Le Mali souffle le chaud et le froid

Tandis que le pouvoir malien accepte la médiation du Togo au sujet des 49 militaires arrêtés le 10 juillet, il expulse le porte-parole de la Minusma, accusé de diffuser de fausses informations dans cette affaire. Parallèlement, le pays retrouve un peu d’air au plan financier. Actualisation.
Par Laurent Allais
Le pouvoir malien a ordonné, le 20 juillet 2022, l’expulsion du porte-parole de la Mission des Nations unies au Mali (Minusma), lui reprochant des « informations inacceptables » sur l’affaire des 49 militaires ivoiriens détenus depuis le 10 juillet à Bamako.
Le gouvernement a notifié à la représentante spéciale adjointe du secrétaire général de l’ONU, Daniela Kroslak, « la décision » de Bamako « invitant M. Olivier Salgado, porte-parole de la MINUSMA à quitter le territoire dans un délai de 72 heures », précise un communiqué du ministère malien des Affaires étrangères et de la coopération internationale.
Pourtant, l’heure était à la détente, ces derniers jours. Les institutions financières africaines et internationales, de la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest à la Banque mondiale, ont décidé de lever leur embargo sur leurs affaires avec le Mali.
Le porte-parole de la Minusma, selon le pouvoir malien, aurait déclaré « sans aucune preuve, que les autorités maliennes auraient été préalablement informées de l’arrivée des 49 militaires ivoiriens par vol civil, à l’aéroport international le dimanche 10 juillet 2022 », selon le communiqué. En cause, une série de tweets publiée le 11 juillet.
Les autorités maliennes auraient demandé à Olivier Salgado, dès le 12 juillet, « de fournir les affirmations contenues dans son tweet, ou, dans le cas contraire, de porter la rectification nécessaire ». Demande restée lettre morte. « Le ministère ne saurait passer sous silence ces agissements qui portent atteinte au partenariat avec la Minusma et d’autres partenaires. »
Fil de tweets publiés par Olivier Salgado, porte-parole de la Minusma, le 11 juillet 2022.
« La Minusma prend acte de cette décision qu’elle regrette profondément. La Minusma va continuer la mise en œuvre de son mandat en appui à la paix et à la sécurité au Mali », se borne à réagir un bref communiqué de l’organisation onusienne, publié le 20 juillet.
Voilà qui vient compliquer la tâche pour la médiation du Togo destinée à régler le différend entre le Mali et la Côte d’Ivoire au sujet de ces militaires, arrêtés dès leur arrivée à l’aéroport de Bamako.
Ces militaires sont accusés par les autorités maliennes d’être des « mercenaires ». Réfutant ce terme, la Côte d’Ivoire demande leur libération « sans délai », soulignant que leur présence dans le cadre d’opérations de soutien à la Minusma était « bien connue des autorités maliennes ».
Le ministre togolais des Affaires étrangères, Robert Dussey, a confirmé être au Mali depuis le 18 juillet. Il a été reçu par le président de la transition malienne. Selon un communiqué conjoint, le colonel Assimi Goïta s’est dit « réjoui de l’accompagnement fraternel et sans relâche du Togo » et « a salué l’engagement personnel » du président Faure Gnassingbé « pour la réussite de la transition et le retour à l’ordre constitutionnel au Mali. »
Le président de la transition s’est dit « ouvert au dialogue et disposé à œuvrer, conformément à l’esprit de fraternité et d’excellentes relations entre le Mali et la Côte d’Ivoire, à un dénouement heureux de cette situation, y compris par voie diplomatique, dans le strict respect de la souveraineté du Mali ». C’est pourquoi il souhaite que le Togo poursuive « sa mission de bons offices ».
Les flux financiers reprennent
Le ministre Robert Dussey s’est entretenu avec le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoualye Diop. Lequel aurait « réitéré l’attachement du Mali à la consolidation des relations de bon voisinage et à l’intégration sous-régionale et africaine ». De son côté, Robert Dussey a salué « la convergence de vues entre le Mali et le Togo sur les questions de fraternité et d’intégration ».
Pour sa part, le président de Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara, a remercié son homologue togolais pour « les initiatives prises en faveur de la paix et de la sécurité, et en vue de trouver une solution rapide » à la crise actuelle.
Pourtant, l’heure était à la détente, ces derniers jours. Les institutions financières africaines et internationales, de la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest à la Banque mondiale, ont décidé de lever leur embargo sur leurs affaires avec le Mali. Ainsi, le vice-président de la Banque mondiale, Ousmane Diagana, a-t-il fait savoir le 19 juillet que son institution mettait fin à la suspension des décaissements relatifs aux projets et aux programmes qu’elle finançait. Cette décision « permettra ainsi, dans les plus brefs délais, le déblocage des paiements des entreprises concernées, ainsi que la relance immédiate des activités des projets et programmes ».
@NA