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Société

L’accès à l’eau, un droit de l’homme

L’accès à l’eau, un droit de l’homme
  • Publiéfévrier 14, 2023

Le Conseil marocain des droits de l’homme publie un mémorandum sur l’accès à l’eau et le droit des générations futures. Une préoccupation visiblement partagée par le gouvernement marocain, dont le plan de long terme reçoit un coup de pouce de la BAD.

 

Gouvernement, bailleurs de fonds, acteurs de la société civile, tout le monde s’accorde : la situation hydrique du Maroc est préoccupante, tant pour les mois à venir qu’à horizon de la deuxième moitié du siècle. Le gouvernement entend accélérer son plan d’investissements 2022-2027 ; la BAD (Banque africaine de développement) lui apporte son soutien technique ; le Conseil national des droits de l’homme (CNDH) publie un nouveau mémorandum, formulant quelques recommandations pour pérenniser « le droit à l’eau ».

Le Plan du Maroc comprend une série d’investissements, comme la construction ou la surélévation de grands barrages, la construction de petits barrages pour soutenir le développement local. Et l’offre de ressources en eau non conventionnelles, comme le dessalement de l’eau de mer.

Le CNDH préconise une rationalisation de l’usage de l’eau à court terme, et de faire de la sécurité alimentaire et du droit aux générations futures à la richesse hydrique des priorités de l’action gouvernementale.

Ce, « en adoptant des politiques durables de l’eau et en développant une filière agricole et industrielle moins consommatrice d’eau et orientée vers la satisfaction de la demande interne », explique Amina Bouayach (photo ci-contre), présidente du CNDH.  « Il est urgent de soutenir et de développer des filières agricoles capables de s’adapter aux années de sécheresse, ainsi que des filières économiques moins consommatrices d’eau. » Le CNDH appelle à mettre fin à certaines cultures, à encourager la Recherche & Développement, et à investir davantage dans le dessalement de l’eau de mer.

Des priorités peu ou prou partagées par le gouvernement marocain et par ses partenaires. Début février, le Royaume s’est d’ailleurs rapproché sur ces questions de son « voisin » espagnol, qui partage des préoccupations similaires. Le Maroc a également signé, à la mi-janvier, un mémorandum d’entente avec le Sénégal sur ces questions d’assainissement et d’accès au service public de l’eau. Les deux pays partageront leurs expertises et renforceront leur coopération autour de l’assainissement à travers la gestion des déchets solides, la réduction de la défécation en plein air et le traitement des eaux usées. Le Maroc bénéficiera également de l’expertise des Israéliens, qui n’est plus à démontrer.

Le barrage d'Abdelmoumen, vers Agadir, en octobre 2020.   (photo : AFP)
Le barrage d’Abdelmoumen, vers Agadir, en octobre 2020 (photo : AFP)

 

De son côté, le Plan national de l’eau et le Programme national d’alimentation en eau potable et d’irrigation 2022-2027 prévoit un budget de 115 milliards de dirhams (10,5 milliards d’euros). La construction de nouveaux barrages, leurs interconnexions, devient impératif face aux dangers permanents de sécheresse. Sans oublier les investissements dans l’innovation, notamment du côté du dessalement d’eau de mer. Douze projets sont en cours, qui viennent compléter les quatre usines mises en service ces trois dernières années.

 

Risque de « rareté extrême »

Dans le traitement des eaux usées, les unités doubleront pour passer de 25 millions de m3 actuellement à 100 millions de m3, au niveau de nombreuses villes, promet le ministère de l’Équipement. Qui travaille avec les secteurs concernés pour adopter des solutions de long terme. Le ministère insiste sur l’importance des petits barrages et des retenues collinaires ; ils ont un rôle essentiel dans l’apport d’eau d’irrigation et la protection contre les inondations dans le monde rural. Le Maroc compterait 135 de ces barrages, alors que 129 nouveaux barrages sont programmés pour la période à venir en partenariat avec les régions, et 150 autres barrages à partir de 2025.

Nécessité fait loi : avec une population de 44 millions d’habitants, les ressources en eau s’approcheraient dangereusement, en 2050, du seuil de 510 m3 par personne et par an, considéré comme étant « la rareté extrême de l’eau ».

Une usine de dessalement inspectée par un technicien du groupe OCP.

 

À court terme, il s’agit surtout pour le Maroc de rationaliser l’existant. C’est ce qu’a confirmé récemment, devant les parlementaires le ministre de l’Équipement, Nizar Baraka (photo ci-contre). Malgré une pluviométrie en hausse, le taux de remplissage des barrages reste très faible, dans certaines régions. Certes, à l’échelle du pays, la situation hydrique s’améliore.

Le volume global des ressources, de l’ordre de 2,1 milliards de mètres cubes, est trois fois plus élevé qu’il y a un an. Et un enneigement supérieur de 30 % à celui de 2022 permettra de nourrir quelques réserves. Néanmoins, la situation est préoccupante dans certaines régions, par exemple dans le sud du pays. On vient d’y interdire la production de pastèques, un fruit particulièrement gourmant en eau. L’un des produits, avec l’avocat par exemple, dont le CNDH demande la limitation, si ce n’est l’arrêt, de la production au Maroc.

Pour sa part, la BAD dresse le même constat : le climat semi-aride du pays rend le pays sujet aux aléas climatiques ; une alternance d’années humides et plus sèches. Le stress hydrique s’accentue et les réserves en eau sont sous forte pression. Le taux de remplissage des barrages se situait à moins de 27 % en août 2022, contre plus de 42 % un an plus tôt. En février 2023, certains barrages enregistrent un remplissage de 55%, certains de moins de 20% Le pays connaît une récurrence des périodes de sécheresse aiguë.

 

Appui technique

Dans cette perspective, le Programme national pour l’approvisionnement en eau potable et l’irrigation 2020-2027 entend accélérer les investissements, pour anticiper les difficultés d’approvisionnement en eau potable enregistrées notamment dans les bassins hydrauliques les plus affectés par le déficit hydrique dû à la sécheresse de 2015-2018.

Il comprend une série d’investissements, donc, comme la construction ou la surélévation de grands barrages, la construction de petits barrages pour soutenir le développement local. Il comprend le développement de l’offre de ressources en eau non conventionnelles, avec le dessalement de l’eau de mer notamment. À ces ressources, il faut ajouter le renforcement de l’accès à l’eau potable en milieu rural, la sécurisation et le renforcement de l’approvisionnement en milieu urbain, l’amélioration des rendements des installations et une plus grande autonomie de la réserve d’eau potable.

Des installations hydriques à Khenifra.
Des installations hydriques à Khenifra.

 

Le tout, en encourageant une gestion raisonnée des ressources et en préservant la qualité de l’eau et la réutilisation des eaux usées épurées. Ce programme reçoit aujourd’hui le coup de pouce de la BAD qui apporte son assistance technique, pour un montant de 201 000 euros.

Le don « a pour objectif d’offrir au gouvernement du Maroc une assistance technique pour les études de conception de barrages, d’aménagements des cours d’eau et des études d’interconnexion entre bassins hydrauliques », explique la BAD. Cette assistance est destinée à la Direction des aménagements hydrauliques du ministère de l’Équipement et de l’Eau.

Des Marocains inquiets de l’assèchement de la Moulouya (photo : AFP)
Des Marocains inquiets de l’assèchement de la Moulouya (photo: AFP)

 

@NA

 

Écrit par
Aude Darc

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