Des manifestations hostiles à la France et favorables aux putschistes ont réuni quelques milliers de personnes dans les rues de Niamey, les 29 et 30 juillet 2023. La CEDEAO, l’Union africaine, la France et l’Union européenne haussent le ton.
La CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest) a fixé un ultimatum d’une semaine aux auteurs du coup d’État au Niger pour restaurer l’ordre constitutionnel. Elle a également suspendu toutes les transactions financières entre les pays membres et Niger. Les chefs d’État de l’instance ouest-africaine se sont réunis en session extraordinaire, ce 30 juillet 2023, sous la présidence de Bola Tunubu, président du Nigeria, en présence de Moussa Faki Mahamat, président de la Commission de l’Union africaine et du président du Tchad, Mahamat Idriss Déby Itno.
De son côté, l’Union africaine avait réagi très tôt, exigeant des militaires le retour immédiat et sans condition dans leurs casernes et le rétablissement de l’autorité constitutionnelle » sous quinze jours.
Les dirigeants de la CEDEAO n’excluent pas le « recours à la force » si nécessaire. Bola Tinubu a dénoncé « la prise d’otage » du président Bazoum par les putschistes et l’« affront » fait à la démocratie. « Il n’est plus temps pour nous d’envoyer des signaux d’alarme », a-t-il déclaré, « le temps est à l’action », a-t-il poursuivi.
Les dirigeants d’Afrique de l’Ouest demandent « la libération immédiate » du président Mohamed Bazoum et le « retour complet à l’ordre constitutionnel en République du Niger », énonce le communiqué final.

Si ces demandes ne « sont pas satisfaites dans un délai d’une semaine, la CEDEAO prendra toutes les mesures nécessaires ; ces mesures peuvent inclure l’usage de la force », énoncent les résolutions.
« À cet effet, les chefs d’état-major de la défense des pays de la CEDEAO se réunissent immédiatement », révèle le communiqué final. Les dirigeants tiennent les putschistes pour responsable de la sécurité et des biens des Nigériens. Ils condamnent par avance tout soutien aux putschistes venu de l’étranger ou de groupes armés privés ; allusion évidente au groupe de mercenaires russes Wagner.
L’organisation régionale a également décidé de « suspendre toutes les transactions commerciales et financières » entre ses États membres et le Niger, les frontières ayant été fermées.
D’autres sanctions financières ont été décidées, notamment « un gel des avoirs pour les responsables militaires impliqués dans la tentative de coup d’État ».
Cette réunion de la CEDEAO a été condamnée à l’avance par les nouveaux hommes forts de Niamey, qui ont dénoncé « la validation d’un plan d’agression contre le Niger ». Les membres de cette junte redoutent une intervention militaire à Niamey « en collaboration avec les pays africains non-membres de l’organisation et certains pays occidentaux », relate un communiqué lu à la télévision nationale.
La France soucieuse de ses ressortissants et de ses intérêts
Fin 2022, la CEDEAO avait décidé de créer une force régionale destinée à intervenir contre des djihadistes mais aussi en cas de coup d’État. De son côté, la France soutient « toutes les initiatives régionales visant à la restauration de l’ordre constitutionnel », ainsi qu’au retour au pouvoir du président élu Mohamed Bazoum.

Réagissant aux manifestations hostiles à la France, cette dernière « ne tolérera aucune attaque contre la France et ses intérêts », fait savoir l’Élysée. Sa réponse éventuelle à une attaque s’effectuerait « de manière immédiate et intraitable ». Selon le ministère français des Affaires étrangères, 500 à 600 ressortissants français se trouvent actuellement au Niger, en plus des 1 500 soldats stationnés dans le pays.
Des milliers de personnes ont donc défilé devant l’ambassade de France à Niamey, au cours d’une marche en direction de l’Assemblée nationale. Les manifestants ont été dispersés par des grenades lacrymogènes. Dans un communiqué lu à la télévision, le dirigeant de la junte, le général Abdourahamane Tchiani a lancé un appel au calme en demandant aux manifestants de ne pas attaquer les ambassades.
La France a annoncé, samedi 29 juillet, qu’elle suspendait, « avec effet immédiat, toutes ses actions d’aide au développement et d’appui budgétaire au Niger », selon un communiqué du ministère des affaires étrangères. « La France demande le retour sans délai à l’ordre constitutionnel nigérien, autour du président Mohamed Bazoum, élu par les Nigériens », a décidé le conseil de défense présidé par le président français, Emmanuel Macron. L’Aide publique au développement s’élève à environ 120 millions d’euros par an à destination du Niger.

De son côté, l’Union africaine avait réagi très tôt, exigeant des militaires le retour immédiat et sans condition dans leurs casernes et le rétablissement de l’autorité constitutionnelle » sous quinze jours, a ainsi déclaré, samedi 29 juillet, son Conseil de paix et de sécurité.
Dans un communiqué, il « se déclare profondément préoccupé par la résurgence inquiétante des coups d’État militaires » sur le continent et condamne « avec la plus grande fermeté » la prise de pouvoir des militaires à Niamey contre un président « démocratiquement élu », dont elle réclame la « libération immédiate ».
Enfin, l’Union européenne « ne reconnaît pas et ne reconnaîtra pas les autorités issues du putsch au Niger » ; l’UE suspend « toutes ses actions de coopération, y compris sécuritaires » avec le pays. Selon le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, Mohamed Bazoum « a été démocratiquement élu, il est et demeure donc le seul président légitime du Niger. Sa libération doit avoir lieu sans condition et sans délai ».

@NA