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Analyse et Opinion

Un coût de l’inaction plus élevé dans les pays fragiles

Un coût de l’inaction plus élevé dans les pays fragiles
  • Publiéseptembre 1, 2023

Une série d’études de cas menées par le FMI confirme que les pays les plus fragiles, en matière de gouvernance, de conflits, d’exposition aux risques climatiques, ne peuvent guère faire preuve de résilience face aux phénomènes météorologiques extrêmes.

 

Le changement climatique entraîne des coûts macroéconomiques plus durables dans les pays fragiles, résume une note de blog d’économistes du FMI. Les pertes cumulées des PIB de ces pays-là atteignent environ 4 % dans les trois années qui suivent des phénomènes météorologiques extrêmes. En comparaison, ce chiffre est d’environ 1 % dans les pays plus « résilients ». Les sécheresses dans les pays fragiles devraient faire baisser d’environ 0,2 point de pourcentage la croissance du PIB par habitant chaque année, calcule le FMI, dans une étude qui vient de paraître. L’écart de revenus entre ces pays et les autres continuera donc à se creuser.

Les pouvoirs publics de ces pays peuvent intervenir « de manière décisive », en mobilisant plus de recettes intérieures pour constituer des réserves, en réduisant la dette et les déficits publics, et en accumulant des réserves internationales.

Les événements climatiques ont des répercussions plus graves dans les pays fragiles non seulement parce que ces derniers sont situés dans les zones les plus chaudes de la planète, mais aussi en raison des conflits qui les touchent, de leur dépendance à l’égard de l’agriculture pluviale et d’une capacité plus faible à gérer les risques.

Les conflits empêchent les pays fragiles de bien gérer les risques climatiques. Ainsi, en Somalie, les zones les plus gravement touchées par l’insécurité alimentaire et la faim causées par la sécheresse prolongée de 2021 – 2022 étaient-elles sous le contrôle de groupes terroristes qui ont entravé l’acheminement de l’aide humanitaire.

De surcroît, les chocs climatiques exacerbent les facteurs de fragilité, comme les conflits et la faim, et donc les effets qu’ils ont sur l’économie et le bien-être des populations. Le FMI calcule que le nombre de décès dus aux conflits en pourcentage de la population pourrait augmenter de près de 10 % dans les pays fragiles d’ici à 2060. Dans ces pays, le changement climatique ferait aussi basculer 50 millions de personnes supplémentaires dans la famine à cet horizon.

Les événements climatiques engendrent des pertes plus élevées en raison aussi de la dépendance des pays fragiles à l’égard de l’agriculture pluviale. Seulement 3 % des zones cultivées sont pourvues d’infrastructures d’irrigation comme les canaux ou les réservoirs.

 

Le cas du Mali

« Les exploitations agricoles pluviales sont particulièrement vulnérables aux sécheresses et aux inondations. Lorsque des infrastructures d’irrigation existent, elles sont souvent mal conçues, laissées à l’abandon ou endommagées par les conflits. »

Dans le centre du Mali, par exemple, les inondations le long du fleuve Niger sont en partie dues au fait que les agriculteurs fuient les combats et que les fossés de drainage tombent en ruine. En effet, confirme l’étude, la crise sécuritaire qui sévit depuis 2012 a détérioré les infrastructures du système d’irrigation de l’Office du Niger et a augmenté les risques d’inondation au sein du périmètre. L’Office du Niger est un vaste projet d’irrigation le long du fleuve Niger dans le centre du Mali, qui a été créé dans les années 1930. D’après l’imagerie satellite, on estime qu’environ 30% du périmètre n’a pas été planté en moyenne entre 1999 et 2011 et la part des exploitations non utilisées a augmenté pour atteindre environ 50% entre 2012 et 2021, détaille l’étude. Les pertes de végétation estimées semblent être liées à l’augmentation de l’inondation de la zone, qui a pour effet d’augmenter les coûts de production. Entraînant la détérioration du système de drainage car les agriculteurs ont fui la zone en raison des risques sécuritaires.

Au Soudan, le projet d’irrigation de Gezira couvrait autrefois 8 000 kilomètres carrés de terres agricoles fertiles. Aujourd’hui, faute d’entretien, il ne couvre plus que la moitié de cette superficie.

Enfin, les pertes plus importantes dues aux chocs climatiques tiennent aussi au manque de moyens financiers. Les financements que requiert l’adaptation au climat dépassent largement les ressources propres dont disposent les pays fragiles et touchés par des conflits. C’est pourquoi les partenaires internationaux pour le développement doivent de toute urgence fournir un appui conséquent et durable – à la fois sous forme de financement concessionnel et de développement des capacités – afin d’éviter l’aggravation de la faim et des conflits, susceptibles d’engendrer des déplacements et des migrations forcés.

L’initiative privée ne peut pas tout, observe le FMI. Qui cite en exemple les Plantations et huileries du Congo, l’une des plus grandes et des plus anciennes plantations de palmiers de RD Congo.

 

L’action est possible

Dès les années 1990, cette société étrangère a eu du mal à assurer l’entretien de la plantation, qui a connu un déclin rapide de la superficie de la végétation de palmiers dans les années 2000. Bien que la société ait changé de propriétaire étranger en 2009, puis en 2020, la production d’huile de palme a continué à baisser. L’entreprise a également été confrontée à des questions de gouvernance.

Pourtant, les pouvoirs publics de ces pays peuvent intervenir « de manière décisive » pour faciliter la réaction immédiate aux chocs climatiques, par exemple en mobilisant plus de recettes intérieures pour constituer des réserves, en réduisant la dette et les déficits publics, et en accumulant des réserves internationales.

Selon l’étude du FMI, les pays fragiles qui disposent de cette marge de manœuvre se remettent plus rapidement des événements climatiques extrêmes. Le renforcement des dispositifs de sécurité sociale et le recours aux régimes d’assurance sont également essentiels pour financer la reprise en cas d’événements catastrophiques.

Les pays fragiles doivent également mettre en œuvre des politiques visant à renforcer progressivement la résilience face au changement climatique, notamment en augmentant les investissements dans des infrastructures adaptées.

 

 

@AB

Écrit par
Aude Darc

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