Sur la voie de l’émergence

Le Bureau de suivi opérationnel dirige la mise en œuvre du Plan pour un Sénégal émergent. Son directeur général depuis 2019, Ousseyni Kane, décrit le rôle de son bureau et ce que le PSE a accompli jusqu’à présent.
Quelles sont les fonctions du BOS PSE dans l’économie sénégalaise ?
La mission du BOS est la coordination, le suivi, la résolution des goulots et l’évaluation des performances réalisées pour que le Sénégal atteigne l’émergence dans un horizon très proche. Le BOS est la tour de contrôle des actions stratégiques. Ses informations et outils d’aide à la décision sont examinés chaque semaine en Conseil des ministres. Le BOS évalue également l’impact réel des politiques publiques sur les populations bénéficiaires. Le BOS joue un rôle de cabinet de conseil et d’accompagnement pour toutes les structures étatiques dans la mise en œuvre de leurs actions phares. Il apporte aussi une assistance au secteur privé dans le cadre des investissements réalisés dans notre pays.
Le président de la République a mis en œuvre le PSE en 2014. Quel a été son succès depuis ?
La première phase décennale de mise en œuvre du PSE est rythmée autour de deux Plans d’Actions Prioritaires à savoir le PAP-Un 2014-2018 et le PAP-Deux 2019-2023.
La première phase opérationnelle se singularise par une croissance soutenue de 6% en moyenne annuelle, portée par le secteur tertiaire, suivi du secondaire et du secteur primaire. Cette croissance a permis de réduire le taux de pauvreté du Sénégal de 5% qui est passé de 42,8% en 2011 à 37,8% en 2018. Le Sénégal enregistre ainsi le plus faible taux de pauvreté dans l’espace UEMOA.

Sur la période 2019 – 2022, la croissance moyenne annuelle s’est établie à 4,4%. L’exploitation du pétrole en 2023 devrait permettre d’atteindre un niveau de croissance beaucoup plus élevé à l’avenir.
Cette première décennie a démontré clairement que le PSE est une réussite. Dix ans après, il est incontestable que la photographie du Sénégal en 2014 et celle de 2023 sont différentes.
Les facteurs clés du succès du PSE sont liés au focus sur les projets et les réformes pour éviter une dispersion des mesures et des efforts ; ainsi qu’au Suivi opérationnel et la responsabilisation des acteurs sur l’obtention de résultats significatifs dans tous les secteurs de l’économie, notamment l’énergie, les infrastructures, les services, les mines et l’agriculture, le social.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes :
- Quadruplement de la capacité électrique installée (1787 MW en 2022) ;
- Un taux d’électrification rurale de 55% vs 24% en 2012 ;
- La réalisation du Train Express Régional (38 km) ;
- La réalisation de 233 km d’autoroute ;
- La mise en service de l’Aéroport international Blaise-Diagne qui a accueilli 2,6 millions de passagers en 2022 ;
- Livraison de la phase 1 (Saint-Louis, Matam, Ourossogui, Kolda et Ziguinchor) du Programme de Rénovation des Aéroports secondaires;
- La construction de quatre hôpitaux régionaux (Touba, Kaffrine, Kédougou et Sédhiou) ;
- La production de 2,4 millions tonnes de phosphates (+ 118% par rapport à 2012) ;
- Le triplement de la production de riz (469 649 tonnes de paddy en 2012 à 1 409 120 en 2022) ;.
- La création de quatre Zones économiques spéciales.
Au plan macroéconomique, ces réalisations se traduisent par :
- Une croissance moyenne du PIB de 6,6% enregistrée sur la période 2014 et 2018
- Une croissance du PIB de 4,8% en 2022 en dépit du Covid-19 et de la crise russo-ukrainienne.
Quels ont été les principaux défis et difficultés rencontrés ?
L’un des défis majeurs est la lenteur dans la mise en œuvre des réformes. Planifiée jusqu’en 2023, la mise en œuvre de la première phase décennale a fait le focus sur les priorités. À ce titre, les succès sont indéniables dans des secteurs stratégiques comme l’énergie, la santé, l’agriculture, le social … Toutefois, plusieurs réformes stratégiques n’ont pas pu être mises en œuvre de manière optimale, même si nous avons noté des avancées majeures notamment dans le Doing business de la Banque mondiale et les dispositifs pour renforcer le secteur privé national.
Cependant, force est de constater que certaines composantes n’ont pas connu les avancées souhaitées en raison de la conjoncture internationale et des lourdeurs notées dans les procédures administratives. C’est la raison pour laquelle le BOS a lancé la structuration de la réforme Phare « Modernisation du service public » pour impulser une nouvelle dynamique dans la mise en œuvre des actions prioritaires de l’Etat. Sans une administration forte, moderne, digitalisée, et focus sur les priorités, notre chemin vers l’émergence sera parsemé de quelques lenteurs.
Comment le BOS influence-t-il les processus gouvernementaux ?
Le dispositif de suivi et de coordination du PSE permet grâce à un tableau de bord hebdomadaire de retracer l’état d’avancement des projets et d’exécution des réformes avec un focus sur les risques et problèmes critiques mettant en péril leur mise en œuvre. Il permet aussi de structurer et d’évaluer les impacts des actions phares à travers la forte mobilisation des ministères concernés et des chefs de projets. Ce dispositif fort de plus de soixante personnes permet au BOS d’interagir au quotidien avec les acteurs de la mise en œuvre de ces actions prioritaires, de challenger ces activités mais aussi de les accompagner pour lever tous les obstacles.
Le secteur public s’est-il modernisé grâce au PSE ?
La mise en place d’un dispositif spécial de suivi et de coordination traduit une rupture dans le pilotage des projets et réformes stratégiques et s’inscrit ainsi dans la dynamique d’amélioration des performances de l’administration.
L’objectif visé est d’assurer un bond qualitatif de l’efficacité des investissements publics à travers non seulement une meilleure structuration des projets et réformes mais également une mise en œuvre dans les délais et le budget imparti, afin de parvenir aux effets et impacts escomptés.
Il convient de noter d’importantes avancées en la matière tout en reconnaissant la nécessité d’aller bien au-delà. Nous avons ouvert le chantier de la « Modernisation du service public », en relation avec le ministère de la Fonction publique et tous les acteurs concernés. Cette réforme phare vise à promouvoir des gains de productivité dans l’administration publique, indispensables pour construire un environnement des affaires attractif et compétitif.
Comment le PSE améliore-t-il la sécurité alimentaire dans le pays ?
Le secteur agricole, à travers des projets phares, figure parmi les priorités du PSE en vue de la souveraineté alimentaire.
Les récentes crises montrent toute la pertinence de cette stratégie qui se fonde sur l’amélioration de la productivité agricole et des chaînes logistiques locales, l’augmentation des productions et le soutien à la recherche et à l’innovation.
Des avancées notables sont enregistrées grâce aux importants investissements tant publics que privés (depuis 2012) :
- Triplement de la production de riz ;
- Hausse de 65% de la production de mil ;
- Décuplement de la production de pomme de terre ;
- Doublement de la production d’oignon ;
- Augmentation de 42% de la production laitière.
L’augmentation du budget du programme agricole à hauteur de 66 milliards de F.CFA (100 millions d’euros) traduit la volonté politique de créer les bases d’un développement durable du secteur agricole à travers, notamment :
- L’augmentation des surfaces cultivées ;
- Les aménagements hydro-agricoles ;
- La mise à disposition de semences et d’engrais (subventionnés) ;
- La mécanisation agricole ;
- Le financement.
S’y ajoute la stratégie d’import substitution dont le but est de réduire notre dépendance aux importations grâce à la valorisation des productions locales.
@AB