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Art et Culture

Tunis s’oppose à une vente d’objets de son patrimoine

Tunis s’oppose à une vente d’objets de son patrimoine
  • Publiéjuin 3, 2020

Les autorités tunisiennes enquêtent sur la sortie, sans autorisation, de manuscrits et d’objets datant de l’époque beylicale, qui seront mis aux enchères à Paris.

Par Kimberly Adams

Selon certaines sources dans le pays, l’ambassadeur de Tunisie à l’Unesco a rencontré sa directrice, Audrey Azoulay, pour empêcher la vente. La Tunisie a porté plainte contre les personnes qui ont sorti les objets du pays, en violation de l’article 57 du Code du Patrimoine. Toujours selon ces sources, des membres de la famille Djellouli ont affirmé vouloir annuler la vente aux enchères.

Le 11 juin 2020, à 14 heures, devait se tenir à l’hôtel des ventes Drouot, une mise aux enchères de manuscrits des xviiie et xixe siècles, venus de Tunisie. Les autorités tunisiennes enquêtent sur l’origine de cette collection, au sujet de laquelle l’Institut du Patrimoine (INP) soupçonne une sortie illégale du pays fin mars, soit en pleine période de confinement.

« Les autorités tunisiennes doivent faire le nécessaire pour arrêter cette vente, parce que ces objets ont une valeur inestimable et font partie de l’histoire du pays », estime l’Institut national du Patrimoine. 

Selon le catalogue, la vente intitulée « Collection d’un dignitaire tunisien de la cour beylicale ». Soit un « ensemble de documents, ouvrages, souvenirs historiques et garde-robe ayant appartenu à Sidi Lahbib Djellouli (1879-1957), caïd-gouverneur de Kairouan, de Nabeul, et de Beja, puis ministre de la Plume et ministre de la Justice du Bey, conservée par son fils Ahmed Djellouli (1930-2011), puis par descendance et à divers ».

Figurent ainsi plusieurs juz (fragments) du Coran, accompagnés d’une description détaillée sur son contenu et son historique. Parmi elles, une pièce unique : un exemplaire du Coran (Mushaf) de 636 pages ayant appartenu à Mohamed Moncef Bey (1881-1948) puis offert par ce dernier à Sidi Lahbib Djellouli et conservé depuis dans sa descendance directe, indique le catalogue.

Selon l’INP, « les pièces exposées n’appartiennent à aucun musée ou dépôt d’œuvres national ». L’Institut considère qu’il s’agit d’« une collection privée dont la plupart d’entre elles appartenaient à Ahmed Jallouli », décédé en 2011.

On trouve aussi la copie originale d’un ouvrage de référence sur cette dynastie, Ithaf ahl al-zaman bi akhbar muluk Tunis wa ‘ahd el-aman (Présent des hommes de notre temps. Chroniques des rois de Tunis et du pacte fondamental), rédigé par Ahmed Ibn Abi Dhiaf, historien et homme politique tunisien (1804-1874).

L’INP ignore la date précise à laquelle ces pièces ont quitté la Tunisie ; aucune licence à ce sujet n’a été délivrée par le ministère des Affaires culturelles. Ces 114 pièces d’« une grande valeur historique ont été sorties dans la deuxième quinzaine de mars 2020, sans aucune autorisation officielle et en plein confinement dans le pays », s’insurge Faouzi Mahfoudh, le directeur de l’INP. Ces objets n’« appartiennent à aucun musée de l’État » ; il s’agit de « propriétés privées », a-t-il affirmé à l’AFP.

La voie diplomatique

L’INP a, dans un premier temps, alerté les autorités tunisiennes. « Elles doivent faire le nécessaire pour arrêter cette vente, parce que ces objets ont une valeur inestimable et font partie de l’histoire du pays ». Le service tunisien de lutte contre le trafic archéologique a lancé une enquête, le 2 juin, et l’INP déposera « bientôt » une plainte auprès du procureur général de Tunis.

La direction de cet institut a alerté l’ambassadeur de Tunisie à l’Unesco, Ghazi Ghrairi, la Tunisie étant dépourvue d’ambassadeur en France depuis plusieurs mois. « Je ne céderai pas ces objets pour tout l’argent du monde », réaffirme Faouzi Mahfoudh.

Si les démarches entreprises entre la direction de l’INP et l’ambassadeur auprès de l’Unesco n’aboutissent pas, le gouvernement tunisien pourrait décider, par voie diplomatique, de racheter ou de reprendre les pièces concernées. De son côté, l’INP se réserve le droit d’engager des procédures judiciaires.

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Par Kimberly Adams

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