Le « oui mais » du FMI au Congo

La croissance économique reprend doucement au Congo Brazzaville, dont la dette semble viable, acte le FMI. L’institution appelle néanmoins à une meilleure gestion financière et à une diversification de l’économie, la manne pétrolière devant servir d’amortisseur. Actualisation avec la réaction de Denis Sassou-Nguesso.
Certes, le FMI et le Congo Brazzaville sont parvenus à un accord permettant au pays de poursuivre l’usage de la Facilité élargie de crédit. Toutefois, l’institution de Bretton Woods adresse un carton jaune au gouvernement, jugeant le pays encore convalescent face à la détérioration de l’environnement international. En particulier, le Fonds appelle à une plus grande diversification de l’économie, gage de création d’emplois, à une meilleure gestion des finances publiques (y compris l’investissement public et la dette) et de la gouvernance, à la transparence et à des réformes dans le secteur financier.
À l’avenir, considèrent les économistes, la politique budgétaire devrait « se concentrer sur des actions visant à préserver la viabilité de la dette tout en soutenant une croissance plus élevée, plus résiliente et plus inclusive ».
Sur le plan conjoncturel, les voyants repassent progressivement au vert. « La reprise économique se poursuit, malgré la détérioration de l’environnement international et les retombées persistantes de la pandémie », souligne le FMI. Qui prévoit une croissance du PIB réel de 2,8 % en 2022. Le regain d’investissement des plus grands producteurs de pétrole, dans un contexte de prix élevés, a relancé la production pétrolière. Dans le même temps, l’activité économique hors pétrole bénéficie du remboursement des arriérés intérieurs, des investissements publics dans l’agriculture et les infrastructures, et d’une activité soutenue dans les secteurs minier, manufacturier et des services.
Un point noir toutefois, la hausse de l’inflation. Celle devrait atteindre 3,5 % à la fin de 2022, « ce qui pourrait compromettre la reprise ». Ces pressions inflationnistes découlent des prix mondiaux élevés des carburants et des transports, qui gonflent le coût d’importation du Congo, en particulier pour les denrées alimentaires. Le maintien de la réglementation des prix des produits alimentaires essentiels et la modération des coûts de transport contribuent partiellement à contrer ces pressions.
Comme tout pays qui bénéficie du soutien du FMI, le Congo doit respecter des critères spécifiques. Or, « trois des cinq critères de performance de fin juin n’ont pas été respectés », s’agace le FMI. En particulier, le déficit primaire hors pétrole et le financement intérieur net ont largement dépassé leurs objectifs.
Une croissance insuffisante
Cela s’explique par l’introduction d’une subvention en faveur de la Société nationale des pétroles du Congo (SNPC) pour l’importation de carburant. Ce, sans compensation des avances de dividendes au budget de la part de la SNPC, alors que les recettes d’exportation de pétrole brut de la société profitent des prix élevés du pétrole au niveau mondial.
D’autre part, le critère de référence structurel relatif au décret sur les règles en matière de conflits d’intérêts n’a pas été respecté, pointe le FMI qui souligne un retard de publication et de lacunes dans les normes de déclaration, qui sont activement traitées.
À plus longue échéance, le FMI s’inquiète du risque de surendettement du Congo, jugeant néanmoins qu’aujourd’hui, « la dette est viable ». À l’avenir, considèrent les économistes, la politique budgétaire devrait « se concentrer sur des actions visant à préserver la viabilité de la dette tout en soutenant une croissance plus élevée, plus résiliente et plus inclusive ».
Et d’appeler, dès 2023, à des mesures durables qui créeront une marge de manœuvre pour des dépenses essentielles favorisant la croissance à moyen terme.
Il s’agit notamment de la suppression totale de la subvention nouvellement introduite en faveur de la SNPC, de l’élimination des exonérations de TVA et de droits de douane dont bénéficie cette société. Sans oublier, à mesure que l’inflation ralentit en 2023, de la déréglementation progressive du prix des carburants accompagnée de subventions aux transports publics et aux combustibles de cuisson, ainsi que d’un renforcement de l’aide sociale pour protéger les plus vulnérables.
Plus largement, se félicite le FMI, le gouvernement entend donner la priorité au développement, au paiement des arriérés et à la dette extérieure. Le gouvernement a également accepté que la manne pétrolière soit principalement utilisée pour constituer des réserves, étant donné les grandes incertitudes entourant les prix du pétrole.
Denis Sassou-Nguesso, président du Congo, a rencontré le 12 décembre Kristalina Georgiva, directrice général du FMI, Pritha Mitra, chef de mission pour la République du Congo et chef de division adjoint au département Afrique, afin d’échanger sur cet accord, qui doit encore être soumis à l’approbation du conseil d’administration du FMI.
« Cet accord démontre non seulement la viabilité de notre économie, mais aussi la capacité de projection diplomatique du Congo. Nous tenons à souligner les excellentes relations que nous entretenons avec le FMI, et le remercions pour sa diligence au profit d’une collaboration efficace entre nos services », a déclaré le chef de l’État à l’issue de l’entretien.
@AB