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Alioune Badara Mbengue, l’inventeur sénégalais

  • Publiéjuillet 5, 2018

Étudiant, entrepreneur, passionné de bandes dessinées, d’art et de technologies, Alioune Badara Mbengue a déjà des idées futuristes pour l’Afrique.

À Dakar, Seydou Ka

Il a encore les manières d’un adolescent dans sa gestuelle et son langage. Né à Dakar et ayant grandi dans un environnement classique, Alioune Badara Mbengue vit les mêmes réalités, a les mêmes préoccupations et donc les mêmes rêves que la grande majorité des jeunes Sénégalais.

Avant, pour utiliser la technologie, il fallait pouvoir lire, manier des touches, aujourd’hui avec l’assistance vocale, n’importe qui peut utiliser toute technologie ; l’Intelligence artificielle est une formidable opportunité pour démocratiser la technologie en Afrique.

Quand on lui demande ses héros, il cite Steve Jobs qui, pour avoir réussi le mariage entre le design et la technologie, a « changé le monde à sa manière » et Nelson Mandela qui a démontré que « l’impossible n’existe pas ». Il nous montre deux portraits de ses « héros » sous-titrés de leurs citations, qui ornent sa maison familiale dans le quartier de Mermoz à Dakar…

Pas étonnant donc, que malgré son jeune âge, 20 ans, il fasse preuve d’une étonnante maturité dans sa vision de l’entrepreneuriat et du futur de l’Afrique. « On ne peut changer l’Afrique qu’en développant des technologies qui nous ressemblent, qui répondent à notre contexte et qui permettent de résoudre des problèmes concrets. » À l’appui de son propos, il évoque le succès fulgurant du mobile banking sur le continent.

Un passionné de mangas

Cette conviction, le jeune Mbengue a commencé à l’appliquer, avec un ami (Papa El Hadji Mandiaye Gningue) rencontré dans un groupe de passionnés de bandes dessinées mangas. « Au début, nous dessinions des mangas et nous avons remporté plusieurs prix », raconte-t-il.

Par la suite, les deux complices passent à la technologie, dans le cadre d’un projet dénommé « Mb@l-IT » (un jeu de mots inspiré du mot wolof balit qui signifie ordure ou poubelle), et développent une poubelle intelligente. Concrètement, cette poubelle qui parle, intégrée à un système global de récupération et de gestion des déchets en fonction de leur nature, est capable d’indiquer à l’utilisateur où mettre chaque type de déchet.

Le projet est parti d’un constat simple : le problème de la gestion des déchets, commun à toutes les villes africaines. «Les déchets ne sont pas bien triés, donc on a voulu proposer une solution pour instaurer le tri sélectif au Sénégal. Pour ce faire, les poubelles produites ailleurs n’étaient pas adaptées et il aurait fallu expliquer à une population analphabète la charte des couleurs, etc. On s’est dit qu’il fallait créer une poubelle qui parle littéralement aux gens, en langues locales, pour leur expliquer le tri sélectif», explique-t-il.

Cet outil n’est qu’une première étape, pour sensibiliser les populations au tri. Sur le long terme, le jeune inventeur prévoit de rendre la poubelle «assez équipée» pour pouvoir trier elle-même les déchets. Techniquement, c’est déjà «réalisable». En effet, il suffit d’un laser qui teste la résistance des objets afin de déterminer les différents matériaux et les classer ensuite.

Néanmoins, cette technologie est encore trop chère et n’«est pas rentable du point de vue de notre business plan». Le jeune inventeur ne prévoit pas de vendre cette poubelle, mais de la mettre à la disposition de l’Unité de collecte et de gestion des déchets (UCG), tout en gardant la propriété. «Ce qu’on vend, c’est la visibilité, parce que les écrans blindés sur ces poubelles permettent de faire de la publicité ; nous pouvons soit louer cet espace aux régies publicitaires, soit le vendre nous-mêmes en tant que régie».

Lauréat du prix Hub Africa

Déjà primé par l’OIF, le projet a conquis le jury du «pitch» lors de la 6e édition du Hub Africa tenue les 2 et 3 mai à Casablanca (Maroc), qui lui a décerné le prix du Meilleur jeune entrepreneur africain. La distinction lui a valu les félicitations du président Macky Sall à travers un tweet. Pour cet étudiant en multimédia et communication digitale, difficile de rêver meilleurs débuts en entrepreneuriat.

Contrairement à beaucoup d’étudiants de son âge, il veut rester au Sénégal «parce qu’on ne peut pas vouloir créer la nouvelle technologie africaine et aller la développer en Chine ou en France, soutient-il. C’est ici qu’il y a beaucoup de problèmes, qui sont autant d’opportunités, et mon travail est de contribuer à les résoudre». Pour cela, le chemin est tout trouvé : l’intelligence artificielle, la mère des batailles du monde de demain.

Pour Alioune B. Mbengue, l’Afrique, sans le savoir, a un atout considérable à faire valoir dans le domaine de l’IA, particulièrement l’assistance vocale. «L’Afrique est la terre de l’oralité, et ce rapport avec la technologie que nous offre l’IA, nous ne l’avions jamais rencontré. Avant, pour utiliser la technologie, il fallait pouvoir lire, manier des touches, aujourd’hui avec l’assistance vocale n’importe qui peut utiliser n’importe quelle technologie ; c’est une formidable opportunité pour démocratiser la technologie en Afrique», analyse-t-il.

Pour l’avoir compris, Alioune Badara Mbengue travaille déjà, en plus de «Mb@l-IT», sur un autre gros projet basé sur l’intelligence artificielle auquel il entend consacrer les prochaines années. Il veut créer tout un écosystème d’objets connectés qui pourront fonctionner à partir de l’IA. 

Écrit par
African Business french

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