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Société

Togo : L’indispensable réforme du foncier

  • Publiénovembre 25, 2017

Pour accélérer les mutations économiques du Togo, l’État réorganise la législation foncière. Un processus lent, face aux besoins de la population et les exigences économiques.

Lomé, Edem Gadegbeku

Face à la désuétude de la légis­lation du Togo, les problèmes fonciers sont à l’origine d’une pléiade de procès interminables entre les collectivités ou les familles. « De plus en plus, nous faisons face à un dualisme dans l’interprétation de la législation relative au mal foncier (cohabitation des traditions – us et coutumes — et de la loi moderne) », s’alarme un juge. En 2016, le foncier occupait 8 869 cas (76 %) des 12 483 contentieux, selon le Tribunal de Lomé.

Des différends qui se justifient en partie par le fait que « les zones approuvées pour les ventes foncières ne sont pas connues de la majorité de la population, quand bien même elles sont disponibles auprès des collectivités territoriales », décrit Issa Tchanile, du ministère de l’Urbanisme. Cette cacophonie permanente décou­rage plus d’un à se lancer dans l’acqui­sition de terrains, dans un pays où la terre appartient aux privés – collectivités familiales ou des personnes physiques – et non à l’État, comme c’est le cas chez les voisins d’Afrique de l’Ouest.

Sans compter une organisation à revoir : « Des centaines d’auxiliaires exercent illégalement notre profession, au fil du temps, ils ont réussi à voler la vedette aux officiels agréés. L’exercice de la profession de géomètre est ainsi resté entre les mains d’hommes d’affaires qui financent et font exécuter les travaux fonciers avec l’appui technique des non-agréés », dénonce Dominique Lougoui, président de l’Ordre des géomètres.

Depuis cinq ans, des efforts concer­tés entre le gouvernement et divers acteurs de la société civile sont en oeuvre. Ils consistent en un vaste projet de réforme du Code foncier, via une approche participative. Ces efforts se sont accélérés essentiellement ces der­niers mois parce que la sécurisation fon­cière est l’un des critères phares auxquels le Togo doit satisfaire pour bénéficier de l’important appui financier du MCC (Millenium Challenge Corporation).

Une mue accélérée

« C’est dans cette perspective que le gouvernement a entrepris l’élaboration d’un nouvel avant-projet du Code foncier qui a fait l’objet de plusieurs ateliers régio­naux et nationaux. La volonté politique de résoudre ce problème existe ; il nous faut dès lors de nouveaux instruments juridiques », rassure Fiatouwo Sessenou, ministre en charge de l’Urbanisme et de l’habitat.

L’une des finalités de cette volonté gouvernementale est également de faire du transfert de propriété foncière l’un des indicateurs de taille dans l’améliora­tion du climat des affaires.

« Il faut alors dorénavant un seul système de référencement des terrains pour réduire les litiges y relatifs. Nous sommes à la 4e génération des titres fon­ciers. L’adoption et la validation en cours d’un avant-projet sur le foncier au Togo devraient accélérer la mue attendue », complète le cartographe Koffi Dackey. « Le temps presse et l’heure doit être aux actes et non aux promesses. Malgré les mul­tiples assurances et les garanties fournies par les autorités, les changements annoncés sont très peu perceptibles sur le terrain », s’impatiente Kodjo Akou, néo-acqué­reur de parcelles en zone péri-urbaine à Lomé. Ce dernier, tout comme un grand nombre de Togolais, juge « encore trop longue, tatillonne la procédure de sécurisation de tout terrain payé », deux ans environ, sans oublier la lenteur du processus judiciaire, en cas de litige.

« Il faut dorénavant exiger le titre fon­cier lors de l’achat de tout terrain ! C’est à juste titre que le Code foncier retouché accorde un pouvoir plus important aux chefs traditionnels dans le règlement des litiges. Les différends autour des terrains vont diminuer avec cette législation nais­sante, mais ce nouvel outil juridique ne va pas gommer définitivement les différends dans ce secteur. L’État devra alors passer nécessairement aux mesures punitives à partir de cet instant », concède Fiatouwo Sessenou.

L’adoption d’un nouveau Code foncier constituerait ainsi une étape très importante dans l’amélioration de la productivité agricole et la sécurisation des terres. Dans un pays dont la popu­lation est occupée à 70 % par l’agricul­ture, cette nouvelle organisation et régle­mentation du monde foncier devront apporter une plus-value à la création de la richesse. En attendant le vote du nouveau Code foncier par le Parlement, son avant-projet est passé en Conseil des ministres le 22 juin 2017 pour une pre­mière lecture.

D’autre part, l’automatisation de la délivrance du permis de construire au Togo est effective depuis octobre 2017. Cette délivrance était autrefois régie par un décret datant de 1967, coûtant 300 000 F.CFA (457,30 euros) pour huit mois de processus de délivrance. De nos jours, il coûte 30 000 F.CFA et dure 30 jours. « Bientôt, les actes de vente régis par le nouveau code fon­cier seront établis uniquement par les notaires et nous allons ainsi éviter les réseaux mafieux qui empoisonnent la vie des Togolais. »

Il est prévu un fonds de garantie lorsque l’État aura commis une erreur dans l’établissement des titres fonciers, afin qu’il ait réparation en faveur des vic­times », conclut le ministre Sessenou.

Écrit par
ade

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