Les PPP comme moteur de l’émancipation du Congo, par Joël Rault

La République du Congo se dote d’un ministère de la Promotion du partenariat public privé. Une initiative qui sous-tend un nouveau cadre législatif et réglementaire susceptible de favoriser les projets en cours et à venir.
Par Joël Rault*
La tâche n’est pas aisée et le chemin sera long et parsemé d’embuches. La création d’un ministère de la Coopération internationale et de la promotion du partenariat public-privé démontre la volonté de la République du Congo d’utiliser les investissements générés par les PPP comme moteur de son développement.
Il est essentiel d’appréhender les investissements directs étrangers de façon globale en s’attardant à la fois sur le régime juridique encadrant les PPP et la manière de réaliser du business, au sens le plus large, avant de procéder à la promotion de ce nouveau portefeuille.
Une fois les réformes juridiques et administratives menées, le produit sera suffisamment bien emballé pour que débute enfin la promotion des PPP dans le pays. La promotion des investissements requerra aussi un certain savoir-faire et une technicité destinés à créer l’environnement de confiance.
Différents projets attendent impatiemment d’être évalués, sécurisés et lancés ; cependant, il est primordial que les étapes ne soient pas brûlées dans l’établissement, la promotion et la réalisation de ces futurs partenariats. Mettre la charrue avant les bœufs pourrait compromettre la réussite de cet énorme chantier susceptible de changer la face du Congo.
Le constat est que les acteurs privés ne se retrouvent pas dans un environnement nécessairement propice à l’investissement car la réglementation existante est malheureusement non consolidée, incomplète, imprécise, parfois conflictuelle et les diverses administrations exercent des responsabilités mal définies.
La création d’un ministère dédié aux PPP favorise l’esprit d’un Guichet et certains investissements sont susceptibles de revenir, grâce au contournement des limites juridiques, pratiques et institutionnelles notées dans les expériences passées.
Pour la bonne opérationnalisation des PPP, il faudra, au préalable, créer un nouveau cadre juridique sécurisé mais suffisamment flexible et innovant, afin d’attirer et conserver les investisseurs locaux ou étrangers, premiers créateurs de richesses et d’emplois. La régulation et l’audit périodiques durant l’exécution des contrats de PPP devront être professionnalisés pour assurer la pérennité et la soutenabilité des différents projets.
De l’intérêt d’un nouveau cadre législatif
Comme les PPP sont généralement atypiques et souvent dynamiques, des consultations permanentes avec tous les acteurs intéressés de près ou de loin par les PPP devront être menées ; il s’agit, d’une part, de répondre aux attentes du marché et, d’autre part, de les réconcilier avec les attentes politiques et sociales de la population congolaise. La gestion du « contenu local » sera certainement un des axes prioritaires du ministre.
Le champ d’application des PPP est variable. En effet, il peut inclure ou exclure les offres d’initiatives privées ou certains secteurs particuliers. Afin de ne pas surcharger et asphyxier le ministère dans les premiers temps, il serait judicieux de concentrer les actions sur les projets complexes rendant l’autorité contractante incapable de l’assumer seule et sur les projets où il est manifeste que l’utilisation des contrats de PPP sont plus pertinents que les contrats publics de droit commun.
Un nouveau cadre législatif permettrait aussi de préciser les dispositions permettant d’apprécier la nature des services requis, le calendrier nécessaire à la réalisation des objectifs, l’emploi de ressources congolaises et les engagements de performance, notions dépassant largement les seuls critères liés aux durées d’amortissement et des modes de financement généralement retenus. Un contrôle a priori des projets permet de s’assurer de leur adéquation par rapport aux politiques économiques du pays et rester dans la vision de l’Exécutif.
En ce sens, l’instauration d’un comité technique, composé d’experts multisectoriels serait bénéfique pour accompagner toutes les autorités contractantes, de l’État jusqu’aux entités publiques en passant par les collectivités territoriales. Il est essentiel qu’un soutien soit donné aux autorités contractantes dans la négociation, la préparation, la conception des projets et dans la structuration du financement.
Il est aussi clair que des mécanismes transparents sont plus à même d’attirer les investisseurs et il sera impératif de définir les cadres inspirant la bonne gouvernance. Les rule-based mechanisms peuvent parfois apporter une rigidité contre-productive mais ils peuvent aussi être d’une grande aide si intelligemment utilisés. Le climat des affaires et le ease of doing business devraient être une priorité car ils conditionnent le succès de ce ministère.
La gestion du contenu local et le transfert de compétences
Les PPP conclus avec des entités étrangères ont trop souvent peu de répercussions sur le tissu local et sur l’emploi en particulier.
Les entreprises étrangères parties prenantes des PPP devront intégrer dans leurs processus de production des entreprises, de la main-d’œuvre, des matériaux, biens et services issus du Congo.
Il est crucial de profiter de l’engouement que peut créer ce nouveau ministère pour intégrer et professionnaliser le secteur privé congolais en s’assurant qu’un transfert systématique de technologie et de compétences s’opère dans tous les PPP.
Un transfert de technologie permet de professionnaliser et de diversifier les atouts des entreprises congolaises et le transfert de compétence, à travers une formation systématique, permet de valoriser et d’émanciper la population pour qu’elle se construise un socle nécessaire à son émancipation. L’investissement dans la formation des travailleurs locaux, notamment via des partenariats avec les institutions locales renforcera l’expertise.
Une fois les réformes juridiques et administratives menées, le produit sera suffisamment bien emballé pour que débute enfin la promotion des PPP dans le pays. La promotion des investissements requerra aussi un certain savoir-faire et une technicité destinés à créer l’environnement de confiance.
Promouvoir l’investissement au Congo n’est certainement pas la mission la plus simple qui soit, mais compte tenu du potentiel indiscutable du pays, les bonnes réformes et les bons signaux peuvent rapidement recréer le dynamisme attendu.
@Président du cabinet de conseil Hermès Advisory et Senior Advisor au cabinet d’avocats Franklin, ancien ambassadeur de Maurice.