Le Maroc vise une renaissance technologique

La scène technologique marocaine a tutoyé de nouveaux sommets lors du salon technologique Gitex Africa, organisé pour la première fois à Marrakech. Le choix du Maroc pour cet événement s’explique par des considérations tant politiques qu’économiques.
Début juin, Gitex Africa a pris une place centrale à Marrakech, alors que le célèbre salon technologique des Émirats arabes unis se lançait pour la première fois sur le sol africain.
Gitex Global, qui a lieu chaque année au Dubai World Trade Centre (DWTC), est le plus grand événement technologique au monde et a renforcé l’influence des Émirats arabes unis dans le secteur depuis sa création en 1981. GITEX Africa est organisé par KAOUN International, la société d’événements internationaux du DWTC.
« L’impact de cette première édition africaine sur l’écosystème technologique marocain pourrait ne pas être immédiat, mais nous attendons certainement des avantages à long terme. »
« C’est le plus grand salon technologique en Afrique », a déclaré fièrement Trixie LohMirmand, vice-présidente exécutive du DWTC, peu de temps après que l’hymne national marocain ait marqué le début de la cérémonie inaugurale.
Des centaines de start-up africaines, ainsi que des entreprises technologiques établies telles que MasterCard et Huawei, se sont réunies pour explorer le potentiel du paysage technologique africain.
Le centre de conférences spécialement construit bourdonnait du son des réseaux alors que de jeunes entrepreneurs cherchaient des opportunités de financement. De leur côté, des capitalistes-risqueurs cherchaient la prochaine licorne africaine, alors que les grandes entreprises technologiques envisageaient des collaborations fructueuses lors de cet événement.
Le choix du Maroc par les Émirats arabes unis pour accueillir Gitex lors de sa première incursion en dehors de Dubaï pourrait surprendre.
En 2022, le Maroc représentait le moins de financement des start-up en Afrique du Nord, avec 18 millions de dollars levés contre 119 millions en Tunisie, 152 millions en Algérie et 823 millions en Égypte.
Le pays ne se classe qu’au quinzième rang en Afrique pour le financement de l’équité technologique, loin derrière le Sénégal (8e) ou le Ghana (5e). Le Maroc est au même niveau que la Namibie, malgré le fait que cette dernière ait moins d’un dixième du PIB du Maroc.
Des retombées pour les start-up
Pourtant, le pays dispose d’une infrastructure de pointe, d’une connectivité Internet élevée et d’un taux de pénétration de l’électricité de 100%, ce qui le rend plus attrayant pour accueillir un salon technologique international que de nombreux pays africains.
Cependant, le choix des Émirats arabes unis de s’installer au Maroc plutôt que chez ses pairs d’Afrique du Nord, qui présentent des avantages concurrentiels similaires mais attirent beaucoup plus de financements pour les start-up, est également politique.
En novembre 2021, les Émirats arabes unis sont devenus le premier État arabe à ouvrir un consulat dans le Sahara occidental. La région est largement contrôlée par le Maroc depuis 1975, mais sa souveraineté est contestée par le Front Polisario.
La décision des Émirats arabes unis a contribué à soutenir l’ambition diplomatique du Maroc de faire reconnaître internationalement sa revendication territoriale. En septembre 2022, les Émirats arabes unis ont pris la parole au Conseil des droits de l’homme des Nations unies à Genève au nom de 35 pays qui soutiennent la pleine souveraineté du Maroc sur la région.
Omar Sultan Al Olama, ministre d’État des Émirats arabes unis chargé de l’intelligence artificielle, de l’économie numérique et des applications de travail à distance, a pris la parole lors de la cérémonie d’ouverture et a chaleureusement déclaré : « Le Maroc est une source de fierté pour les pays arabes ; les Émirats arabes unis sont là pour célébrer une année de partenariat fructueux entre l’émirat et le Royaume du Maroc. »
Les deux monarchies entretiennent des liens commerciaux précieux, les investissements des Émirats arabes unis au Maroc dépassant 14 milliards $ à la fin de 2021, ce qui en fait le plus grand investisseur arabe dans le royaume, après la France.
L’« investissement que les Émirats arabes unis et le gouvernement marocain ont réalisé pour cet événement est, à mon avis, celui qui portera ses fruits pendant de nombreuses années », a ajouté Omar Sultan Al Olama.
Ce sont les start-up marocaines qui devraient bénéficier le plus de cet événement. Cent d’entre elles ont pu présenter leurs produits à des investisseurs potentiels, surpassant ainsi leurs homologues africains.
Une charte de l’investissement
« Les start-up marocaines présentes ont la chance de concourir et d’échanger avec leurs homologues panafricains », juge ainsi Mehdi El Alaoui, responsable du département des startups à l’Agence marocaine de développement. « Le cadre de cet événement leur permet de bénéficier du transfert de technologie, de l’échange et de la mise en relation avec ces différents acteurs. »
La conférence a transformé Marrakech, habituellement une ville très touristique, en épicentre de la technologie africaine pendant trois jours, mettant en valeur l’ouverture du Maroc aux investissements privés du monde entier.

L’« impact de cette première édition africaine sur l’écosystème technologique marocain pourrait ne pas être immédiat, mais nous attendons certainement des avantages à long terme », explique Mehdi El Alaoui.
Alors que le Maroc s’efforce de relancer sa croissance, le secteur technologique émerge comme un élément vital de la stratégie économique globale du pays.
Le pays a rédigé sa nouvelle Charte de l’Investissement en 2022, dans le but de renforcer l’investissement privé et de stimuler le développement économique dans tout le royaume. Dans ce contexte, l’Agence marocaine du numérique estime que Gitex à Marrakech symbolise un moment important dans le parcours du pays pour devenir un pôle d’innovation technologique en Afrique, soutenu par la troisième plus grande économie de la région MENA.
@AB