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African Business Analyse et Opinion

Opinion : L’avenir se joue en Afrique, le Maroc l’a compris

  • Publiéjuin 29, 2017

Le Maroc souhaite intégrer la Cedeao. Au-delà des obstacles juridiques, cette ambition témoigne du potentiel d’une coopération entre le pays, qui devra adapter son économie, et ses partenaires.

Par Laurent Bossard, directeur, et Julia Wanjiru, Secrétariat du Club du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest (CSAO-OCDE)

Même s’il ne remet pas en question le caractère stratégique de ses relations avec l’Europe, le Maroc se tourne davantage vers ses voisins au sud du Sahara, comme en témoigne sa demande d’adhésion à la Cedeao (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest), en février dernier.

Quelques semaines après le retour du Maroc dans l’Union africaine en janvier, cette nouvelle démarche n’est pas surprenante. Elle s’inscrit dans la stratégie africaine du Royaume, qui place désormais le continent au coeur de sa diplomatie internationale, en cherchant à réaffirmer son identité africaine et à promouvoir les vertus de la coopération Sud-Sud et de la coopération triangulaire.

Sous l’impulsion de Mohammed VI, l’« opération séduction » dirigée vers le continent africain est en marche : visites officielles régulières, signature de près d’un millier d’accords de coopération, échanges et bourses universitaires, etc.

Le Maroc est devenu le premier investisseur africain en Afrique de l’Ouest et le deuxième en Afrique. Peu importe l’issue de sa candidature à la Cedeao : qu’il soit membre à part entière ou partenaire privilégié de l’organisation ouest-africaine, le Maroc est de fait un acteur clé du processus d’intégration régionale.

Le 4 juin 2017, les chefs d’État et de gouvernement de Cedeao trancheront sur la demande d’adhésion du Maroc, et sur celles de la Tunisie et du Tchad ; la Mauri­tanie, ancien membre de la Commu­nauté, vient, à leur suite, de soumettre sa candidature.

Où situer le Maroc ?

Chaque demande relève d’un agenda propre à chaque pays. Pour le Maroc, l’objectif officiel est de stimuler le décollage économique de l’Afrique. Le Royaume souhaite ainsi « couronner les liens forts aux niveaux politique, humain, historique, religieux et économique avec les pays membres de la Cedeao » et trouver une alternative à l’Union du Maghreb arabe (UMA), immobilisée depuis des décennies du fait du contentieux sahraoui opposant le royaume chérifien à l’Algérie.

Mieux que ne le font les accords de coopération et d’échanges, l’adhésion à la Cedeao offrirait aux entreprises marocaines un accès direct à un marché de 360 millions de consommateurs, au PIB régional de 1 500 milliards de dollars.

Si le Maroc soutient qu’il remplit la totalité des critères d’adhésion à la Cedeao, une lecture du Traité révisé de la Cedeao de 1993 met en lumière une importante question.

Le traité stipule que «la zone géographique correspondant à l’Afrique de l’Ouest » s’aligne sur la défini­tion de l’Union africaine, qui répartit le continent en cinq blocs régionaux ; selon cette définition, l’Afrique de l’Ouest se compose de seize pays, à savoir les 15 pays membres actuels de la Cedeao plus la Mauritanie.

L’élargissement à une autre zone géographique implique donc un amendement des traités fondateurs et met en question le découpage régional retenu par l’Union africaine. Il pose également le problème de la continuité territoriale, le Maroc n’étant frontalier d’aucun pays membre de la Cedeao.

Le rapprochement est utile avec les pays du Sahel. Historiquement, le Maroc et l’Afrique au sud du Sahara ont toujours entretenu des liens forts, tissés à travers le commerce transsaharien et facilités par un héritage culturel, linguistique et religieux commun.

Sur le plan géopolitique et sécuri­taire, le Maroc joue un rôle actif dans les missions de maintien de la paix de l’Union africaine et dans la promotion d’un espace nord-ouest africain comme espace de stabi­lité et développement.

La menace djihadiste dans la bande saharo-sahélienne constitue une menace pour le Maroc également. De ce point de vue, un rapprochement avec les pays sahéliens et notamment le G5 Sahel, pourrait être utile ; à condition qu’il ne se heurte pas à l’Algérie qui depuis des décennies, joue un rôle géopolitique central dans la résolu­tion des conflits au Mali.

La démarche marocaine marque avant tout la poursuite de sa projec­tion économique en Afrique. Depuis de nombreuses années, le Royaume a activement impliqué ses entreprises publiques dans la mise en oeuvre de projets de développement dans les pays africains.

Il a également accompagné l’implantation des opérateurs privés, notamment dans le secteur des services. À titre d’exemple, Attijariwafa bank et la BMCE sont aujourd’hui présentes dans la quasi-totalité des pays ouest-africains.

L’opérateur Maroc Telecom s’y est progressivement imposé et les projets immobiliers financés par le Maroc sont en pleine croissance. Le Royaume est ainsi devenu le premier investisseur africain en Afrique de l’Ouest ; le tissu entrepre­neurial marocain est aujourd’hui bien enraciné en Afrique et continue à monter en puissance.

Écrit par
African Business french

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