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Portraits

Aude de Thuin, fondatrice du forum Women in Africa

  • Publiénovembre 30, 2017

En septembre s’est tenue à Marrakech la première édition du forum Women in Africa, destiné à encourager la nouvelle génération de femmes leaders du continent. Aux manettes, la conceptrice de l’événement, Aude de Thuin, fait part de sa vision.

Propos recueillis par Yasmina Lahlou

Après de multiples expériences de grands forums internationaux, pourquoi cette orientation en direction de l’Afrique aujourd’hui ? Parce qu’il y a des opportunités ou par envie d’apporter un plus ?

Pour être honnête, ce sont les femmes africaines qui sont venues me chercher. Depuis des années, elles me demandaient d’apporter mon réseau mondial et j’ai fini par accepter.

Quelle est la valeur ajoutée du forum Women In Africa ?

Elle tient dans le fait d’avoir beaucoup d’hommes avec nous, et que nous allons travailler dans des laboratoires de réflexions collaboratifs sur ces grands enjeux africains que sont l’environnement, la nutrition, l’entrepreneuriat, la finance, etc. Ce que nous voulons en priorité, c’est nous engager sur une feuille de route et faire que les femmes soient des accélératrices de change­ments. Nous irons ensuite dans d’autres pays diffuser nos résultats et agrandir notre communauté qui commence déjà à être importante, puisque 35 pays sont repré­sentés à la première édition de Marrakech.

Une myriade d’ONG et de structures liées aux femmes y étaient représentées, mais avez-vous les moyens de vos ambitions ?

Nous ne sommes pas une association mais une entreprise privée. Un forum comme celui que nous organisons est une première mondiale. Il n’y a pas d’équiva­lent actuel qui mette en relation des leaders du monde entier pour travailler avec des femmes africaines ; et c’est ce que nous faisons. Notre atout, c’est notre capacité à mobiliser le monde entier pour venir à la rencontre de ces femmes africaines qui vont oeuvrer pour l’économie du continent.

Comment s’articule et fonctionne WIA ?

WIA se fonde sur trois piliers : tout d’abord l’Institut WIA qui fournit les données et publie les résultats des études sur l’impact des femmes sur l’économie de l’Afrique. Nous fournissons également des résumés d’études afin de les rendre plus accessibles et lisibles aux membres de notre club ainsi qu’aux entreprises.

Ensuite, il y a le WIA Club qui assure l’évènementiel. C’est lui qui est en charge du sommet annuel de Marrakech, à la suite duquel, dès le mois d’octobre 2017, nous organisons dans une dizaine de pays, sur le continent mais aussi en France, à Londres et à Munich, ce que nous appelons les Back from Morocco c’est-à-dire que nous allons diffuser à ceux qui nous le demandent dans différents pays les résultats des travaux de Marrakech.

Vous mettez l’accent sur l’envie d’entreprendre…

Effectivement, et c’est notre troisième pilier – que nous appelons le WIA Philan­thropy. C’est un fonds de dotations financé par un appel à candidatures d’entrepre­neurs à travers l’ensemble du continent. Nous avons reçu 260 candidatures et avons invité près d’une vingtaine de candidats à Marrakech afin de les présenter aux 300 participants. Il s’agit là d’un modèle écono­mique remarquable dont j’ai pu constater qu’il peut avoir une incidence considérable dans tous les secteurs.

De nombreuses critiques émanent des Africains eux-mêmes… Quels arguments pour contredire ces critiques ?

Je suis à l’origine de la loi sur les quotas en faveur des femmes, j’ai créé le Women Forum qui est le leader mondial des événements pour les femmes. Et si je lance aujourd’hui le sommet WIA, c’est parce que je suis profondément convaincue que les femmes vont aider le continent, stabiliser l’économie et, au-delà, qu’elles auront aussi un impact plus important dans le monde entier, pour les générations à venir.

Beaucoup d’Africains estiment que l’initiative doit venir d’eux-mêmes et non pas émaner des autres…

Si les Africains le faisaient, je n’aurais pas besoin de le faire moi-même. Des femmes sont venues me chercher pour la dimen­sion mondiale que je peux apporter. J’ai 25

années de travail derrière moi. Je ne viens pas comme « une femme blanche » mais comme une femme qui veut aider les autres femmes et l’Afrique. Ce n’est pas un choix mais c’est pour répondre à ces demandes.

Quel est votre business plan ?

Nous avons des partenaires de poids comme Orange, L’Oréal, Engie, Suez, BNP Paribas, entre autres. Ils nous financent parce qu’ils me connaissent et parce qu’ils veulent rencontrer ces femmes. Il y a ce besoin et nous le permettons.

Ce projet se situe au coeur des lieux du pouvoir, d’entreprendre, de transformer : comment faire bénéficier de cette vision ?

Par notre sérieux et la qualité des études que nous produisons, par la venue d’inter­venants exceptionnels et parce qu’il n’y a pas encore d’équivalent à ce forum. Nous y abordons des sujets majeurs sur la gouver­nance, l’éducation, la nutrition… Notre programme fait venir les gens car sa qualité leur permet de progresser. Nous avons à apprendre de l’Afrique. Ce n’est pas à sens unique. Je n’y vais pas parce que l’Afrique est à la mode mais parce que notre monde a besoin des femmes pour aller mieux. Sans elles, les problèmes de migrations, d’environnement, etc., vont s’amplifier. Les femmes font la différence.

Par rapport au monde des hommes…

Les hommes comprennent ce que nous sommes en train de réaliser car ce sont eux qui sont à la direction et ils ont eu la preuve que les femmes produisent de meilleurs résultats et ont une vision plus posée. Nous avons identifié plus de cent entreprises qui soutiennent les femmes et certaines d’entre elles arrivent même à la parité. Pour les encourager, nous avons créé un prix qui récompense lors du forum WIA les hommes chefs d’entreprise qui oeuvrent dans ce sens.

Que répondez à ceux qui disent que vous gravitez dans un univers offshore ?

J’ai un conseil africain, la direction des programmes est faite par une équipe africaine, nous avons 22 ambassadrices sur le continent. Nous ne sommes basés à Paris que techniquement, mais notre institut s’installe à Dakar, et si demain j’ai une prési­dente ou un président qui veut le diriger, alors je cède volontiers la place !

J’ai lancé ces initiatives parce que personne d’autre n’était suffisamment fou et n’avait les moyens de le faire ! Si demain, on trouve la bonne personne pour prendre en mains WIA, alors je serai ravie d’en discuter avec elle. Encore une fois, je fais cela parce que je suis une femme consciente du monde dans lequel nous vivons. Je pense que ce projet est néces­saire pour un meilleur équilibre du monde dans les années à venir, un monde qui est aujourd’hui en très grande difficulté. Lorsque l’on met le mot « Afrique » à côté du mot « femme », nous obtenons le ticket gagnant !

Écrit par
ade

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