La BAD présente son plan de production alimentaire

Le président Banque africaine de développement, Akinwumi Adesina, a présenté devant les États-Unis, auxquels il réclame un soutien financier, son Plan de production alimentaire d’urgence de 1,5 milliard de dollars. Il favoriserait la production d’aliments nutritifs et aurait un impact de long terme.
Par Aude Darc
La BAD (Banque africaine de développement) mobilise ses partenaires afin d’éviter une crise alimentaire, qui s’annonce imminente en Afrique, en raison de la guerre de la Russie en Ukraine.
S’exprimant en visioconférence depuis Accra, où se préparent les prochaines réunions de la BAD, Akinwumi Adesina a apporté, parmi d’autres invités, son témoignage sur l’insécurité alimentaire mondiale et les impacts persistants de la pandémie de Covid-19, devant une commission des crédits du Sénat américain.
Pour Akinwumi Adesina, cette initiative permettra de « conduire les changements structurels dans l’agriculture, afin de libérer tout le potentiel de l’Afrique pour qu’elle devienne un grenier pour le monde ».
Le sénateur Chris Coons, président de cette commission, a considéré, au cours de cette réunion, que les États-Unis doivent agir rapidement et fournir un financement suffisant. « Nous devrions être inquiets et même alarmés par la crise de sécurité alimentaire croissante que cette guerre provoque pour des centaines de millions de personnes bien au-delà de l’Europe de l’Est. » Sa collègue, la sénatrice Lindsey Graham, a apporté son soutien à la création d’un fonds mondial pour la sécurité alimentaire.
Pour le patron de la BAD, le plan de production alimentaire d’urgence pour l’Afrique permettrait de produire rapidement 38 millions de tonnes de nourriture à travers l’Afrique au cours des deux prochaines années. « La BAD, avec votre soutien, est prête à relever ce nouveau défi et d’autres encore. »
Le plan est axé sur la fourniture de semences certifiées de variétés adaptées au climat à 20 millions d’agriculteurs africains. Avec la perturbation des approvisionnements alimentaires résultant de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, l’Afrique est confrontée à une pénurie d’au moins 30 millions de tonnes métriques de denrées alimentaires, en particulier de blé, de maïs et de soja importés de ces deux pays.
Akinwumi Adesina a précisé que la BAD abonderait pour 1,3 milliard $ dans la mise en œuvre du plan. Il a appelé les États-Unis à combler le déficit de financement. « Avec le soutien des États-Unis pour réduire le déficit de financement de 200 millions $, nous pouvons assurer le succès du Plan africain de production alimentaire d’urgence. »
Des aliments biofortifiés
David Beasley, directeur exécutif du Programme alimentaire mondial, et Tjada D’Oyen McKenna, directrice générale de l’ONG Mercy Corps, ont également apporté leur témoignage.
Pour cette dernière, « toutes les conditions sont réunies pour que s’installe une insécurité alimentaire mondiale accrue, pire, bien pire que les précédentes crises alimentaires de la dernière décennie. » La crise sanitaire et la crise climatique ne font que rendre la situation encore plus délicate.
De son côté, Davis Beasley juge que l’insécurité alimentaire avait déjà commencé à augmenter fortement avant la guerre. Quelque 135 millions de personnes souffraient d’insécurité alimentaire aiguë avant le début de la pandémie. « La Covid-19 est apparue et ce chiffre est passé de 135 millions à 276 millions de personnes menacées de famine. »
Pour Akinwumi Adesina, le plan de production alimentaire qu’il propose favoriserait la production d’aliments nutritifs plutôt que de simples calories. « L’une des choses que nous soutiendrons dans le cadre de ce Plan de production alimentaire d’urgence, ce sont les aliments biofortifiés. Le sorgho enrichi en fer. La supplémentation nutritionnelle est importante », a insisté l’ancien ministre de l’Agriculture du Nigeria.
Qui a souligné que l’institution organisait des réunions avec des entreprises internationales d’engrais pour discuter des moyens de garantir que les agriculteurs africains continuent d’avoir accès à ces intrants. « Si nous ne résolvons pas le problème des engrais, nous ne pourrons pas résoudre le problème alimentaire. »
Enfin, Akinwumi Adesina estime que son plan aurait un impact à long terme sur la productivité alimentaire de l’Afrique. Cette initiative permettra de « conduire les changements structurels dans l’agriculture, afin de libérer tout le potentiel de l’Afrique pour qu’elle devienne un grenier pour le monde ».
Fin avril, le patron de la BAD avait déjà obtenu le soutien des États-Unis, ainsi que celui d’autres partenaires, afin que le Fonds africain de développement puisse lever davantage de capitaux sur les marchés.
Tjada D’Oyen McKenna est directrice générale de Mercy Corps.
@NA