Le G5 Sahel se mobilise contre le terrorisme
Avec le lancement d’une force conjointe, le G5 Sahel renforce son rôle comme acteur sécuritaire important. Non sans interrogation.
Par Antonin Tisseron
Dimanche 2 juillet, les chefs d’État des pays du G5 Sahel (ou G5S, regroupant la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger, le Tchad) se sont réunis à Bamako pour lancer officiellement une force conjointe régionale de 5 000 hommes, regroupant des militaires, des policiers et des civils. L’idée n’est pas nouvelle.
Ce projet avait déjà été annoncé à N’Djaména le 20 novembre 2015 par les chefs d’États du G5S, puis mis en sommeil avant d’être réactivé le 6 février dernier à l’occasion du Sommet à Bamako. «Nous avons décidé de rendre effective la création d’une force G5 Sahel pour lutter contre le terrorisme», avait alors déclaré le président nigérien Mahamadou Issoufou. Deux mois plus tard, le 13 avril, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine donnait son aval au concept des opérations tout en autorisant un déploiement pour une durée renouvelable de douze mois, dans un premier temps le long des frontières du G5S, puis dans un second temps sur l’ensemble du territoire des pays membres.
La création de la force conjointe du G5S ne doit pas faire oublier le besoin de réformer en profondeur les États et les pratiques des administrations, ainsi que de ne pas s’enfermer dans une approche trop sécuritaire.
Cette force conjointe, dont l’état-major doit être situé à Bamako, marque une nouvelle étape dans la coopération sécuritaire régionale et l’histoire du G5S. D’une part, depuis novembre 2013, plusieurs opérations conjointes ont ces dernières années été menées dans la région, avec le soutien des militaires français, avant d’être institutionnalisées au sein du G5S. D’autre part, cette force est le dernier avatar d’une progressive institutionnalisation dans l’espace sahélien et ouest-africain du G5S, qui s’est imposé comme un acteur sécuritaire central dans un contexte d’instabilité régionale croissante.
Rationalités d’une création
La création de la force conjointe sahélienne est avant tout une réponse à l’insécurité dans la région, persistante en dépit du déploiement de soldats français et de la Minusma. Au Mali, entre juin 2016 et mai 2017, les Nations unies ont recensé 105 attaques menées contre les Forces maliennes de défense et de sécurité, 76 contre la Minusma et 20 contre les forces françaises, soit des chiffres supérieurs à la période juin 2015-mai 2016 (respectivement 84, 66 et 15 attaques). Autre évolution inquiétante, la géographie des attaques armées a continué de glisser vers le centre du Mali, avec 42 % d’augmentation dans les régions de Mopti et de Ségou. Quant à l’accord de paix de 2015, il n’a que très lentement progressé.
Si le Mali est en première ligne, la violence dépasse largement ses frontières. En janvier et en mars 2016, les attentats dans les villes de Ouagadougou et Grand-Bassam en sont l’illustration la plus visible, encore qu’elles ne constituent que la face émergée d’une tendance plus profonde reposant notamment sur la porosité des frontières.
Plusieurs actions ont en effet été menées au Burkina Faso et au Niger, à l’exemple de la tentative d’attaque contre la prison nigérienne de Koutoukalé, en octobre 2016. De même, un mois après l’annonce début mars de la création d’un nouveau groupe appelé Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans – réunissant l’émirat saharien d’Al Qaeda au Maghreb islamique (AQMI), Al-Mourabitoun, Ansar Eddine et sa katiba du Macina – Iyad Ag Ghaly a menacé dans un communiqué onze pays dont le Tchad, la Guinée, la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso, le Sénégal et le Niger.