauritanie, soit près de 32 % de part de marché. Et les chiffres pour le 1er trimestre 2015 confirment la tendance. « Nous sommes toujours leader sur le marché bancaire. Nous avons 108 462 clients au 31 mars 2015. Grâce à notre réseau de 40 agences sur tout le territoire. Nous visons les 50 agences en 2018, cela nous permet d’apporter nos services à une clientèle de particuliers. BMCI a une répartition de 90 % de particuliers et 10 % d’entreprises. Nous sommes une banque de détail, ce qui ne nous empêche pas d’avoir une grande expérience dans le corporate. Nous avons aujourd’hui tous les grands groupes mauritaniens et étrangers, dans le BTP, les mines et la grande distribution comme Total ou le SNIM. Le marché mauritanien est trop petit pour spécialiser sur un marché en particulier donc nous pratiquons la banque généraliste », précise Moulay Abbas.
Le dirigeant veut faire entrer sa banque dans l’ère de la modernité : « Nous préparons une nouvelle version de notre site web qui permettra l’ouverture en ligne d’un compte bancaire. La loi mauritanienne ne l’interdit pas. Nous prenons quand même toutes les dispositions de sécurité pour nous protéger du risque de blanchiment ou de financement du terrorisme. Les Mauritaniens sont très avides de modernité et de nouvelles technologies. Un produit comme cela peut les intéresser. Pour ceux qui vivent à l’étranger, passer par le secteur informel est de plus en plus dangereux. Nous leur proposons des transferts en toute sécurité. Ils peuvent envoyer de l’argent sur une carte prépayée à leur famille dans les villages ».
« J’ai confiance en mes équipes et dans l’esprit de leadership. Nous avons instauré un système de gouvernance collective, autour d’une équipe de direction très compétente. »
Ses projets ? Pour la période 2018-2020, Moulay Abbas entend arrêter le développement par les agences, et se concentrer sur les produits liés aux nouvelles technologies : e-banking et monétique. Au-delà des chiff res, la banque impressionne par sa stabilité. Pourtant, l’arrivée de concurrents sérieux comme la Société Générale ou la marocaine Attijariwafa bank n’a pas ébranlé l’optimisme de son dirigeant. « Nous avions déjà anticipé l’ouverture du marché bancaire à la concurrence il y a de cela, dix ans. Nous sommes en chantier permanent pour améliorer nos produits et nos équipes. Nous avons le plus gros budget formation du système bancaire, 150 millions de ouyghas par an. Nous faisons pratiquer du coaching à nos équipes, nous avons créé notre propre centre interne de formation. » La banque développe un plan stratégique avec les équipes d’Ernst & Young qui va jusqu’en 2018. « Nous commen-çons à réfléchir à 2020 et 2023. Nous essayons toujours de nous projeter dans l’avenir. Nous sommes sereins. »