Côte d’Ivoire : Ouattara réconcilie la Nation

Le président ivoirien Alassane Ouattara souffle dans le cor de la réconciliation. Il vient de nommer l’opposant Marcel Amon Tanoh au poste de secrétaire général du Conseil de l’entente (CE). A l’échelle de la Côte d’Ivoire, c’est un vrai séisme.
Par Véronique Clara-Véronne
« Nous sommes venus ici pour dire un seul mot ; pour dire non à Alassane Ouattara. Pour lui dire que son troisième mandat est anticonstitutionnel. Lui-même nous a dit, en 2016 au moment du vote de cette constitution, qu’elle ne l’autorisait pas à se présenter à un troisième mandat (…)
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Ce que Alassane Ouattara fait, aucun Ivoirien ne peut le faire contre un autre Ivoirien. Nous sommes prêts à mourir pour la Côte d’Ivoire. Nous en avons marre (…) Il ne faut pas avoir peur.
Nous sommes prêts et nous ne reculerons plus. Nous sommes la Côte d’Ivoire de la majorité. Nous sommes la Côte d’Ivoire de la force tranquille. Nous sommes prêts à mourir pour notre pays.
Nous sommes prêts à mourir pour libérer notre pays de la dictature d’Alassane Ouattara. Nous ne reculerons plus devant rien. Nous sommes debout. Nous en avons marre. Dites-lui de libérer notre pays et de nous le rendre ! », a crié Marcel Amon Tanoh l’ancien ministre des Affaires étrangères (de Alassane Ouattara). Ce jour-là il a crié tellement si fort que les murs du stade Félix Houphouët-Boigny ont tremblé. C’était le 10 octobre 2020.
Quelques jours auparavant, Amon Tanoh avait confirmé ce qui se chuchotait dans les chaumières abidjanaises. Lui le démissionnaire du gouvernement du président Alassane Ouattara, dont il est ami depuis plus de 30 ans, avait décidé d’aller à la compétition électorale pour ainsi devenir le prochain président ivoirien.
Même s’il ne l’a pas dit lors de sa déclaration solennelle, Amon Tanoh a quitté le gouvernement ivoirien, car ne partageant plus l’orientation politique qui lui était impulsée.
Cette intervention de l’ex-ministre de Ouattara avait entraîné une telle levée de bouclier y compris dans son propre village – qui l’avait banni – que Marcel Amon Tanoh avait été obligé, quelques trois mois plus tard, le 25 janvier 2021, de présenter ses excuses publiques.

« Je reconnais n’avoir pas été totalement fidèle à mon engagement de montrer aux ivoiriens qu’il est possible de faire de la politique différemment, en sachant, malgré nos désaccords, garder le bon ton, sans proférer d’invectives et sans porter de jugements de valeur.
Je pense notamment aux propos que j’ai tenus le 10 octobre 2020, au stade Felix Houphouët-Boigny, envers le Président de la République, S.E.M. Alassane Ouattara. Voter pour un Président, c’est lui confier notre pays à gérer.
Dire qu’il nous le rende, n’est qu’une manière d’exprimer une divergence sur certains aspects de la gestion des affaires publiques, mais en aucun cas de suggérer qu’il n’est pas Ivoirien, comme il me revient que beaucoup de mes compatriotes l’auraient compris.
Néanmoins, le fond ne justifiait pas la forme, or la forme l’emporte sur le fond. J’ai conscience d’avoir profondément heurté le chef de l’Etat, à qui je tiens à présenter publiquement mes sincères excuses, et à exprimer mes regrets aux ivoiriens ».
Quinze mois plus tard, le président Alassane Ouattara a fait sien le dicton l’oubli et le pardon de l’offense, il a nommé l’ancien ministre des Affaires étrangères, Marcel Amon-Tanoh (71 ans) à la tête du secrétariat exécutif du Conseil de l’entente (CE).
Le CE est une organisation sous-régionale qui regroupe six pays : le Niger, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Niger, le Togo et le Bénin.
Par cet acte, Ouattara confirme que la Côte d’Ivoire est en train de se réconcilier : Hier c’était Laurent Gbagbo qui rentrait dans son pays après avoir été libéré par la CPI.
La Côte d’Ivoire est en train de sortir de la crise qu’elle avait connue notamment celle liée aux violences post-électorales de 2010 ayant fait 3000 morts entre novembre 2010 et avril 2011. Ainsi que celles d’octobre 2020.
Quelques temps avant, c’était le président du FPI (opposition) qui recouvrait la liberté après l’épisode de la désobéissance publique, idem pour Mabri Toikeusse (UDPCI, opposition) rentré d’exil ; début décembre le dialogue politique a repris entre le pouvoir et les principaux partis politiques de l’opposition et de la mouvance présidentielle.
La Côte d’Ivoire est en train de sortir de la crise qu’elle avait connue notamment celle liée aux violences post-électorales de 2010 ayant fait 3000 morts entre novembre 2010 et avril 2011. Ainsi que celles d’octobre 2020. Et c’est un ouf de soulagement pour les Ivoiriens ainsi que pour la sous-région ouest-africaine.
@VCV
1 Commentaire
J’apprécie beaucoup vos articles et votre ligne éditorial. Néanmoins, je suis obligé de dire que le titre peut sembler malhonnête puisqu’effectivement ADO & MAT sont amis depuis 30 ans, qu’effectivement avant de quitter le Gouvernement en protestation de la nomination d’AGC comme candidat du RHDP MAT était à la tête du MAE et qu’effectivement, il est ensuite venu faire amende honorable auprès d’ADO pour se faire pardonner.
En parallèle, beaucoup dénoncent le processus de réconciliation comme une « farce » en pointant l’exclusion de certains partis (le COJEP, le GPS nommément) du dialogue politique (encore au point mort depuis le 16 décembre) ou encore les menaces de poursuites judiciaires envers le PDCI-RDA et le PPA-CI. Alors qu’est-ce que ça signifie ? Qu’il faudrait que les membres du PDCI-RDA & du PPA-CI ou encore du FPI viennent s’excuser auprès du PR pour que la réconciliation puisse avancer ?
Je ne suis pas du tout partisan (et plutôt favorable au RHDP) mais je trouve l’article un peu trop biaisé. Certes, il y’a eu un relatif apaisement ces derniers mois – mais les tensions reprennent… Il serait important de le mentionner aussi.