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Les réseaux sociaux, de sérieux concurrents dans le commerce en ligne

Les réseaux sociaux, de sérieux concurrents dans le commerce en ligne
  • Publiémai 19, 2023

Les PME africaines choisissent de plus en plus les médias sociaux pour réaliser des opérations commerce en ligne, exerçant une forte pression concurrentielle sur les plateformes de commerce électronique spécialisées.

 

Les entreprises de médias sociaux ont eu leur lot de critiques en Afrique, mais selon un nouveau rapport, elles aident des milliers de petites entreprises africaines à prospérer.

Réalisée par la GSMA, une organisation industrielle à qui représente les intérêts des opérateurs de réseaux mobiles dans le monde entier, l’étude révèle que les médias sociaux deviennent progressivement le principal mode de commerce électronique pour une grande partie des micro, petites et moyennes entreprises (MPME). L’étude porte sur six pays africains : Nigeria, Kenya, Éthiopie, Ghana, Afrique du Sud et Égypte.

L’une des façons d’envisager le marché africain du commerce électronique est de développer des modèles plus communicatifs et plus proches des médias sociaux, et d’imiter ce qui se passe déjà pour de nombreux consommateurs africains sur les marchés informels.

Le rapport, auquel African Business a eu accès en exclusivité, révèle que 60 % des microentreprises, 49 % des petites entreprises et 33 % des moyennes entreprises de l’échantillon s’appuient uniquement sur les médias sociaux pour leurs besoins en matière de commerce électronique.

Meta – la société mère de Facebook, WhatsApp et Instagram – est le leader incontesté du commerce social sur tous les marchés, à l’exception de l’Éthiopie, où Telegram, une plateforme enregistrée dans les îles Vierges britanniques et dont le siège se trouve à Dubaï, détient 95 % des parts de marché.

La popularité des plateformes de médias sociaux telles que Facebook et WhatsApp est presque parfaitement alignée sur celle des abonnements et de l’utilisation de l’Internet, qui ont tous deux doublé sur le continent au cours de la dernière décennie.

La technologie continuant à essaimer la région, il est probable que davantage de MPME commenceront à adopter les médias sociaux comme principal mode de commerce électronique. Voilà qui exerce une pression concurrentielle accrue sur les plateformes de commerce électronique spécialisées.

« Les médias sociaux sont l’outil le plus accessible pour commercialiser vos produits sans avoir besoin d’un niveau élevé de culture numérique, de formation ou de processus d’enregistrement », explique Nigham Shahid, senior insights manager de GSMA. « Les gens utilisaient déjà les médias sociaux pour communiquer entre eux, ils les ont donc simplement ajoutés comme première étape de leurs ventes sans investissement supplémentaire. »

 

L’inclusion financière, clé du commerce électronique

En revanche, les plateformes de commerce électronique en Afrique, telles que Jumia, s’adressent principalement à une base d’utilisateurs urbains et bancarisés, qui ne représente qu’une petite partie de la population d’Afrique subsaharienne.

« Les plateformes comme Jumia ne font que gratter la surface, et les arrangements basés sur les médias sociaux comblent un vide », juge Daniele Tricarico, responsable de la recherche à la GSMA. « L’informalité, la messagerie sociale et le paiement à la livraison rendent les médias sociaux populaires en tant que plateformes de commerce électronique, même si ce n’est pas leur fonction première. »

La grande valeur accordée aux relations personnelles dans de nombreux pays du continent est un signal d’alarme pour les modèles commerciaux de type Amazon. Juste après la préférence pour l’argent liquide, la troisième raison la plus souvent citée pour expliquer l’insatisfaction des clients est qu’ils préfèrent interagir avec le commerçant.

L’Afrique du Sud est le seul pays étudié dans lequel les MPME font davantage appel à des places de marché de commerce électronique spécifiques qu’au commerce électronique via les médias sociaux.

En Égypte, troisième économie d’Afrique, seulement 6 % des MPME utilisent des plateformes de commerce électronique. L’Égypte et l’Afrique du Sud ont des niveaux similaires de culture numérique et des écosystèmes numériques florissants, les start-up égyptiennes ont d’ailleurs davantage de capitaux en 2022 (823 millions de dollars) que les sud-africaines (555 millions $).

La différence dans leur utilisation des plateformes de commerce électronique réside dans les préférences de paiement, explique Daniele Tricarico : « Le consommateur moyen en Afrique du Sud est beaucoup plus habitué à payer en ligne, alors qu’en Égypte, les paiements en espèces dominent. »

 

Méfiance à l’égard du commerce électronique

Selon la Banque mondiale, 26 % des Égyptiens âgés de plus de quatorze ans disposaient d’un compte bancaire en 2021. En Afrique du Sud, ce chiffre triple pour atteindre 84 %. Une population présentant un niveau élevé d’inclusion financière semble donc être une condition préalable à la réussite d’une plateforme de commerce électronique.

Il existe toutefois d’autres obstacles majeurs à l’augmentation des transactions en ligne, que ce soit par l’intermédiaire des médias sociaux ou de plateformes spécialisées.

Toucher de nouveaux clients, accroître le chiffre d’affaires et faciliter les affaires sont les trois principales motivations des MPME pour se lancer dans le commerce en ligne (Étude GSMA).
Toucher de nouveaux clients, accroître le chiffre d’affaires et faciliter les affaires sont les trois principales motivations des MPME pour se lancer dans le commerce en ligne (étude GSMA).

 

Les fournisseurs d’argent mobile et les jeunes entreprises de commerce électronique ont du mal à introduire l’argent mobile sur les plateformes de commerce électronique, car les entreprises de toutes tailles, selon la GSMA, préfèrent toujours utiliser le paiement à la livraison pour les paiements.

Et ce, bien que l’argent mobile soit largement utilisé dans toute l’Afrique subsaharienne pour les transactions personnelles. En Afrique de l’Est, la GSMA compte environ 300 millions de comptes enregistrés pour une population de 477 millions d’habitants.

Pour autant, les clients sont réticents à effectuer des transactions sur les plateformes de commerce électronique, en raison d’une grande méfiance à l’égard de la protection des données personnelles et des fonds des clients, indique le rapport.

« Je l’explique par l’écosystème actuel, la prévalence des médias sociaux et le fait que l’on ne peut pas être sûr d’être en présence d’un vendeur authentique », analyse Daniele Tricarico. « C’est un problème lié à la façon dont le commerce électronique est structuré plutôt qu’à l’argent mobile lui-même, qui est généralement fiable. »

Cela ne veut pas dire que l’argent mobile n’est pas utilisé. Les gens ont tendance à utiliser les médias sociaux pour trouver ce qu’ils veulent, puis à payer avec leur téléphone portable en direct avec le revendeur.

Dans un entretien accordé à la radio belge RTBF, l’écrivain sénégalais Felwine Sarr expliquait que, dans son pays, l’interaction économique mettait l’accent sur la relation, via la négociation sur le prix et les discussions, avant l’échange quantitatif. « Nous créons un capital confiance ; c’est une façon de ne pas faire passer l’acte économique avant l’échange social. »

La réflexion de Felwine Sarr éclaire la dynamique des places de marché en Afrique et la manière dont les nouvelles entreprises de commerce électronique pourraient avoir un impact positif.

Dès lors, les plateformes de commerce électronique peuvent-elles suivre ?

Selon l’enquête de la GSMA, l’accès à de nouveaux clients, l’augmentation des revenus et l’amélioration de la facilité de faire des affaires ont tous été cités de manière cohérente comme des raisons de commencer à vendre en ligne, toutes entreprises confondues.

Dans ce domaine, les plateformes établies peuvent avoir l’avantage. Facebook, Telegram ou TikTok n’ont pas été conçues à l’origine pour vendre des marchandises et présentent donc de nombreuses lacunes lorsqu’il s’agit de les utiliser à des fins commerciales.

L’une des façons d’envisager le marché africain du commerce électronique est donc de développer des modèles plus communicatifs et plus proches des médias sociaux, et d’imiter ce qui se passe déjà pour de nombreux consommateurs africains sur les marchés informels. Un défi de taille pour les entrepreneurs du commerce électronique.

Article complet en anglais sur le site African Business.

@AB

 

Écrit par
Leo Komminoth

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