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Analyse et Opinion

Opinion : Atouts et risques des matières 1ères

  • Publiéjanvier 12, 2018

Les effets du recul des prix des matières ont été très largement surestimés. Les pays africains ont fait preuve de résilience, grâce à leur marché domestique et à une demande externe encore soutenue. Tout risque n’est pas écarté.

Par Christian d’Alayer

Nous disposons aujourd’hui, grâce aux organismes de Washington, d’un tableau assez précis des conséquences de la baisse des prix des matières premières sur les pays exportateurs. On savait déjà que l’impact sur leur croissance économique avait été modeste, de l’ordre d’un point à 1,5 point perdu.

Les tableaux qui suivent montrent sans aucune équivoque que cette baisse n’a pas eu de conséquence non plus sur leurs recettes en valeur : En dehors de l’Afrique du Nord, toutes les régions exportatrices et comptant beaucoup sur ces exportations pour leur croissance ont vu leurs chiffres augmenter entre 2009-2010 et 2014-2015.

Le constat va plus loin car on aurait pu en effet imaginer que les pays vraiment dépendants de ces exportations de matières premières enregistreraient une baisse de leurs recettes. Ce n’est même pas le cas comme on peut le voir pour l’Afrique centrale, dépendante à 97 % en 2009-2010 comme en 2014-2015. Idem pour l’Afrique de l’Ouest et encore plus pour l’Afrique de l’Est où la dépendance a augmenté entre les deux périodes !

Les choses se passent comme si la crise occidentale n’avait pas eu lieu et que les prix des matières premières n’avaient pas diminué.

La demande reste soutenue

Bien sûr, beaucoup de pays, notam­ment en Asie, ne sont plus vraiment dépendants de leurs exportations de matières premières.

Bien sûr, les économies de l’ensemble des pays les moins avancés ne reposent pas exclusivement sur la production et l’exportation de «produits tropicaux». Pourtant, rappelons-le une fois encore, ces pays sont d’abord des marchés, composés de consommateurs et de plus en plus de producteurs locaux, à défaut d’investisseurs étrangers.

Aller plus loin dans les explications sans autres éléments relève de la conjec­ture. On peut toutefois estimer que, face à des prix en berne, les exportateurs ont compensé par un accroissement des volumes exportés.

Après tout, la demande mondiale de pétrole n’a jamais cessé d’augmenter (95 millions de barils/ jour aujourd’hui contre 85 millions en 2009) ; les pays producteurs ont volontai­rement limité leurs exportations depuis deux ans afin de faire remonter les prix.

Les Chinois, de même, ont entretenu un prix élevé de l’or en constituant d’énormes réserves dans le cadre de leur politique monétaire internationaliste. Le bois a retrouvé le sourire, poussant les promoteurs immobiliers à offrir, grâce à lui, des constructions moins coûteuses pouvant en outre être présen­tées comme plus écologiques.

Le monde entier aujourd’hui s’adonne au chocolat, empêchant les prix de retomber dans leurs errements des années 1980-1990.

La crise n’est visiblement pas mondiale mais occidentale, dans un Occident qui, en outre, a continué à croître, certes faiblement. Avec donc des achats de matières premières également en croissance même si ses achats ne font plus l’alpha et l’oméga du marché mondial.

Le risque vient d’Occident

De plus, on peut envisager que la perception de la crise ait excédé sa réalité en Occident : dans le même temps, de nombreux emplois ont continué à y être perdus, surtout en Europe. Où, il est vrai, l’endettement public a forcé les États à réduire leurs dépenses et à augmenter leurs recettes par les impôts, au détriment de la consom­mation des particuliers.

Aux États-Unis, outre une dette publique pour l’instant couverte par l’universalité du dollar, les particuliers se sont très lourdement endettés. Et, au final, on a un Occident qui vit au-dessus de ses moyens et sur lequel plane le risque d’une nouvelle crise systémique.

Dont le déclenchement pourrait alors coûter plus cher aux pays exportateurs de matières premières, sous forme cette fois-ci d’une baisse plus sévère de la demande. Paradoxale­ment, l’Occident retrouverait alors une importance majeure. Mais en creux ! L’importance d’un marché dont la crise impacterait alors et réellement l’éco­nomie mondiale.

On n’en est toutefois pas encore là, sachant que la question est surveillée par les experts comme le lait sur le feu. Certains d’entre eux deviennent assez nerveux actuellement, surtout en Bourse où les valeurs des grandes entreprises atteignent des sommets qui n’ont plus rien à voir avec leur rentabilité. L’envolée des monnaies scripturales privées comme le bitcoin accroît cette nervosité qui, ces derniers temps, s’est répercutée sur l’ensemble des valeurs dites « refuge ».

Si le passé a donc été grandement exagéré, preuves à l’appui, l’avenir reste incertain. Le dénouement des tensions actuelles repose sur quelques phéno­mènes bien répertoriés par les banques centrales, comme l’avenir du dollar.

La Chine a commencé à payer un peu de son pétrole en yuan qui, aujourd’hui, fait partie du panier de devises des droits de tirage spéciaux (DTS) du FMI. Le mouvement peut s’amplifier si les vendeurs perdent confiance dans la monnaie américaine. Mais a priori, le mouvement devrait croître lente­ment, pas brutalement, d’autant que les marchés de matières premières sont américains, Chicago notamment.

Deux, l’éclatement des bulles spéculatives : il n’existe pas de hausses abusives qui n’aient été suivies de baisses specta­culaires. Les experts n’en sont plus à se demander « si », mais « quoi » et « quand ».

Le scénario le moins mauvais serait l’éclatement de la bulle boursière, la baisse des actions « gommant », les excès de fabri­cation monétaire de ces dernières années (le crédit à tout-va et les taux proches de zéro).

Le pire serait une remontée brutale des taux d’intérêt entraînant alors et la défaillance de nombreux États occiden­taux, donc la ruine de pas mal de leurs créanciers (banques, assurances, fonds d’investissement), donc des particuliers qui ont investi massivement en assurances vie.

Le crédit n’étant plus bon marché, la bulle immobilière s’effon­drerait également et, globalement, la demande occidentale pourrait diminuer durablement : l’Occident ne serait plus en faible croissance mais en récession assez prononcée.

Pour l’instant, les politiques concertées au niveau mondial visent à rééquilibrer très lentement les marchés obligataires et d’actions. Se traduisant par une remontée très légère et très lente des taux d’intérêt.

Tout en cherchant à éviter par tous les moyens des incidents graves en Bourse. Et il semble que les Chinois ne veuillent pas non plus « casser la baraque », l’Occident restant leur premier client à l’exportation tandis que leurs avoirs en dollars et en euros sont trop importants pour qu’ils acceptent de les voir fondre à la chaleur intense d’une crise systémique. Les Africains, eux, ne peuvent que croiser les doigts !

Écrit par
ade

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