Les risques et les opportunités de la législation européenne

Les pays africains qui exportent vers l’Europe devront s’adapter à la nouvelle législation de l’Union européenne en matière d’émissions carbone. Certains exploitants miniers trouveront néanmoins des opportunités commerciales et des débouchés.
L’Union européenne a adopté le « Green Deal », un pacte vert qui rassemble quatorze lois, votées dans l’optique d’une réduction des émissions nettes de gaz à effet de serre de 55% d’ici 2030 et d’une neutralité carbone en 2050. Trois types de mesures pourraient avoir des effets significatifs sur les pays exportant vers l’Europe, pointe une analyse de GSA (Global Sovereign Advisory).
Les principaux exportateurs de graphite vers l’UE sont également les principaux exportateurs mondiaux. Après la Chine qui concentre 80% de la production de graphite, le Mozambique et Madagascar se partagent le podium des exportations mondiales du minerai.
Premièrement, le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), qui concerne sept produits : l’aluminium, le ciment, l’hydrogène, les engrais, l’électricité, le fer et l’acier. Dès 2026, les importations de ces matières premières seront taxées en fonction de leurs émissions carbones. Parmi les pays africains les plus concernés par cette mesure, figure le Mozambique, puis, dans une moindre mesure, l’Égypte et le Maroc. L’importance de l’industrie du phosphate dans les exportations totales du pays est une des raisons pour lesquelles le Maroc est exposé au MACF. Les plans de transition vers un modèle de production bas-carbone, tels que le programme d’investissement 2023-2027 de l’OCP et sa « 2040 Zero Carbon Vision », pourraient permettre à l’industrie de conserver son avantage concurrentiel à la suite de l’application du mécanisme, jugent les analystes.
Deuxièmement, le Green Deal prévoit aussi l’interdiction par l’UE des importations de produits issus de la déforestation. La Côte d’Ivoire ressort de loin comme le pays le plus exposé à ce risque, suivie du Ghana, de l’Ouganda, du Burundi, de l’Ethiopie.
Quelles conséquences des lois européennes sur la déforestation ?
Troisièmement, le Green Deal offre des opportunités pour les pays commerçant beaucoup avec l’UE, notamment dans le cadre du Critical Raw Materials Act. Ce dernier vise à garantir un approvisionnement sûr et durable en matières premières stratégiques pour atteindre les objectifs du Green Deal. « Madagascar, le Mozambique et le Maroc semblent aujourd’hui bien positionnés pour profiter de l’augmentation à venir de la demande en provenance d’Europe, en particulier de cobalt et de graphite qui sont les deux métaux qui contribuent le plus à cette croissance attendue », jugent les analystes.
La place de la RD Congo dans le cobalt
L’industrie des voitures électriques contribue à hauteur de 89% à l’augmentation de la demande mondiale en cobalt. Or, Madagascar est le quatrième exportateur de cobalt et de graphite vers l’UE ; les minerais (comme le nickel, premier produit d’exportation du pays) jouent un rôle important dans l’économie malgache. Le complexe minier Ambatovy concentre la production de nickel et de cobalt du pays.

De son côté, le Maroc ne possède qu’une seule mine de production de cobalt, la mine de Bou Azzer qui permet cependant au pays de se hisser au classement des premiers exportateurs mondiaux, d’autant plus qu’il est des rares sur le continent en mesure de raffiner le minerai.
Toutefois, observe GSA, les ressources du Maroc et de Madagascar restent minimes face à celles de la RD Congo qui abrite plus de 70% des approvisionnements mondiaux de cobalt. Cela étant, près de 90% des ressources de cobalt de la RD Congo sont envoyées vers la Chine qui a un monopole sur le raffinage de plusieurs matériaux critiques. Alors que le Maroc voit ses réserves diminuer, le pays parie sur la production de cobalt à partir de matériaux recyclés avec la signature d’un partenariat avec les sociétés anglo-suisse Glencore PLC et marocaine avec Managem. Le partenariat signé pour une durée de cinq ans pourrait ensuite s’étendre au nickel et au lithium recyclés.
Les principaux exportateurs de graphite vers l’UE sont également les principaux exportateurs mondiaux. Après la Chine qui concentre 80% de la production de graphite, le Mozambique et Madagascar se partagent le podium des exportations mondiales du minerai. Mais d’ici 2026, l’Afrique pourrait devenir le premier exportateur et producteur de graphite. À Madagascar, le groupe Evion poursuit des études de faisabilité pour son projet minier de graphite et voit l’île comme une alternative à la Chine.
Le britannique Tirupati Graphite implantée à Madagascar a multiplié sa production par 10 en l’espace de trois ans. Idem au Mozambique, le pays misant sur la production de graphite pour l’avenir. Attention, préviennent les analystes en guise de conclusion, « la forte augmentation de la production risque de fragiliser les populations et les écosystèmes des régions ».
LS, d’après étude de GSA
@AB