x
Close
Politique

Le mystérieux coup d’État en RD Congo

Le mystérieux coup d’État en RD Congo
  • Publiémars 5, 2022

Le gouvernement de RD Congo affirme avoir déjoué une tentative de coup d’État, en février. Cette déclaration cache-t-elle vraiment une tentative pour éliminer l’un de ses opposants, ou indique-t-elle de nouvelles turbulences ?

Par Tom Collins

Y a-t-il eu un complot en République démocratique du Congo, début février 2022 ? Le manque de détails sur l’affirmation du gouvernement conduit à diverses interrogations.

Le gouvernement a déclaré avoir trouvé des « preuves sérieuses » d’une menace à la sécurité nationale après l’arrestation, le 5 février de François Beya, l’une des personnalités les plus influentes du renseignement de la RD Congo, qui entretenait des liens avec l’ancien président Joseph Kabila.

« La situation politique à Kinshasa est incertaine. Certains des principaux acteurs de la coalition majoritaire ont été chassés. Mais une seule personne peut-elle vraiment organiser un coup d’État ? Cela nous amène à penser qu’il ne s’agit que d’une lutte pour le pouvoir. »

François Beya, qui était conseiller spécial à la sécurité du président Félix Tshisekedi, a occupé des postes influents dans les anciens régimes de Mobutu Sese Seko, Laurent-Désiré Kabila et Joseph Kabila. Il serait toujours détenu au siège de l’Agence nationale des renseignements (ANR) à Kinshasa.

Plus d’une semaine après son arrestation, 5 000 membres lourdement armés de l’armée nationale ont défilé dans les rues de la capitale dans une démonstration de force, mais le gouvernement n’a publié aucune autre information sur les auteurs présumés du complot ou leurs possibles motivations. Un mois après son arrestation, la famille et les ONG réclament des comptes au gouvernement.

« Il n’y a aucune annonce officielle du gouvernement sur les responsables de la menace. La seule annonce a été faite par le porte-parole du président pour confirmer que son principal conseiller à la sécurité [François Beya] a été arrêté », analyse un journaliste de Kinshasa.

Dès lors, cette menace de complot n’a-t-elle que pour seul but de retirer François Beya de sa position d’influence ?

« Beya est devenu encombrant pour Tshisekedi. Il était plus ou moins le dernier vestige du régime de Kabila et il se révélait presque impossible à déloger. Je dis depuis longtemps qu’une tentative de coup d’État est très improbable en RD Congo. Cela reste encore vrai », déclare un analyste de la vie politique du pays.

L’enjeu de la sécurité

Après avoir accédé au pouvoir lors d’une victoire électorale de 2018 qui a été largement considérée comme entachée d’un accord secret avec l’ancien président, Félix Tshisekedi a cherché à démanteler sans relâche les structures de pouvoir liées à Kabila.

Bien qu’il ait remporté le vote présidentiel, Tshisekedi doit travailler avec une majorité liée à Kabila à l’Assemblée nationale. Pourtant, d’incessantes manœuvres politiques témoignent que le Président continue de se détacher de l’emprise de son prédécesseur. En décembre 2021, il a annoncé la fin de la coalition avec les partisans de Kabila.

En février, les législateurs ont élu un président de l’Assemblée fidèle à Tshisekedi après une longue bataille pour destituer l’ancienne présidente, Jeanine Mabunda, une alliée de Kabila. Tout cela fait suite à la destitution du Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkama, un autre homme politique lié à Kabila, après un vote de défiance.

« La situation politique à Kinshasa est incertaine. Certains des principaux acteurs de la coalition majoritaire ont été chassés. Mais une seule personne peut-elle vraiment organiser un coup d’État ? Cela nous amène à penser qu’il ne s’agit que d’une lutte pour le pouvoir », lâche notre observateur kinois.

Après des décennies d’avances démocratiques, l’Afrique vient d’être secouée par une vague de prises du pouvoir par des militaires.

Cela conduit les analystes à craindre une augmentation des risques de contagion à travers le continent, y inclus la RD Congo, où le conflit se poursuit à l’est du pays. Félix Tshisekedi avait promis de ramener la paix dans la région, mais les initiatives menées par l’État ont donné des résultats mitigés, des groupes islamistes comme les Forces démocratiques alliées (ADF) liées à l’État islamique se renforçant.

En février, l’État islamique a revendiqué la libération d’une vingtaine de prisonniers lors d’une attaque dans la province du Nord-Kivu, selon SITE Intelligence Group.

Un producteur clef de métaux

Malgré les problèmes de sécurité persistants et l’éventuel complot de coup d’État, l’économie de la RD Congo devrait connaître une croissance significative cette année après une légère baisse liée à la pandémie. Le FMI prévoit une croissance de 6,2 % en 2022, soutenue par une demande mondiale accrue de cobalt et de cuivre.

Les réserves de la Banque centrale sont passées de 800 millions de dollars en 2020 à 3,3 milliards de dollars en octobre 2021, grâce à l’augmentation des paiements des acheteurs chinois et à 1,4 milliard $ des DTS (Droits de tirage spéciaux) du FMI. La RD Congo est également sur le point d’être acceptée dans la Communauté de l’Afrique de l’Est, ce qui devrait ouvrir d’importantes opportunités économiques pour la partie orientale du vaste pays, via des liens avec les marchés régionaux du Burundi, du Kenya, du Rwanda, du Soudan du Sud, de la Tanzanie et de l’Ouganda.

La RD Congo est le plus grand exportateur de cobalt au monde et le cinquième plus grand exportateur de cuivre. En janvier, Shalina Resources, basée en RD Congo, a signé un accord de 600 millions $ avec Trafigura dans le but d’augmenter considérablement les approvisionnements en cobalt de haute qualité et en cuivre en provenance du Congo.

La demande de métaux, en particulier de cobalt, a fortement augmenté.

Cependant, le potentiel de l’industrie a été entravé par des décennies de corruption. Le récent scandale « Congo Hold-up », trouve son origine dans une fuite de documents qui, selon les journalistes d’investigation, révèlent un réseau de corruption autour de l’ancien gouvernement.

@NAF

Écrit par
Par Tom Collins

Laissez un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *