Le parcours d’obstacles de Moïse Katumbi

La liste des candidats à l’élection présidentielle, prévue en décembre 2017 en RD Congo, ne cesse de s’allonger. Les jeux paraissent ouverts malgré l’incertitude concernant le sort réservé à l’opposant Moïse Katumbi.
Par J.J Arthur Malu-Malu
L’un des prétendants qui ont clairement affiché leurs ambitions présidentielles suscite un vif intérêt du public et de la classe politique congolaise, pour des raisons diverses : Moïse Katumbi, ancien gouverneur de la riche province minière du Katanga, dans le sud-est du pays, et homme d’affaires prospère.
Ce quinquagénaire tire une partie de sa popularité de l’univers du football. Il est, depuis 1997, le président du TP Mazembe, l’un des meilleurs clubs de football du pays et du continent. Ses réalisations à la tête de cette équipe font rêver des amateurs de football qui forment une partie de l’électorat.
Si un grain de sable ne vient pas gripper la mécanique, les électeurs seront appelés aux urnes pour choisir leur prochain président dans quelques mois. Déjà, l’indépendance de la Commission électorale est sujette à caution.
Doté d’une grande force de frappe financière, Moïse Katumbi pourrait aisément faire campagne dans ce vaste pays au réseau routier limité, contrairement à ses concurrents. Néanmoins, rien n’est garanti, car la validation de sa candidature n’est pas acquise et les obstacles se multiplient pour cet ambitieux autodidacte. L’ex-gouverneur est dans le collimateur du camp présidentiel depuis qu’il a décidé de rejoindre l’opposition et d’exiger le respect de la Constitution, dans un contexte où le président Joseph Kabila, dont le second et dernier mandat s’est achevé en décembre 2016, semble recourir à des artifices divers pour rester le plus longtemps possible au pouvoir.
Nouvel écueil
Après avoir longtemps été un pilier du parti présidentiel, le PPRD (Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie), Moïse Katumbi fait figure d’homme à écarter. Son premier cercle est constitué, pour l’essentiel, de dissidents de la majorité présidentielle qui chantent les louanges de l’alternance, alors qu’ils étaient autrefois de fervents défenseurs du chef de l’État qui a remporté deux victoires électorales controversées, sur fond de violences, en 2006 et en 2011. La majorité présidentielle, un regroupement composite de partis et d’organisations de la société civile, se montre déterminée à barrer la route à Moïse Katumbi qui dessine, au travers de ses virulentes interventions médiatiques, le Congo qu’il souhaite faire émerger si les électeurs lui confient les clés du Palais de la nation, le siège de la présidence.
Ainsi, le ministre de la Justice, Alexis Thambwe Mwamba, a déclaré que Moïse Katumbi ne pourrait pas être candidat à la présidentielle en raison de sa « double nationalité ». Un nouvel écueil pour cet homme qui vit en exil depuis mai 2016 ? La Constitution stipule que « la nationalité congolaise est une et exclusive. Elle ne peut être détenue concurremment avec aucune autre ».
Né au Katanga, d’un père originaire de l’île de Rhodes et d’une mère congolaise, ce quinquagénaire détiendrait un passeport zambien et un passeport italien, à en croire le camp présidentiel qui tarde cependant à présenter des preuves irréfutables à l’appui de ses accusations. Ses proches affirment qu’il n’a jamais eu de nationalité étrangère et disent craindre la production, par les officines de la majorité présidentielle, d’une série de faux documents pour enfoncer leur favori.
S’il est toutefois établi que Moïse Katumbi est titulaire d’un passeport étranger, il sera contraint d’enterrer ses ambitions présidentielles, même en s’appuyant sur son collectif d’avocats en RD Congo, conduit par un vieux routier des prétoires, Me Jean-Joseph Mukendi, qui assure ignorer tout de cette affaire.
Un nouveau palier a ainsi été franchi dans la guerre à laquelle se livrent les deux camps par médias interposés. Jusque-là, les partisans de Joseph Kabila attaquaient Moïse Katumbi sur sa gestion et s’en remettaient à la justice qui l’a condamné dans des affaires immobilières. Le procureur général de la République a même indiqué que l’ex-gouverneur serait arrêté et sans doute emprisonné s’il rentrait au pays dans le contexte actuel.