Adama Kanazoé, conseiller spécial du chef de l’État : au cœur au pouvoir
Nommé en septembre 2016 conseiller spécial du chef de l’État burkinabé, chargé de la promotion du secteur privé et des objectifs de développement durable, Adama Kanazoé doit piloter divers partenariats public-privé.
Ouagadougou, Tiego Tiemtoré
Entre deux appels, un rendez-vous et le parrainage d’une activité sur l’entrepreneuriat des jeunes, Adama Kanazoé n’a pas une minute à perdre.
Candidat malheureux à la dernière présidentielle de 2015, le jeune leader politique, président fondateur de l’Alliance des jeunes pour l’indépendance et la République (AJIR), fait désormais ses classes au coeur du pouvoir.
À 38 ans, ce communicant de formation, très écouté par le chef de l’État, a côtoyé le gotha des hommes d’affaires du Burkina Faso dans leur cadre professionnel.
À son poste, il suit le Plan national de développement économique et social (PNDES), le référentiel de développement pour la période 2016-2020.
ENCADRE: : Le temps des PPP
En 2014, le Burkina Faso fixait à près de 3 300 milliards de F.CFA (plus de 5 milliards d’euros), les montants à injecter dans son Programme de partenariat public-privé. Le PNDES rédigé fin 2016 totalise 51 projets d’investissements à financer sous la forme de PPP, sur les 350 projets définis pour le pays à l’horizon 2020. Il s’agit, entre autres, de la reconstruction de postes de péage sur l’ensemble du réseau routier (38 milliards de F.CFA), du bitumage de 220 km de voirie urbaine dans 40 villes (144,8 milliards de F.CFA), de la réalisation du Backbone national de télécommunication (129 milliards de F.CFA), de la construction de 40 000 logements sociaux et économiques (479,8 milliards de F.CFA), de l’installation d’une unité de montage de matériels solaires (70,1 milliards de F.CFA), du développement de la mécanisation agricole et du soutien au secteur hydraulique (249,1 milliards de F.CFA), de la création d’une centrale d’approvisionnement en intrants et matériels agricoles (263,5 milliards de F.CFA)… Le gouvernement burkinabé s’est engagé à promouvoir les PPP pour attirer les investisseurs et donner un coup d’accélérateur aux investissements étrangers.
Adama Kanazoé ne veut pas se cantonner au secteur privé et souhaite jouer un rôle dans l’animation de la vie politique.
Quand survient l’insurrection populaire d’octobre 2014, il affûte ses armes dans la discrétion, pour tâter le terrain. Avec des amis, il lance l’AJIR dont il devient le président.
Après l’élection de 2015, il rejoint l’Alliance des partis et formations politiques de la majorité présidentielle (APMP).
Séduire les investisseurs privés
Apprécié pour « ses analyses pertinentes et sa force de propositions », il sert d’interface avec les investisseurs internationaux.
Ses prérogatives consistent à suggérer au chef de l’État, Roch Marc Kaboré, « des idées allant dans le sens de la politique globale qu’il a définie, notamment dans le secteur privé », et s’assurer que « les objectifs de développement durable sont pris en compte ».
À ses détracteurs qui pensent que cette nomination est un frein à ses ambitions politiques et ne lui permet plus d’être critique, il répond que l’objectif, à travers cette nomination, est « d’envoyer un signal fort sur son engagement pour la promotion du développement. Le secteur privé doit être le moteur de la croissance économique, ce d’autant que l’État ne peut pas tout faire».
Aussi, considère-t-il sa promotion comme « un signal fort envoyé à l’ensemble de la jeunesse. C’est un appel qui montre à la jeunesse qu’elle a un rôle fondamental à jouer ». Quid de son parti ? « Il y a la vie du parti politique que je dirige. Il n’y a pas de mélange de genres. Ce sont deux perspectives différentes », tient-il à assurer.
Son rôle de conseiller spécial est « apolitique car il s’agit d’apporter des idées et contribuer au développement du pays, pour tous les Burkinabè ». Bien entendu, il sait pertinemment que sa fonction l’expose et le rend comptable de l’action du Président, à l’heure du bilan.
Des ambitions intactes
Le PNDES vise l’émergence d’une économie moderne, basée sur un secteur économique plus compétitif et des industries de transformation et de services plus dynamiques, visant une croissance moyenne de 7,7 %, créatrice d’au moins 50 000 emplois par an.
Comment y parvenir sans une réelle implication des privés locaux et des investisseurs étrangers ? Dans ce contexte, Adama Kanazoé doit renforcer la participation du secteur privé national et international, en vue d’investissements productifs, convaincu que « sans investissement, il n’y a pas de création de richesses ».
L’autre combat d’Adama Kanazoé, en collaboration avec la Chambre de commerce et l’Agence pour la promotion des investissements, sera de conduire la réflexion sur les axes d’amélioration du climat des affaires et des réformes sur les infrastructures de télécommunication et la réduction des coûts des facteurs de production.
« De par sa proximité avec le chef de l’État, il peut faire de l’ombre à certains et en pâtir, du fait de la lutte des clans au sein du pouvoir actuel », observe un analyste politique. Adama Kanazoé est convaincu que le poste de conseiller du Prince peut être un tremplin pour ses ambitions.