Étienne Dugas : terre de croissance
Pour Étienne Dugas, PDG de Groupe Marais et président de la Fédération des industriels des réseaux d’initiative publique (FIRIP), l’Afrique va attirer d’importants investissements en infrastructures de communication.
Comment appréhendez-vous le marché africain des infrastructures télécoms ?
L’Afrique est pour Groupe Marais un marché important. Ce continent est la prochaine terre de grande croissance. De par sa population et ses classes moyennes, il se développe rapidement, consomme et crée de la demande. Quand je travaillais en Afrique noire, voici déjà vingt ans, le mobile n’existait pas. Depuis que j’y suis revenu, il y a cinq ans, ce qui m’a frappé, c’est l’énorme développement du mobile à une vitesse à peine croyable ! Parce que le mobile permet de communiquer et de sécuriser les paiements, il facilite le commerce, la croissance et le développement économique. J’ai un lien particulier avec l’Afrique. J’ai travaillé entre 1995 et 2000, au Rwanda, au Kenya, au Cameroun, au Bénin, au Nigeria. Donc, je connais aussi bien l’Afrique anglophone que francophone. Ce qui crée des liens et une espèce d’amour – je ne trouve pas d’autre terme – avec ce continent. Je suis aujourd’hui à la tête d’une entreprise dont l’exportation représente 50 % du chiffre d’affaires, et dont le principal marché d’exportation reste l’Afrique. Nous avons des filiales en Afrique du Sud, en Tunisie, en Algérie. Et nous travaillons dans beaucoup d’autres pays du continent. Groupe Marais réalise 26 millions d’euros de chiffre d’affaires. L’Afrique en représente, grosso modo, 20 % à 30 %, selon les années. Pour l’entrepreneur et le président d’une fédération industrielle que je suis, l’Afrique est la destination par excellence de l’investissement dans les prochaines années.
Mais l’Afrique peut aussi réserver de mauvaises surprises. J’ai vécu personnellement de manière assez compliquée le Printemps arabe. J’avais un gros chantier avec Alcatel-Lucent en Libye. La période a été dramatique pour mon entreprise qui a failli déposer le bilan. Nous avions 16 machines bloquées dans ce pays. Ce sont de grosses trancheuses de 30 tonnes qui creusent et posent les réseaux électriques et de fibre optique, deux infrastructures primordiales pour le continent.
Comment appréhendez-vous désormais ce genre de situations ?
L’insécurité politique est un vrai souci pour les investisseurs. Ils doivent donc opérer des arbitrages. Il est malheureusement des pays où nous n’irons pas, parce que le contexte politique y est mouvant et qu’il y a un risque d’être piégé, comme ce fut le cas pour nous en Libye.
L’approche partenariat public privé que vous avez développée en France intéresse-t-elle les opérateurs africains des télécoms ?
Notre fédération est très jeune. Néanmoins, et au regard de ce qui se pratique en France, des gouvernements africains s’interrogent effectivement sur l’intérêt de constituer un partenariat public privé pour développer les infrastructures. En France, pour 1 million d’euros dépensé par le gouvernement, l’investissement total peut atteindre jusqu’à 6 millions. L’effet de levier de la dépense publique est colossal ! À partir du moment où la puissance publique met un peu de subventions sur la table, elle amorce le processus de développement de l’infrastructure. Pour autant, il faut que les gouvernements soient les premiers utilisateurs des infrastructures auxquelles ils contribuent. Par exemple, des services comme les e-santé, e-gouv, e-commerce et autres e-education, doivent transiter par le réseau co-construit par le gouvernement et les partenaires privés.
Président de Groupe Marais