La Tunisie lutte contre la violence en ligne

Durant un mois, une campagne d’information et de sensibilisation va informer les Tunisiens sur l’importance de la violence en ligne. Beaucoup des femmes qui en sont victimes ne connaissent pas leurs droits et ne portent pas plainte.
Par Paule Fax
« La violence digitale est un crime. #Même ici, il sera poursuivi. » Tel est le slogan du Centre de recherches, d’études, de documentations et d’information sur la femme de Tunisie. Le Credif avait réalisé, fin 2019, une grande enquête sur les violences faites aux femmes, notamment sur les réseaux sociaux.
Aujourd’hui, le Centre lance une campagne de sensibilisation sur ce thème, en partenariat avec le Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA Tunisie). Cette campagne d’un mois, qui s’achèvera le 20 novembre 2020, entre dans le cadre du Programme tunisien de promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes, « Moussawat ».
Chaque victime peut imprimer des captures d’écran, les montrer un huissier de justice pour attester la véracité des faits et déposer plainte près de l’unité spéciale d’investigation dans les crimes perpétrés contre les femmes.
La campagne vise à informer et vulgariser autour des types de violences sur les réseaux sociaux. Elle entend sensibiliser les citoyens, notamment les jeunes, des répercussions psychologiques de la violence sur les victimes et des risques juridiques.
Le Credif souhaite inciter les femmes victimes de violence sur les réseaux sociaux à briser le silence et les encourager à porter plainte. Et à impliquer tous les acteurs dans la lutte contre ce fléau : médias, société civile, personnages publics…
L’étude publiée en 2019 s’intitule : « La violence contre les femmes sur les réseaux sociaux : Facebook comme étant un cas ». Elle montrait que la violence contre les femmes sur ce réseau social, plus particulièrement, est devenue un fléau qui menace la plupart d’entre elles.
En effet, 89% des femmes ont déclaré avoir déjà subi une violence verbale, sexuelle ou psychologique sur Facebook. Et pourtant, 95% d’entre elles ne portent pas plainte.
Un an après, la directrice générale du Credif, Najla Allani Bouhoula, confirme : quatre femmes sur cinq ont subi cette sorte de violence au moins une fois dans leur vie.
Si la quasi-totalité des femmes victimes de violences digitales ne portent pas plainte et ne recourent pas à la justice, c’est qu’elles craignent la perception de la société ou parce qu’elles ne savent pas que des textes de loi les protègent. Ou plus simplement, parce qu’elles ne connaissent pas la définition de la violence numérique.
Une peur constante
Forte de ce constat, Najla Allani Bouhoula réaffirme que la violence numérique est toute atteinte ou menace de d’agression physique, morale, sexuelle ou économique, perpétrée via les réseaux sociaux, à cause d’une discrimination due au genre.
La directrice générale du Credif constate que la violence numérique est très répandue chez les jeunes : 49% de ceux qui commettent ces délits sont des hommes âgés entre 25 et 45 ans.
Un chiffre guère surprenant vu que les jeunes sont les grands utilisateurs des réseaux sociaux. Pour autant, impossible de dénier que la violence a des répercussions importantes sur l’état psychologique des victimes : 78% des victimes vivent dans une peur constante et dans un état dépressif.