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Coup d’arrêt à un trafic d’ivoire au Gabon

Coup d’arrêt à un trafic d’ivoire au Gabon
  • Publiéaoût 16, 2023

L’arrestation de trafiquants au Gabon vient rappeler que la lutte contre les trafics d’animaux sauvages et l’ivoire enregistre de nombreux progrès, à la faveur de la collaboration entre les ONG et les États africains, mais qu’elle doit s’intensifier.

 

Six Gabonais et deux Camerounais ont été interpellés, le 11 août 2023, dans la région Centre-Ouest du Gabon, après la plainte de Conservation Justice. Cette ONG multiplie les actions contre le braconnage dans le pays. Elle calcule que cette fois, la police aurait mis la main sur 120 kilos d’ivoire dans un véhicule en partance pour le Cameroun ; cela équivaut au massacre d’une centaine d’éléphants, selon l’ONG. Les policiers ont également découvert des armes de chasse, des munitions, ainsi que diverses substances illicites comme le Tranadol.

« Nous détectons la corruption dans 85 % de nos opérations d’arrestation et dans 80 % de nos affaires portées devant les tribunaux. Nous ne nous contentons pas de détecter la corruption, notre rôle est de lutter contre ces tentatives de corruption. »

Si la volonté politique de mettre fin aux trafics est indéniable, au Gabon, quelques gros réseaux réussissent à se maintenir, confie Luc Mathot, fondateur de Conservation Justice. Le gouvernement a durci sa législation et son dispositif contre les trafics. Le militant considère qu’il demeure 95 000 éléphants dans la forêt du Gabon, une population stable faisant du pays « leur dernier grand refuge », alors que la population recule ailleurs sur le continent.

Toutefois, la pression demeure, notamment depuis le Cameroun, d’où les trafiquants peuvent exporter l’ivoire vers l’Asie. Un réseau bien organisé utiliserait des véhicules spécialement adaptés pour cacher la marchandise et échapper à la vigilance des douaniers. Ce coup de filet pourrait entraîner l’arrestation d’autres trafiquants ces prochains mois, ainsi que, espère la police, la découverte de plusieurs points de stock d’ivoire, lesquels seraient répartis dans plusieurs provinces du Gabon.

La criminalité liée à la faune sauvage génère d’importants profits pour les réseaux criminels, mais représente un risque sécuritaire important à cause de réseaux organisés de type mafieux. Les défenses d’éléphants restent très recherchées en Asie, malgré les efforts déployés par certains pays, comme la Chine qui a officiellement interdit le commerce intérieur d’ivoire en 2015. En effet, selon Conservation Justice, le prix de l’ivoire peut encore atteindre 1 000 euros le kilo sur le marché chinois.

Saisie d'ivoire au Gabon, le 11 août 2023 (photo : Conservation Justice).
Saisie d’ivoire au Gabon, le 11 août 2023 (photo : Conservation Justice).

 

Si la réponse judiciaire n’est pas toujours au rendez-vous, – notamment au Cameroun –, les arrestations se multiplient, reconnaît le réseau EAGLE, qui regroupe des ONG luttant contre le trafic d’ivoire et d’animaux sauvage, ainsi que contre la corruption qui lui est souvent liée.

 

Le Cameroun, une plaque tournante ?

Plusieurs trafiquants ont été arrêtés au Congo, en Côte d’Ivoire et au Gabon depuis le début de l’été.

Par exemple, début juillet, trois trafiquants d’ivoire arrêtés à Yamoussoukro avec six défenses d’éléphants. Une très grande paire de défenses pesant 38 kg appartient à un éléphant tué dans le parc national de Taï, provenant de l’un des plus grands mâles restant dans le pays.

Au Gabon aussi, la lutte contre le trafic enregistre des progrès. Selon Conservation Justice, la police a procédé à 28 opérations significatives en 2022, grâce à l’appui de l’ONG, conduisant à l’arrestation de 50 personnes et 34 condamnations à de la prison ferme.

Luc Mathot, interrogé par RFI espère désormais que le Cameroun se montre à son tour plus sévère, « parce que finalement, les organisateurs principaux de ces trafics sont au Cameroun. Ce sont eux qui alimentent le réseau, qui fournissent les munitions, l’argent, pour mettre en œuvre ce trafic d’ivoire qui concernait presque tout le Gabon ».

« En raison de la complexité et de l’ampleur du trafic, nous pensons qu’il serait mieux de renforcer la surveillance avec l’aide des ONG locales, car il y a beaucoup de menaces sur la population des éléphants », confie au magazine TRT Afrika Philippe Ongouoli, directeur de la lutte contre le braconnage au ministère des Eaux et forêts.

Une saisie opérée en Côte d'Ivoire, en juillet 2023 (photo : réseau EAGLE).
Une saisie opérée en Côte d’Ivoire, en juillet 2023 (photo : réseau EAGLE).

 

En effet, la collaboration étroite entre les ONG – dotées de véritables détectives – et la police permet de passer outre les comportements de corruption.

« Nous détectons la corruption dans 85 % de nos opérations d’arrestation et dans 80 % de nos affaires portées devant les tribunaux », détaille le réseau EAGLE. « Nous ne nous contentons pas de détecter la corruption, notre rôle est de lutter contre ces tentatives de corruption. L’approche a reçu un bon soutien de la part des gouvernements désireux de lutter contre la corruption au sein de leurs services. »

@NA

Écrit par
Laurent Allais

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