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Politique

Mali : écrasante victoire du  « Oui »

Mali : écrasante victoire du  « Oui »
  • Publiéjuin 26, 2023

Le texte soumis à référendum a été approuvé par 97% des Maliens qui se sont rendus aux urnes, le 18 juin. Tandis que la Minusma est priée de quitter le pays, les militaires s’assurent de ne pas être inquiétés après la Transition, si celle-ci se termine bien en 2024 comme prévu.

 

La victoire est écrasante, mais au fond, change-t-elle quelque chose pour les Maliens ? Selon des résultats provisoires, annoncés durant le week-end, le référendum pour la nouvelle Constitution a obtenu 97% de « Oui ». Un résultat qui a surpris même les opposants à ce scrutin, en grande partie boycotté et qui n’a pas pu se tenir partout dans de bonnes conditions. Les opposants à la junte au pouvoir signalent ainsi que le vote ne s’est pas déroulé dans la région de Kidal.

Selon les groupes armés réunis au sein du Cadre stratégique permanent (CSP) et qui contrôle le nord du Mali, seuls les cercles autour de Gao et Tombouctou, ainsi que la ville de Méneka, ont avoir accès au vote.

Il s’agissait néanmoins de la première consultation nationale depuis le coup d’État d’août 2020 qui a renversé Ibrahim Boubacar Keïta.

Le texte soumis au vote renforce les pouvoirs du Président et prévoit un calendrier pour les prochaines échéances électorales. Surtout, il dégage les dirigeants actuels de toute poursuite judiciaire future. Et ouvre la voie à la candidature de l’actuel homme fort du Mali, Assimi Goïta, aux élections présidentielles prévues pour février 2024. D’autres membres ou partisans de l’équipe au pouvoir pourraient également se lancer.

Peut-on voir dans ce scrutin la « vitrine légale » du maintien des militaires au pouvoir en 2024 ? Certains observateurs franchissent déjà le pas. Ils constatent que le texte fait la part belle à l’idéal de « souveraineté », qui sert de prétexte à la junte pour rompre avec le colon français et à expulser les militaires de la Minusma. La junte qui s’est ouvertement ouverte au nouvel allié russe, dont l’avenir sur le continent est remis en question après la rébellion du groupe Wagner aux portes de Moscou, le 24 juin.

Le scrutin a coïncidé avec la demande de retrait des 11000 Casques bleus et des 1 600 policiers envoyés par les Nations unies depuis dix ans. Cette décision passe d’ailleurs très mal auprès de l’ONU et la situation au Mali, comme celles des autres pays du Sahel (Guinée, Burkina Faso), sera au centre des discussions du prochain Sommet de la CEDEAO, le 9 juillet 2023.

 

Faible participation

Si le secrétaire général de l’ONU, António Guterres a demandé des explications officielles au pouvoir malien, « le maintien de la paix est basé sur le principe de consentement du pays hôte, et, sans ce consentement, les opérations sont presque impossibles », reconnaît El-Ghassim Wane, le chef de la Minusma.
Il n’en reste pas moins, d’après les observateurs, qu’Assimi Goïta est populaire dans le pays, notamment auprès des jeunes.

La participation au référendum du 18 juin 2023 vient tempérer le résultat : 39,4%, a reconnu l’Autorité de gestion des élections (AIGE) chargée de surveiller le déroulement du scrutin. Moustapha Cissé, le président de l’AIGE a pourtant assuré à la presse que « le scrutin référendaire s’est tenu sur l’ensemble du territoire… excepté 1 121 bureaux de vote (sur 24 416) ».

Il est vrai que la participation électorale est traditionnellement faible au Mali, dépassant rarement les 40%. Cela étant, le scrutin, boycotté par différents courants de l’opposition, a été émaillé d’incidents.

L’AIGE n’a pas apporté de nouvelles informations concernant le déroulement du vote dans la région de Kidal. Si celle-ci compte assez peu dans la balance (moins de 1% du corps électoral), son éviction éventuelle du scrutin remet en cause la sincérité de celui-ci et pourrait constituer un motif de recours en annulation. Des groupes armés, pourtant signataires de l’accord de paix en 2015, ont publié un communiqué pour démentir l’AIGE et affirmer que le vote n’avait pas eu lieu à Kidal. Des vidéos montrant le scrutin en train de se dérouler ont circulé sur les réseaux sociaux mais ont vite été dénoncés comme étant des « Fake news ».

Selon les groupes armés réunis au sein du Cadre stratégique permanent (CSP), seuls les cercles autour de Gao et Tombouctou, ainsi que la ville de Méneka, ont avoir accès au vote. Et encore, affirme le CSP, « les urnes y ont été bourrées sans retenue ».

Plusieurs associations de la société civile et partis politiques avaient appelé à boycotter le référendum. Y compris l’influent imam Dicko qui a structuré la Coordination des mouvements, associations et sympathisants (CMAS), structure faîtière de l’opposition. « Les résultats de ce référendum, que les autorités actuelles n’avaient de toute façon pas la légitimité d’organiser, sont vraiment scandaleux », commente Youssouf Daba Diawara, cité par le quotidien Le Monde. Qui constate que « la majorité du peuple malien ne soutient pas le projet de Constitution ».

@NA

 

Écrit par
Laurent Allais

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