L’Afrique peut suivre ses propres modèles de gouvernance

L’universitaire Bertrand Badie réfute les prismes passéistes des relations internationales. Dans une époque de profondes mutations, il montre la réalité croissante de la gouvernance mondiale et ses expressions entre Occident et Afrique.
Vous êtes professeur émérite à Sciences Po Paris. Auteur de plusieurs livres remarqués comme La Diplomatie de connivence, L’État importé, Le Temps des humiliés… vous avez publié un ouvrage de référence, Rethinking International Relations. Précisément, aujourd’hui, peut-on repenser ces relations, tant tout semble se détraquer ?
Justement, l’une des difficultés tient au penchant de l’être humain qui tend toujours à considérer que tout se passe comme avant. C’est un réflexe classique que d’aller du connu vers l’inconnu, et de penser que ce à quoi on fait face ressemble à ce que l’on a connu auparavant. Or, on a constamment négligé plusieurs ruptures fondamentales. Aucune d’entre elles n’a été sérieusement explorée, d’où le défaut des politiques étrangères actuelles.
La première rupture tient à la décolonisation. Elle n’a pas été suffisamment prise en compte bien qu’elle ait profondément modifié le système international. La venue d’États nouveaux et donc d’histoires, de sociétés, d’économies nouvelles et spécifiques a bouleversé un ordre international qui, jusqu’à quelques décennies, n’était que régional et qui devient soudain mondial.
Nous avions l’habitude de considérer que les relations internationales se passaient en Europe. Les États-Unis eux-mêmes sont devenus une puissance internationale lorsqu’ils se sont occupés de l’Europe à partir de la Première Guerre mondiale. C’est déjà une rupture importante de se trouver projeté dans un monde désormais constitué de puissances émergentes d’Afrique, d’Asie et d’Amérique du Sud. Des histoires différentes apparaissent ainsi qu’une banalisation de la « tectonique de sociétés », c’est-à-dire des sociétés qui se rencontrent, échangent ou s’entre-déchirent à large échelle et dans la diversité.
L’Occident est en train de commettre une erreur considérable qui est de se replier sur lui-même à un moment où tous les blocs se défont et où toutes les alliances pérennes se décomposent. Il suscite la crainte, la méfiance et l’étonnement dans les pays du Sud.
La deuxième grande rupture qui n’a pas été réellement prise en compte est celle de la mondialisation. Cet ordre entièrement nouveau nous fait déboucher pour la première fois dans l’histoire sur un monde unique où tout le monde est « sur le même bateau ». À part peut-être les Palestiniens et quelques autres peuples parias, tous les peuples du monde appartiennent désormais au même système international dont ils sont les membres officiels. Tout change alors : se trouvent dorénavant côte à côte un Centrafricain dont le pays représente un PIB par habitant et par an d’environ 600 $ par an et un Luxembourgeois dont le même PIB par habitant et par an est de 110 000 $. Ces différences énormes font que les enjeux sociaux sont devenus majeurs pour les relations internationales, dépassant même en importance les enjeux militaires traditionnels. De même, la mondialisation a créé quelque chose que nous ne savons pas analyser : une interdépendance croissante entre les économies, les sociétés, les cultures, les moyens de communication. Le vieux concept de souveraineté doit alors être remis en cause.
Toutefois, aujourd’hui, la donne semble nouvelle, avec ce qui semble une nouvelle Guerre froide, depuis le conflit en Ukraine. Ne nous fait-elle pas entrer dans une équation impossible en matière de relations internationales ?
L’erreur est bien de considérer que nous entrons dans une nouvelle Guerre froide. Le monde d’aujourd’hui n’est plus du tout celui de la Guerre froide. Nos principaux dirigeants, qu’il s’agisse de M. Poutine ou de la plupart des dirigeants occidentaux, ont tendance à traiter les questions présentes et notamment celle de l’Ukraine comme si nous étions toujours dans ce contexte, ce qui est faux.
Nous faisons face à la même dialectique.
Pas du tout, dans la mesure où la Guerre froide se déroulait bloc contre bloc. Ici, il y a toujours un bloc occidental mais il n’y a plus de bloc soviétique. Ce n’est pas l’addition de la Russie, de la Biélorussie, de la Corée du Nord, de l’Érythrée et de la Syrie qui fait un bloc. D’autre part, la Guerre froide reposait sur la confrontation d’idéologies. Aujourd’hui, les idéologies ne structurent plus la conflictualité internationale.
Enfin et surtout, les deux blocs n’avaient aucune caractéristique d’interdépendance entre eux : or le monde aujourd’hui se caractérise par une formidable interdépendance économique, sociale, culturelle et en l’occurrence énergétique. D’où l’importance de cette dimension systémique du conflit ukrainien présent qui contraste totalement avec l’affrontement entre deux acteurs indépendants. Parler de Guerre froide, c’est s’engager dans une analyse et dans une action totalement distincte de ce que nous fournissent la réalité et la complexité du monde actuel.
J’ajouterai de ce fait même une troisième rupture, celle précisément liée à la dépolarisation. Nous étions depuis 1945 dans un monde hyper-polarisé autour du pôle soviétique et du pôle occidental. Nous sommes dans un monde qui, brutalement, est devenu apolaire. Nous sommes dès lors dans une situation de fluidité remarquable des relations internationales qui modifie complètement la donne.
Comment aujourd’hui dessiner le monde que nous observons avec une potentialité de guerre et de conflits ? Les États les moyens de le réguler ?
C’est la grande question que se posent tous les internationalistes. Comment faire vivre ensemble des États, des peuples, des sociétés et des cultures tous différents les uns des autres ? Les principes régulateurs d’aujourd’hui ne sont plus ceux d’hier. Le principe classique de souveraineté conduisait à une régulation internationale par compromis entre États nations indépendants. Or, les enjeux qui dominent aujourd’hui ne sont plus nationaux ni internationaux au sens étymologique du terme, mais sont des enjeux globaux. Il faut complètement changer la donne ! Nous ne lutterons pas contre le coronavirus ou le réchauffement climatique par compromis entre intérêts nationaux mais en regardant la situation globale et en la traitant globalement. Nous ne savons pas le faire ou seulement de manière parcimonieuse.
Certes, la régulation globale opère dans certains domaines, comme l’aviation, les télécommunications ou l’Internet qui se conforment à des règles globales. Pour autant, les grands enjeux sécuritaires en sont encore très loin notamment ceux liés à la sécurité humaine, comme le montre le traitement des enjeux sanitaires.
Le deuxième principe de régulation qui a fait fortune pendant des siècles est le classique rapport de puissance. Le premier mot qui venait à la bouche des internationalistes était « rapport de force » ou « balance of power ». Or, nous découvrons aujourd’hui que la puissance n’a plus l’efficacité qu’elle avait autrefois. Les États-Unis, sans conteste la première puissance militaire du monde avec entre 35 et 40% des dépenses militaires mondiales, ont été battus dans pratiquement toutes les guerres qu’ils ont menées récemment, du Vietnam à l’Afghanistan en passant par l’Irak et la Somalie.
De même, Vladimir Poutine a été de fait battu dans les premières semaines de sa guerre contre l’Ukraine sur le terrain militaire, et la France est mise en échec au Sahel. Il faut se hâter de tirer les conséquences de ce phénomène nouveau : la puissance ne mène plus le monde. Elle garde intacte sa capacité destructrice mais elle n’a plus sa capacité régulatrice par laquelle le rapport de force devait être la solution et même la panacée. Essayez de trouver une solution aux problèmes d’aujourd’hui par le concert des puissances et vous serez vite déçu ! Il faut soit inventer un substitut au concept de puissance soit le réincarner et le reconstruire.
Vous venez d’évoquer l’Afrique. Que va-t-elle devenir dans cette situation, de même que les pays arabes qui sont dans un état de ruine ? Un ordre nouveau est-il en train d’émerger en Afrique aussi avec le Sahel, l’Afrique centrale et australe ?
L’Afrique exprime parfaitement et depuis plus de soixante ans cette idée de la mise en échec de la puissance. C’est tout de même la grande leçon, quelque peu occultée, dont il faut savoir tirer toutes les conséquences. Elle a d’abord mis la puissance en échec par la décolonisation. Le plus faible, c’est-à-dire les peuples colonisés, a vaincu le plus fort, c’est-à-dire les puissances coloniales rompues à l’art de la guerre mais défaites en Algérie, à Madagascar, au Kenya ou au Cameroun. De même, toutes les guerres postcoloniales, nombreuses hélas, qui se sont produites en Afrique par la suite, ne relèvent pas de la classique rivalité de puissances, mais de facteurs nouveaux….
L’une des causes les plus graves des guerres ou du conflit sahélien est l’effondrement du système foncier traditionnel qui est censé gérer la répartition des ressources, hélas de plus en plus rares, notamment du fait de la désertification.
Les guerres africaines sont en effet très rarement interétatiques, c’est-à-dire nées d’un litige entre États. On en compte quelques-unes, par exemple entre le Mali et le Burkina Faso ou la Guerre des sables entre l’Algérie et le Maroc. Mais la plupart du temps ce sont des guerres de décomposition sociale, un phénomène nouveau que l’on ne sait pas regarder en face. À la racine du conflit sahélien ou du conflit congolais se trouve non pas la rivalité de puissance mais l’échec et la décomposition des sociétés et des institutions sociales et politiques qui ont plongé ces pays dans une logique où l’impuissance fait la loi beaucoup plus que la puissance. Ceci montre à quel point l’urgence n’est pas de combattre l’ennemi, ce qui a fait l’histoire de l’Europe pendant des siècles, mais d’instaurer une véritable gouvernance qui chasse ce risque de désordre belligène. Ce que la décolonisation n’a pas réussi à établir.
A-t-on le temps de faire tout cela ? Vous parlez de sujets gigantesques qui demandent du temps et surtout beaucoup de moyens.
L’Europe a mis à peu près cinq siècles à se construire, de la sortie du Moyen-Âge jusqu’à la stabilisation de la carte européenne. Et il faut bien considérer que celle-ci a été définitivement parachevée qu’au XXe siècle. Peut-on reprocher aux Africains de ne pas avoir fait en cinquante ans ce que les Européens ont mis cinq siècles à faire ?
L’urgence est d’abord, d’admettre la voie à suivre. On nous explique que les malheurs de l’Afrique sont des manipulations stratégiques ou des actions terroristes. Or ce sont là des épiphénomènes, liés à des « entrepreneurs de violence » qui profitent d’une situation et de facteurs de désordre infiniment plus profonds ! Il faut savoir découvrir, au-delà, les racines de la crise africaine, c’est-à-dire ce défaut de gouvernance politique mais surtout de gouvernance sociale. Tout est à refaire, à commencer par les régimes fonciers. L’une des causes les plus graves des guerres ou du conflit sahélien est l’effondrement du système foncier traditionnel qui est censé gérer la répartition des ressources, hélas de plus en plus rares, notamment du fait de la désertification.
Justement parce que le travail à accomplir est long, il est indispensable de commencer tout de suite. Rien n’est plus absurde que de prendre le prétexte de la longueur du temps pour ne jamais commencer ! Tout cela implique un effort de réinvention que la décolonisation a bloqué en procédant par mimétisme. Dans L’État importé, j’ai mis en évidence que ce n’est pas en copiant les pays occidentaux que l’Afrique s’en sortira. Les premiers à l’avoir dit sont les grands libérateurs de l’Afrique et la grande pensée panafricaniste de Nkrumah, Lumumba ou Kenyatta.
Ils expliquaient clairement que la voie de l’Afrique n’était pas dans l’imitation des États nations occidentaux mais dans la découverte des formes de gouvernance qui correspondent à son histoire. Sans cet effort, l’Afrique reproduira la dialectique que nous connaissons où des États en échec ne peuvent réagir qu’en renforçant leur autoritarisme et leur militarisation. Ce qui a pour effet d’aggraver les conflits beaucoup plus que de les résoudre. Il faut briser ce cercle vicieux et se lancer dans une politique de réinvention. Elle demandera du temps mais je pense que les Africains sont hautement capables de réaliser ce travail.
Dans la relation Afrique-France, on a l’impression que la France a une vision brouillée. Les peurs structurent les visions des politiques. Comment en est-on arrivé là ?
Vous avez tout à fait raison. C’est pour cela que je dis régulièrement que la décolonisation a été un échec. Elle s’est faite selon un modèle qui ne correspond pas à la réalité que j’ai décrite. La France, comme de manière générale les anciennes puissances coloniales, ont voulu maintenir dans le temps postcolonial un certain nombre d’avantages retirés de la colonisation. La pérennisation de ces modèles dits néo-coloniaux ou clientélistes a eu un effet pernicieux des deux côtés.
Une formule me fait toujours réagir dans le discours politique français, qui veut que la France ait des « responsabilités particulières » en Afrique. J’ai naïvement interrogé un responsable politique français en lui demandant en quoi la France y avait des « responsabilités particulières » plus que le Guatemala ou la Bolivie. Cette personne m’a répondu que cette formule tenait à la longue histoire de la présence française en Afrique. Il voulait donc désigner ainsi la tutelle coloniale d’antan qu’on cherche à pérenniser, ce que ressentent mes amis africains. Au fil du temps, cette tutelle devient insupportable dans les symboles, les pratiques et la philosophie de ces relations.
Effectivement, le grand défi de la politique étrangère française est de savoir parler à ceux qui n’étaient pas du club d’avant-guerre. La France, comme ses semblables, n’a jamais su parler aux émergents, c’est-à-dire à la Chine, au Brésil, à l’Inde, à l’Indonésie ou à l’Afrique du Sud. Mais elle ne sait pas davantage parler aux anciens pays colonisés, c’est-à-dire créer un vrai partenariat.
Pas seulement égalitaire car ce mot est galvaudé, mais aussi pratique. Parler à l’autre en considérant qu’il a ses choix propres, ses aspirations, son histoire et ses intérêts. Savoir en discuter comme nous savons le faire avec l’Allemagne et, pendant un temps du moins, avec la Russie : il convient d’utiliser la même grammaire dans nos rapports avec la République centrafricaine ou la RD Congo.
Russie, Chine, Inde et autres pays émergents… comment va se dessiner un monde où l’on voit des acteurs qui sont aussi empêchés ?
Ce monde est en train de muter d’un temps de sécurité nationale et internationale à un temps de sécurité globale. Concrètement, ce qui nous menace aujourd’hui n’est plus tellement le voisin, même si l’exemple ukrainien montre qu’il y a toujours des résurgences meurtrières de l’ancien monde : Vladimir Poutine mène ainsi une guerre réactionnaire qui rappelle les siècles passés. Pour les Ukrainiens, les notions de sécurité nationale et de territoire ont évidemment un sens profond et actuel.
Regardez le monde dans sa globalité. Il est menacé avant tout par le changement climatique qui cause huit millions de morts par an. L’insécurité alimentaire cause neuf millions de morts par an. La faim dans le monde représente l’équivalent de huit attaques par jour sur le World Trade Center. Le terrorisme cause, pour sa part, entre 10 000 et 40 000 morts par an, ce qui le place à une tout autre échelle. La vraie insécurité est donc globale : elle n’est pas sécable. Il est impossible de dissocier le traitement du changement climatique en France, au Brésil et en Russie. Nous sommes dépendants de l’autre et c’est quelque chose que cinq siècles d’histoire passée nous empêchent de voir. Le grand défi est celui de la régulation globale.
Un utopiste dirait simplement : « Installons un gouvernement mondial. » C’est évidemment impossible aujourd’hui ou demain de construire un tel gouvernement. Alors on a inventé un terme de substitution, « la gouvernance globale » qui veut dire autre chose, autrement plus subtile. Le monde reste doté de 193 États mais des mécanismes institutionnels qui doivent permettre de faire face ensemble à ces grands défis globaux. C’est là le sens du nouveau multilatéralisme. Mais la mondialisation bouleverse tellement les habitudes acquises que les peuples et les sociétés viennent à en avoir peur. Ils se protègent par des réflexes nationalistes et populistes qui déferlent un peu partout dans le monde. C’est ce qu’il y a de plus toxique dans notre monde actuel, dans la mesure où le nationalisme ne résout rien et complique tout. Hélas, les politiques savent jouer de cette peur de la mondialisation et de ce désir protectionniste pour affirmer leur pérennité.
Les obstacles sont donc considérables et il faut simplement faire confiance au génie humain et à sa capacité de les transcender. Il y a deux facteurs de changement dans le monde qui peuvent y aider : l’appât du gain et l’effet de peur. Quand les gouvernants s’apercevront que pérenniser une politique nationaliste leur coûte trop cher, ils viendront à la gouvernance globale. Quand les peuples auront trop peur des étés trop chauds et dévastateurs, ils commenceront à comprendre qu’il faut faire des sacrifices pour parvenir à la gouvernance globale. Malheureusement, nous sommes de la mauvaise génération, celle de la transition où on veut maintenir les effets du monde ancien dans un monde qui a déjà changé.
En attendant cette civilisation de l’humanisme que prône Edgar Morin, qu’est-ce qui pourrait inciter à l’optimisme pour ne pas avoir une vision théorique mais converger vers ce monde dont vous parlez ?
Ce n’est pas une vision théorique mais au contraire extrêmement pratique. La gouvernance globale ne se voit pas mais elle existe déjà partout. Je donnais les exemples de l’aviation et des télécommunications mais je pourrais continuer à énumérer les succès de la gouvernance globale. Pour rendre hommage au grand Africain qu’était Kofi Annan, il l’avait parfaitement compris dans son discours du Millénaire en lançant les OMD. Il faut rendre hommage aux agences onusiennes qui mettent en place cette gouvernance globale qui, par exemple, a permis d’éradiquer la variole en Afrique dans les années qui ont suivi la décolonisation. Les ONG font aussi un travail considérable de régulation globale et elles sont considérablement plus utiles que des gouvernements narcissiques qui ne font qu’exhiber leur drapeau. Gardons ce qui marche, comme les ODD définis en 2015. Simplement, on préfère regarder les sanglants matchs interétatiques qui occupent les journaux télévisés, beaucoup plus que les efforts humanitaires anonymes dont personne, ou presque, ne fait mention.
Comment voir l’avenir ? L’Occident est en train de commettre une erreur considérable qui est de se replier sur lui-même à un moment où tous les blocs se défont et où toutes les alliances pérennes se décomposent. Il s’entête à exister en tant que tel et « entre soi », ce qui fait qu’il suscite la crainte, la méfiance et l’étonnement dans les pays du Sud. Le conflit ukrainien aurait dû faire l’unanimité contre M. Poutine tant il est cruel et tragique. S’il y a eu au Sud tant de pays qui se sont abstenus, c’est parce qu’ils craignent cette pérennisation d’un bloc occidental clos sur lui-même et ses certitudes qui leur rappelle le temps de la colonisation.
L’erreur est bien de considérer que nous entrons dans une nouvelle Guerre froide. Nos principaux dirigeants, qu’il s’agisse de M. Poutine ou de la plupart des dirigeants occidentaux, ont tendance à traiter les questions présentes et notamment celle de l’Ukraine comme si nous étions toujours dans ce contexte, ce qui est faux.
Ce qu’il faut, c’est bâtir des alliances ouvertes, inclusives et pragmatiques, au lieu de pérenniser des blocs fermés dans leur arrogance désuète. Ne pas être toujours entre nous, « blancs », « chrétiens », porteurs de « valeurs exceptionnelles » qui avons découvert la rationalité avant les autres, mais au contraire forger des alliances généreuses et audacieuses qui consistent à coopérer tous azimuts. Et construire, face aux grands enjeux, des alliances de circonstance. C’est cela, la nouvelle politique étrangère.
Ce qui me désole, c’est ce que ce sont les « méchants » qui ont commencé. Poutine fait des alliances pragmatiques avec la Turquie, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, l’Inde, le Pakistan, voire avec Israël. Il faut ne pas laisser à ceux qui détruisent notre monde la pratique de ces diplomaties fluides, nouvelles, ouvertes et pragmatiques.
@NA