Cameroun : Bolloré se repositionne au port de Douala

L’attribution de la concession du terminal à containers du port de Douala au suisse TIL a été suspendue par le président Paul Biya. Bolloré, l’actuel concessionnaire, est désormais en lice pour un nouveau bail. Enjeux d’un port qui représente 95 % des échanges du Cameroun.
Douala, Frédéric Nonos
Nouveau rebondissement dans la concession du terminal à containers du Port autonome de Douala, le PAD. Après l’attribution, le 16 septembre 2019, au groupe suisse TIL (Terminal Investment Limited), l’opération a été suspendue quelques semaines plus tard.
« D’ordre de Monsieur le président de la République, j’ai l’honneur de vous demander de bien vouloir suspendre les travaux de finalisation des termes du contrat de concession ensemble ses annexes, avec TIL […] en attendant les conclusions définitives de l’affaire APM Terminals BV et Bolloré S.A contre PAD, pendante au tribunal administratif du Littoral à Douala et portant sur la requête aux fins de sursis à l’exécution de la décision du 8 janvier 2019. »
On peut s’attendre à de meilleurs résultats du PAD qui entend accroître ses capacités d’accueil aux navires. Avec notamment la construction d’un deuxième terminal à conteneurs de 750 mètres linéaires et la construction d’un ouvrage d’appontement pour navires pétroliers.
Telle est la correspondance adressée le 23 octobre 2019 par le secrétaire général de la présidence de la République, Ferdinand Ngoh Ngoh, au directeur général du PAD, Cyrus Ngo’o. La décision de Paul Biya répond favorablement à la requête de Groupe Bolloré, qui l’a sollicité dans une lettre du 12 septembre dernier, afin de défendre ses droits.
Évincé du processus de sélection, Bolloré conteste son exclusion depuis janvier et a introduit une requête au tribunal administratif de Douala aux fins de surseoir à la désignation d’un nouveau concessionnaire. En vain.
Pourtant, le contrat de Douala International Terminal (DIT), filiale camerounaise du groupe français et actuel concessionnaire du terminal depuis 2005, échoit en décembre 2019. Et le logisticien français ne veut pas perdre une place privilégiée sur le plus grand port conventionnel d’Afrique centrale.
« Nous avons été éliminés en phase de préqualification alors que nous disposons d’une solidité financière et l’expérience. Le groupement Bolloré-APMT, ce sont 80 terminaux dans le monde et plus de 33 milliards d’euros de capitalisation boursière. Que nous soyons éliminés à ce niveau au vu des concurrents qui étaient sur la liste est totalement incompréhensible », fulmine Mohammed Abdoulaye Diop, directeur régional Golfe de Guinée de Bolloré Transports Logistics.
Batailles de concession
Il ajoute, pour s’étonner de l’oubli, qu’un protocole d’accord prorogeant de quatre ans (jusqu’en 2023) la concession du terminal à DIT avait été signé, fin 2017, avec la PAD.
Ce protocole, précise-t-il, prévoyait le versement à la partie camerounaise d’une « contribution exceptionnelle » de 24 milliards de F.CFA (36,6 millions d’euros) ; l’augmentation des actifs des nationaux dans le capital de DIT, pour les faire passer de 10 % à 30 % ; le doublement par DIT de la redevance à verser au Cameroun pour la concession du terminal ; puis la réalisation des investissements supplémentaires à hauteur de 20 milliards de F.CFA (30,5 millions d’euros).
« Il ne s’agit pas d’une éviction. Bolloré- APMT a pris part librement à la compétition et n’a tout simplement pas été admis parmi les cinq premiers, après examen et évaluation des candidats classés selon des critères rigoureux par la commission interne ad hoc de passation de la concession », expliquait Cyrus Ngo’o, directeur général du PAD, en septembre.