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Politique

Un début de campagne tendu, en RD Congo

Un début de campagne tendu, en RD Congo
  • Publiéoctobre 10, 2023

Accusations, anathèmes et procès d’intention marquent le début de la campagne électorale en RD Congo, tandis que le dernier candidat à avoir déposé sa candidature n’est autre que le président Félix Tshisekedi.

 

Ce n’est bien entendu en rien une surprise : Félix Tshisekedi, 60 ans, est candidat à sa succession. Le président de Côte d’Ivoire, élu dans des conditions contestées en décembre 2018, a déposé son dossier le 7 octobre 2023 à la Céni, la Commission électorale indépendante. Au dernier moment, donc. Le président congolais briguera un deuxième mandat lors de la présidentielle prévue le 20 décembre prochain. Il devient donc le seizième à se lancer dans la course à la présidentielle.

Sur les réseaux sociaux, des militants pro-Tshisekedi ne cessent d’accuser Denis Mukwege de vouloir « promouvoir l’homosexualité » et d’être le chouchou des capitales occidentales.

Sa campagne a commencé d’une manière dont il se serait bien passé, après la diffusion d’une vidéo de l’ancien chef de la police du temps de Kabila, John Numbi Tambo Banza, jusqu’en 2010. L’homme s’est livré à une attaque en règle du Président, qu’il qualifie d’« inconscient qui joue avec le feu dans une poudrière ». Il appelle les Congolais à mettre fin aux fonctions de celui qu’il qualifie d’aventurier, dénonçant au passage, sans trop étayer ses propos, un « régime de corruption ».

Plus concrètement, John Numbi Tambo Banza reproche à Félix Tshisekedi d’avoir rompu l’accord avec Joseph Kabila, qui lui avait permis d’être déclaré vainqueur de l’élection de décembre 2018. Plus grave, l’ancien policier a appelé directement les forces de l’ordre de ne plus obéir au pouvoir, menaçant une démarche de destitution en cas de réélection. Poursuivi pour association de malfaiteurs et assassinats, John Numbi Tambo Banza est exilé au Zimbabwe depuis 2020.

Cette sortie fait suite à des propos tenus par le président du Congo le mois dernier, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies. Félix Tshisekedi y a déclaré que plusieurs politiciens du clan Kabila avaient voulu lui disputer sa victoire, en 2018. Propos qui ont surpris jusque dans son propre camp, car le Président a rallumé soudainement la polémique qui a suivi son élection contestée.

 

« Candidat de l’étranger » contre « populiste »

S’il n’a pas réagi en personne, le président candidat a laissé parler ses proches. Le secrétaire général de l’UDPS (Union pour la démocratie et le progrès social), Agustin Kabuya, a déclaré que John Numbi n’« a pas dit la vérité ». Il juge que ce dernier voulait se faire « enfant chéri » du chef de l’État en semant le trouble au sein de l’armée, dénonçant certains généraux. Manœuvre à laquelle le Président n’a pas adhéré. « C’est à partir de là que sa rage contre les institutions s’est manifestée. »

De son côté, Félix Tshisekedi réserve ses piques à ses adversaires déclarés à la course présidentielles. Et préfère expliquer son programme, axé sur « les grandes réformes démocratiques », selon son entourage. Lequel demande aux Congolais d’assurer « une majorité confortable » au président sortant, lors de l’élection législative couplée avec la présidentielle. Le camp du Président entend promouvoir l’« indépendance économique » de la RD Congo, ce dont seraient incapables ses principaux adversaires.

Le candidat Tshisekedi a bien vite choisi ses adversaires préférés : Moïse Katumbi et Denis Mukwege.

Il a reproché au premier sa mauvaise gestion, notamment dans le dossier de la Société nationale de chemin de fer congolais (SNCC). À l’entendre, son équipe a permis à la SNCC de briller et de faire rouler des trains « comme en Europe » au Katanga, ce dont a été incapable l’ancien gouverneur du Katanga, accusé d’avoir créé des sociétés privées concurrentes.

Les piques contre Denis Mukwege relèvent davantage de l’ironie facile, voire du procès d’intention. Plaisantant au sujet de « l’homme qui répare les femmes », surnom du Prix Nobel, Félix Tshisekedi a indiqué que la RD Congo n’est pas un véhicule ou un organe du corps humain. Évoquant la question du genre, le Président a aussi accusé son adversaire de vouloir introduire en RD Congo des concepts qui ne correspondent pas à la culture du pays. Et Denis Mukwege qualifié de « candidat de l’étranger », parmi d’autres, semble-t-il.

Au cours d’un entretien à la presse Denis Mukwege (photo ci-contre) a qualifié les remarques de Félix Tshisekedi de « malheureuses » et de « populistes », les jugeant peu constructives pour la construction d’une nation cohésive. Il est vrai que sur les réseaux sociaux, des militants pro-Tshisekedi ne cessent d’accuser Denis Mukwege de vouloir « promouvoir l’homosexualité » et d’être le chouchou des capitales occidentales.

Réponse du médecin candidat : « Je suis au Congo depuis 40 ans aux côtés de la population congolaise. J’ai construit des écoles en fabriquant des briques avec cette population, j’ai été cherché de l’eau à la rivière pour construire des centres de santé avec eux. Nous avons traversé toutes les difficultés ensemble, nous avons cultivé ensemble, j’ai appris à cultiver des poules et des chèvres avec eux pour subvenir à leurs besoins en santé. » Denis Mukwege a également ironisé sur certains candidats qui le qualifient d’homme de l’étranger et qui n’« ont même pas d’adresse physique en RD Congo ».

@NA

Écrit par
Laurent Allais

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