L’énergie renouvelable : chacun son rythme

Le potentiel des énergies renouvelables est immense. Toutefois, les pays en développement ne peuvent pas s’y engager à marche forcée pour le long terme, en oubliant les besoins énergétiques du présent, prévient la Chambre africaine de l’énergie.
Il ne fait aucun doute que les énergies renouvelables auront un avenir dans nos systèmes énergétiques en Afrique, considère NJ Ayuk, président exécutif de la Chambre africaine de l’énergie. Lequel juge cette « perspective passionnante », en présentation du rapport trimestriel de ce groupement d’intérêts de l’industrie pétrolière et gazière.
Et d’envisager des maisons entièrement alimentées par le soleil et des voitures à combustion propre sans aucune émission. Toutefois, dans de nombreuses régions d’Afrique, ces technologies vertes ressemblent davantage à des voitures volantes. En d’autres termes, « elles ne seront pas à notre portée avant très, très longtemps ! »
« Dans l’intérêt de sa population, l’Afrique doit pouvoir développer des énergies durables à un rythme qui n’entrave pas davantage le niveau de vie, en parallèle avec le pétrole et le gaz », résume NJ Ayuk.
Lorsqu’il s’agit de s’appuyer sur les énergies renouvelables, une grande partie du continent n’en est tout simplement pas encore là… loin s’en faut. En fait, le constat est connu : 43 % de notre population totale n’a toujours pas d’accès fiable à l’électricité, quelle qu’elle soit. Cela représente plus de 600 millions de personnes.

C’est d’ailleurs pourquoi la CAE poursuit son travail de lobbyiste en faveur de la poursuite de la production de pétrole et de gaz sur notre continent. Certes, les énergies renouvelables peuvent contribuer à fournir plus d’énergie, mais elles ne peuvent pas le faire seules. « Alors que l’Afrique continue de subir la pression des pays occidentaux et des défenseurs de l’environnement qui veulent que notre continent passe immédiatement des combustibles fossiles aux énergies renouvelables, ces appels ne sont pas fondés sur la réalité », considère NJ Ayuk.
Pour ceux qui souhaitent voir l’Afrique passer immédiatement des combustibles fossiles aux énergies renouvelables (solaire, éolienne et solutions d’électrolyse à hydrogène), le pronostic actuel peut être quelque peu décourageant. Comparée aux capacités sans cesse croissantes de l’Asie, de l’Europe et de l’Amérique du Nord, la production de technologies vertes de l’Afrique reste « minuscule », juge le rapport.
L’Asie, l’Europe et les États-Unis stimulent la capacité
La croissance des capacités en Asie, en Europe et aux États-Unis est, sans surprise, à l’origine de la majeure partie de la croissance des énergies durables dans le monde. Ensemble, ces trois régions représentent actuellement plus de 90 % de la capacité mondiale : Asie, 755 gigawatts (GW) ; Europe, 330 GW ; et États-Unis, 260 GW.
Ces statistiques permettent de comprendre pourquoi un si grand nombre des gouvernants de ces pays plaident pour des politiques austères de consommation nette zéro.
« Lorsque vous êtes en mesure de produire de tels volumes d’énergies renouvelables et que votre infrastructure est capable de convertir ces énergies renouvelables en énergie pour la majeure partie de votre population, il est logique que vous souteniez des idéaux immédiats de net-zéro », résume NJ Ayuk. Qui considère que l’Afrique est « sur une voie complètement différente ».
La capacité totale annoncée des énergies renouvelables en Afrique est d’environ 385 GW, calcule la CAE. Sachant que la majorité de la capacité totale annoncée du continent en matière d’énergies renouvelables est encore en phase de conception. Moins de 6 % sont actuellement en service : la capacité actuelle réelle pour 2023 ressortirait à environ 21,5 GW.
Le rapport prévoit une croissance de l’espace africain des énergies renouvelables, qui atteindra 260 GW d’ici à 2035. D’après les chiffres, cette croissance peut sembler impressionnante. Mais elle ne représente que 7 % des capacités mondiales. À titre de comparaison, la capacité mondiale actuelle en matière d’énergies renouvelables est d’environ 1 500 GW. D’ici 2035, ce chiffre devrait atteindre 3 935 GW.
Ainsi, la capacité mondiale d’énergie solaire en 2023 serait-elle de 575 GW, mais l’Afrique ne devrait y contribuer qu’à hauteur de 9,75 GW. La capacité solaire mondiale devrait atteindre 1 320 GW d’ici 2030 et plus de 1 570 GW d’ici 2035. Les capacités photovoltaïques de l’Afrique ne devraient augmenter que marginalement, à 18,2 GW, au cours des deux prochaines années.
En ce qui concerne l’énergie éolienne, la capacité mondiale actuelle est d’environ 910 GW. L’Afrique ne devrait y contribuer qu’à hauteur de 8,75 GW. Nous prévoyons une augmentation de la capacité éolienne mondiale à 1 610 GW d’ici 2030 et à plus de 1 945 GW d’ici 2035. Dans le même temps, la capacité éolienne terrestre de l’Afrique ne devrait augmenter que de 14,5 GW d’ici 2025.
« Le seul véritable point positif est l’hydrogène, dont les niveaux d’activité élevés continuent de stimuler la capacité », concède NJ Ayuk. Qui ajoute : « Malheureusement, ces niveaux élevés d’activité sont concentrés dans quelques pays seulement. »
Nulle raison d’être pessimiste. L’écart entre la capacité africaine en matière d’énergies renouvelables et la capacité mondiale signifie que nous avons un grand potentiel pour gagner du terrain. « Toutefois, nous devons être autorisés à développer notre secteur de l’énergie verte à un rythme qui nous convienne. »
Les faibles volumes de capacité de l’Afrique sont à la fois la cause et l’effet de l’infrastructure, ou de son absence. Si l’Afrique veut un jour faire de l’énergie durable une option viable pour tous les habitants du continent, des investissements importants sont nécessaires. Malgré l’augmentation du nombre d’opérateurs et d’investisseurs entrant dans l’espace de l’énergie propre et de la transition énergétique en Afrique, très peu de choses contribuent actuellement à répondre aux besoins énergétiques de l’Afrique.
Voilà pourquoi « les technologies vertes ne sont pas une proposition universelle ». Les régions en développement ne doivent pas être contraintes d’adhérer à des méthodes de consommation nette zéro qui, pour l’instant, ne leur conviennent pas.
La CAE pointe toutefois quelques « projets prometteurs à l’horizon » ; du projet d’hydrogène vert AMAN en Mauritanie au centre d’énergie renouvelable et d’hydrogène vert de 10 GW en cours de développement à Djibouti.
@AB