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Analyse et Opinion Opinion

Le changement climatique menace l’agenda de l’Afrique

Le changement climatique menace l’agenda de l’Afrique
  • Publiéjuillet 10, 2023

Les effets du changement climatique sont un obstacle majeur à la réalisation par l’Afrique de ses objectifs de développement durable et de l’Agenda 2063. Aussi faut-il augmenter les investissements dans l’action climatique, ce qui nécessite un engagement politique fort.

 

Alors que l’Afrique se dirige vers la réalisation des ODD (Objectifs de développement durable) et des objectifs de son propre Agenda 2063, la crise climatique et son impact sur le continent se révèlent être un obstacle redoutable.

Une action urgente pour combattre cette menace n’est plus une question de choix mais une nécessité. Malgré ses ressources limitées, l’Afrique a déjà entrepris un travail considérable d’atténuation et de renforcement de la résilience, mais un effort mondial, y compris une contribution à grande échelle des donateurs, est essentiel si l’on veut gagner cette bataille.

La solidarité mondiale dans la lutte contre le changement climatique et dans la mise en œuvre des initiatives clés qui ont été convenues dans le cadre de la Conférence des Nations unies sur le changement climatique est essentielle pour soutenir le développement durable en Afrique.

La série d’événements météorologiques violents et coûteux qui frappent l’Afrique constitue une menace massive pour les progrès durement acquis par les pays africains en matière de développement. Non seulement ces événements détournent des ressources indispensables de projets clés au profit de l’atténuation et du renforcement de la résilience, mais ils ont aussi des répercussions durables sur la vie et les moyens de subsistance des communautés vulnérables, voire sur l’économie de régions entières.

Les événements induits par le climat ont augmenté en fréquence et en intensité, entraînant la perte de vies précieuses, des dommages massifs aux biens et aux infrastructures clés, ainsi que des pertes économiques excessives.

Dans les différentes régions du continent, les catastrophes sont souvent saisonnières et cycliques, et c’est la nature successive de ces événements météorologiques qui paralyse les pays vulnérables. Ces événements exercent une pression extrême sur des gouvernements africains déjà à bout de souffle : ils doivent répondre aux besoins fondamentaux de leur population tout en s’efforçant d’atteindre des objectifs de développement.

Entre-temps, la pression est forte pour que les engagements pris dans le cadre des ODD et de l’Agenda 2063 soient respectés. Les ODD sont officiellement entrés en vigueur il y a près de huit ans, en janvier 2016, pour guider les efforts mondiaux en faveur du développement durable jusqu’en 2030.

Ils sont étroitement alignés sur l’Agenda 2063 de l’Afrique, le plan directeur du continent pour transformer l’Afrique en une puissance mondiale de l’avenir.

 

Plusieurs priorités à mener de front

L’ODD 13 : Action pour le climat, et l’objectif 7 de l’Agenda 2063 : Économies et communautés durables sur le plan environnemental, et Résilientes au changement climatique, sont tous deux spécifiques au changement climatique et reconnaissent la nécessité de mettre l’accent sur l’atténuation, la réponse et l’adaptation.

Plus précisément, l’ODD 13 présente des initiatives visant à renforcer la résilience et les capacités d’adaptation, à intégrer des mesures climatiques dans les politiques et la planification, à renforcer les connaissances et les capacités, à protéger la vie sur terre et à promouvoir des mécanismes permettant d’accroître les capacités de planification et de gestion, tandis que l’objectif 7 de l’Agenda 2063 préconise la conservation de la biodiversité et la gestion durable des ressources, la sécurité de l’eau, la résilience au climat et la préparation aux catastrophes naturelles.

Sans surprise, certains des ODD et de l’Agenda 2063 sont directement ou indirectement affectés par le changement climatique et doivent donc être menés conjointement, et en gardant à l’esprit l’ensemble du contexte. Cela fait de la gestion efficace du climat un moteur essentiel du développement durable.

Les objectifs de développement durable tels que l’éradication de la pauvreté, l’élimination de la faim, la bonne santé et le bien-être, ainsi que les objectifs de l’Agenda 2063, à savoir un niveau de vie élevé, une qualité de vie et un bien-être pour tous les citoyens, des citoyens en bonne santé et bien nourris, et une agriculture moderne pour une productivité et une production accrues, peuvent tous être améliorés grâce à une approche holistique du climat et de la gestion des risques de catastrophe.

 

À l’inverse, les ravages causés par les catastrophes climatiques contribuent massivement à la régression du développement en augmentant la pauvreté, la faim et les épidémies tout en réduisant la productivité agricole et en anéantissant les progrès réalisés en matière de développement.

Au fil des ans, les pays africains ont accompli des progrès considérables dans le renforcement de leurs capacités de réaction au changement climatique en mettant en place des politiques et des organismes clés de gestion des risques de catastrophes afin d’orienter les efforts vers l’anticipation de la crise, mais ces efforts ont également été entravés par des ressources limitées.

Sous la direction de l’UA, le continent a souligné son engagement à renforcer la réponse au changement climatique et a mis en place diverses initiatives pour guider les efforts.

Le programme d’action pour la mise en œuvre du cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe 2015-2030 fournit quatre priorités d’action claires pour prévenir et réduire les risques de catastrophe existants, tandis que la stratégie régionale africaine pour la réduction des risques de catastrophe (RRC) vise à faciliter l’intégration de cette dernière dans le développement.

 

Des chiffres édifiants

Le cadre institutionnel et opérationnel africain pour l’alerte précoce et l’action rapide multirisques et le cadre de relèvement Covid-19 pour l’Afrique 2022-2030 soutiennent la gestion des risques de catastrophe en Afrique.

L’UA a également créé la Capacité africaine de gestion des risques (ARC), dont le mandat est d’aider les États membres à planifier, préparer et répondre aux catastrophes d’origine météorologique et aux épidémies, et de compléter les efforts des pays ; là encore, les ressources financières sont essentielles pour permettre à tous les États membres de l’UA de bénéficier de cet instrument.

Les organisations partenaires des donateurs et les partenaires techniques ont joué un rôle déterminant dans l’opérationnalisation de l’offre ARC, mais davantage de pays doivent encore en bénéficier.

Les statistiques sur le changement climatique confirment que cette crise compromet la capacité de l’Afrique à atteindre les ODD et les objectifs de l’Agenda 2063. Selon la Banque africaine de développement, neuf des dix pays les plus vulnérables au changement climatique se trouvent en Afrique subsaharienne.

 

Ces événements coûtent aux pays entre 7 et 15 milliards $ par an et, si rien n’est fait, la BAD prévient que ces coûts pourraient atteindre 50 milliards $ par an d’ici à 2030.

Une étude commandée par le Programme des Nations unies pour l’environnement estime également que le coût de l’adaptation sera d’environ 50 milliards $ d’ici à 2050 si l’augmentation de la température mondiale ne dépasse pas 2 degrés. La forte dépendance du continent à l’égard de l’agriculture pluviale aggrave ces vulnérabilités.

La solidarité mondiale dans la lutte contre le changement climatique et dans la mise en œuvre des initiatives clés qui ont été convenues dans le cadre de la Conférence des Nations unies sur le changement climatique est essentielle pour soutenir le développement durable en Afrique.

Lors de la COP27, l’Afrique, en tant que continent affecté de manière disproportionnée par le changement climatique, a applaudi la décision d’accorder un financement pour les « pertes et dommages » afin d’aider les efforts de redressement dans les pays qui subissent des impacts climatiques extrêmes, mais cette décision doit encore être mise en œuvre.

Une fois en vigueur, ces initiatives permettront d’ancrer les objectifs des ODD et de l’Agenda 2063 pour les pays vulnérables. D’ici là, il sera quasiment impossible pour ces pays d’atteindre les ODD ou les objectifs de l’Agenda 2063, car chaque avancée en matière de développement est érodée par les pertes et les dommages causés par le climat.

Si les pays africains veulent avoir une chance d’atteindre les ODD et l’Agenda 2063, il faut augmenter les investissements dans l’action climatique, ce qui nécessite un engagement politique fort pour accélérer le rythme de la mise en œuvre.

Compte tenu de la rareté des ressources en Afrique, le continent a besoin d’un soutien pour rendre cela possible. Les atouts d’organisations telles que l’ARC en matière de renforcement des capacités, de planification des mesures d’urgence, de profilage des risques et de transfert des risques doivent être mis à profit dans le cadre de la réponse climatique, compte tenu de l’impact de la gestion du climat sur le développement durable.

 

 

 

 

Ibrahima Cheikh Diong est secrétaire général adjoint des Nations unies et directeur général de la Capacité africaine de gestion des risques (ARC).

 

@NA

Écrit par
Ibrahima Cheikh Diong

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