Espoirs et inquiétudes de la Jeunesse

Tandis que l’étude de 2020 de la Fondation Ichikowitz faisait état d’une vague d’afro-optimisme, les jeunes Africains montrent cette année moins de confiance dans l’avenir de leur continent et de leurs pays. Pourtant, ils restent sereins quant à leur propre destin.
Selon l’African Youth Survey, étude conduite par la Fondation Ichikowitz, la perception des jeunes Africains selon laquelle l’Afrique est « sur la bonne voie » a diminué, passant de 40 % en 2020 à 31 % aujourd’hui. S’ils peuvent exprimer également des inquiétudes quant à leur propre pays, ils restent confiants pour leur propre destinée, le chômage restant une préoccupation majeure.
Les plus susceptibles de dire que l’Afrique va dans la bonne direction sont à chercher du côté du Ghana (57 %), du Mozambique (49 %) et du Rwanda (45 %). Tandis que les plus susceptibles de dire que l’Afrique va dans la mauvaise direction se trouvent au Nigeria (75 %), en Zambie (70 %) et au Malawi (69 %).
L’impact du changement climatique sur le continent a déjà été profond, et quatre jeunes sur dix considèrent que le changement climatique leur sera personnellement très préjudiciable, un autre quart (27 %) affirmant qu’il le sera moyennement.
Évoquant leur propre pays, seulement un sur quatre (27 %) affirme qu’il est sur la bonne voie aujourd’hui, contre 38 % en 2020. Le Kenya (-33 points) et le Rwanda (-34 points) ont enregistré les plus fortes baisses d’optimisme des jeunes quant à l’orientation de leur pays. Néanmoins, le Rwanda (60 %) et le Ghana (56 %) restent les pays dans lesquels les jeunes sont les plus susceptibles de dire que le pays est sur la bonne voie.
« L’optimisme a diminué, mais jeunes Africains restent optimistes quant à leur avenir personnel et se projettent dans un siècle africain », commentent les auteurs de l’étude. Qui attribuent le déclin de l’afro-optimisme à la pandémie mondiale de Covid-19, qui continue de causer des défis socio-économiques sans précédent pour le continent et le monde et qui a un impact sur la vie quotidienne des jeunes Africains.
Parmi les principaux facteurs de ce moindre afro-optimisme, l’instabilité politique, en particulier dans les pays touchés par des conflits, des guerres civiles et l’extrémisme violent ces dernières années. L’instabilité politique est perçue comme le deuxième événement ou développement le plus marquant pour le continent au cours des cinq dernières années.
L’instabilité politique inquiète
Les seules exceptions sont le Ghana, où les jeunes déclarent que l’accès accru aux services sociaux est à égalité avec les décès dus aux maladies infectieuses, et l’Afrique du Sud et le Congo Brazzaville, où la révolution technologique & numérique est considérée comme le deuxième événement le plus marquant de la dernière décennie.
Plus de deux jeunes Éthiopiens sur cinq (41 %) déclarent que l’instabilité politique a eu le plus grand impact au cours des cinq dernières années, et environ un jeune sur cinq au Nigeria (27 %) et au Soudan (22 %) exprime la même chose. Trois quarts des jeunes Africains sont « préoccupés » par l’impact de l’instabilité politique sur le continent, dont la moitié se disent « très préoccupés ».
Ce sentiment est le plus fort en Éthiopie, où neuf jeunes sur dix se disent inquiets, suivie du Kenya (84 %), du Ghana (83 %), du Nigeria (82 %), de la Zambie (82 %) et du Mozambique (81 %), où plus de quatre jeunes sur cinq sont préoccupés par l’instabilité politique.
Malgré tout, les jeunes Africains conservent un fort sentiment d’optimisme quant à leur avenir personnel. Trois quarts d’entre eux estiment que leur niveau de vie s’améliorera au cours des deux prochaines années, et deux tiers jugent qu’ils auront une vie meilleure que celle de leurs parents. Cet écart exprime quelques doutes à long terme.
Sans surprise, la création d’emplois est la priorité absolue des jeunes. « Pour que le continent africain progresse et aille de l’avant, les jeunes jugent que la priorité devrait être la création de nouveaux emplois bien rémunérés, suivie de la réduction de la corruption gouvernementale », résument les enquêteurs. La création de nouveaux emplois bien rémunérés a augmenté depuis l’enquête 2020, prenant la place de « priorité absolue » à la réduction de la corruption gouvernementale.
De légitimes préoccupations environnementales
À cela, une explication, le regain de chômage due à la crise sanitaire. Dans ce contexte, les travailleurs informels représentent 95 % de l’emploi des jeunes. Ceux du Kenya (41 %) et du Mozambique (41 %) sont les plus susceptibles de donner la priorité à la création de nouveaux emplois bien rémunérés. En Éthiopie, au Gabon et au Soudan, les jeunes ont une perspective légèrement différente. Par exemple, les jeunes Gabonais considèrent que la priorité du continent devrait être d’accorder davantage de libertés individuelles aux citoyens (20 %).
À lire, le compte rendu d’Anver Versi sur le contexte et la méthodologie de l’enquête 2022 sur la jeunesse africaine : https://magazinedelafrique.com/?p=68550
L’environnement demeure un sujet de préoccupation majeur pour les jeunes Africains ; près des trois quarts d’entre eux se disant préoccupés par le changement climatique. Au Malawi (88 %), au Kenya (85 %) et au Ghana (83 %), plus de huit jeunes sur dix s’inquiètent du changement climatique, tandis que les jeunes du Gabon (44 %), d’Afrique du Sud (60 %) et du Soudan (64 %) sont les moins susceptibles d’être concernés. « Les jeunes Africains prennent sur eux de vivre de manière plus durable, et ils veulent que leurs dirigeants fassent preuve du même engagement envers l’environnement. » Moins de la moitié des jeunes du continent sont actuellement satisfaits de la façon dont leur gouvernement gère le changement climatique, le taux de satisfaction allant de 81 % au Rwanda à un peu moins d’un sur trois en Afrique du Sud.
L’impact du changement climatique sur le continent a déjà été profond, et quatre jeunes sur dix considèrent que le changement climatique leur sera personnellement très préjudiciable, un autre quart (27 %) affirmant qu’il le sera moyennement. Seulement un jeune sur dix indique ne pas s’attendre à ce que le changement climatique lui nuise. Les jeunes sont également préoccupés par l’impact plus large du changement climatique sur la population de leur pays et sur les générations futures. De plus, la moitié des jeunes affirme que le changement climatique nuira beaucoup aux générations futures, les jeunes faisant écho aux études menées par le GIEC, notamment.
Les jeunes Africains sont préoccupés par toute une série de problèmes environnementaux, notamment les phénomènes météorologiques extrêmes, la pollution et les dommages environnementaux. « Les trois quarts des jeunes Africains sont préoccupés par l’augmentation de la pollution de l’air, de l’eau et du sol, ainsi que par la fréquence et la gravité accrues des phénomènes environnementaux extrêmes tels que les inondations, la sécheresse et les vagues de chaleur. »
@NA