Côte d’Ivoire : Les politiques pour la stabilité et la paix durable

Après deux mois et demi de débats, le dialogue politique entre pouvoir et opposition ouvert le 16 décembre 2021 s’est achevé vendredi en Côte d’Ivoire avec des points d’accord majeurs.
Par Kimberly Adams
Que retenir au terme de ce long marathon socio-politique ? « Je crois que cela augure pour notre pays d’un avenir dans lequel la démocratie sera encore plus renforcée, mais surtout où la stabilité et la paix durable sont un fait incontestable. Il faut en féliciter les acteurs politiques, ceux de la société civile et tous les Ivoiriens », s’est voulu rassurant le Premier ministre ivoirien Patrick Achi.
Représentant la voix officielle de l’exécutif, Patrick Achi, avait face à lui, les principaux partis politiques ivoiriens, vingt-et-un au total et vingt-six organisations de la Société civile.
Quoi qu’il en soit, la Côte d’Ivoire, pays le plus riche et influent de la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) entend donc donner cet exemple de réconciliation nationale qui doit pouvoir faire des émules dans une sous-région en proie aux instabilités politiques avec leur point d’ogre que sont les coups d’Etat au Mali, en Guinée Conakry et au Burkina Faso. Le cas contraire, c’est la sous-région qui basculera…
Sur les points de convergence, les différents acteurs de la scène socio-politique, se sont mis d’accord sur une réflexion portant redécoupage électoral et aussi sur la nécessité de réaménager la Commission électorale indépendante (CEI) afin que toutes les sensibilités politiques y soient représentées comme par exemple les partisans de l’ancien chef de l’Etat Laurent Gbagbo.
Outre cet aspect, les différents acteurs ont émis et arrêté l’idée de réparations et d’indemnisations des victimes des violences qui avaient émaillé la présidentielle d’octobre 2020.
Plus prosaïquement et pour des considérations purement économiques, les partis politiques ont demandé que l’Etat garantisse un « paiement plus régulier des subventions aux partis politiques ». Ce point a fait l’objet de consensus, pas une voix n’a manqué.
Les cas problématiques de Gbagbo, de Soro, de Blé Goudé et les comptes gelés
Dans les roues de la crise et violences postélectorales de 2010 et 2011 ayant fait 3000 morts entre novembre 2010 et avril 2011, la justice ivoirienne avait condamné Laurent Gbagbo à 20 ans de prison pour « braquage » de l’Agence nationale de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) pendant la crise post-électorale ivoirienne. Et Charles Blé Goudé à une peine de 20 ans d’emprisonnement ferme aussi. Un mandat d’arrêt avait également été lancé contre Blé Goudé. Il est, entre autres, accusé par la justice ivoirienne « d’actes de tortures, d’homicides volontaires et de viols ».
Quant à Guillaume Soro, ancien Premier ministre, et ex-ancien président de l’Assemblée nationale, il a été condamné à perpétuité le 23 juin 2021 par la justice ivoirienne pour tentative d’atteinte à l’autorité de l’État et complot, et troubles à l’ordre public.
Aucun consensus n’a été trouvé entre les oppositions et le pouvoir sur la situation personnes de ces trois hommes.
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Ce qui a fait dire à Georges Armand Ouégnin, vice-président du parti du PPA-CI (opposition, parti de Laurent Gbagbo) qu’en dépit des « discussions qui ont été relativement houleuses, nous nous sommes entendus sur certains points et je crois que c’est ça l’essentiel. On ne peut pas s’entendre sur tous les points, mais on essaye de trouver des solutions. Je repars avec un sentiment qu’il y a eu quelques avancées même s’il n’y a pas eu toutes les avancées ».
Même son de cloche pour ce qui concerne les prisonniers des crises de 2010 et 2020. Pas de consensus.
Pour l’aspect portant sur les comptes bancaires gelés de personnalités politiques depuis 2011, il a été recommandé que ce dossier soit transmis au cabinet du Premier ministre avec la liste des personnalités politiques pour espérer un début de résolution. Comme l’avait expliqué le gouvernement ivoirien, le dialogue politique est rendu nécessaire pour aplanir les divergences et préparer les futurs scrutins en Côte d’Ivoire notamment les élections locales en 2023 et la présidentielle en 2025.
Ces mois de concertation ont permis de créer un cadre de suivi qui a la charge de superviser la mise en œuvre des recommandations.
Le PDCI-RDA (parti de l’ex-président Henri Konan Bédié) note que : « Nous nous sommes félicités de la qualité du contact que nous avons eu avec le gouvernement, il y a eu beaucoup de transparence et de bonne volonté et nous pensons que cette volonté va impulser la volonté de construire ensemble. Nous n’avons pas d’a priori, mais nous restons confiants », a précisé Niamkey Koffi vice-président du PDCI.
Mais pour le journaliste Venance Konan : « Tout le monde s’est, bien entendu, engagé à ce que les prochaines élections se déroulent sans violence, mais cela, on se connaît dans ce pays. Les engagements, si je peux me permettre, n’engagent que ceux qui veulent bien y croire ». Autrement, la classe politique ivoirienne a tellement habitué les uns et les autres aux volte-face spectaculaires, que la prudence recommande d’attendre et de voir…
Quoi qu’il en soit, la Côte d’Ivoire, pays le plus riche et influent de la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) entend donc donner cet exemple de réconciliation nationale qui doit pouvoir faire des émules dans une sous-région en proie aux instabilités politiques avec leur point d’ogre que sont les coups d’Etat au Mali, en Guinée Conakry et au Burkina Faso. Le cas contraire, c’est la sous-région qui basculera…
@NAF