Le Gabon, une stratégie affirmée de croissance verte

Afin de préparer l’après pétrole, le Gabon diversifie ses ressources économiques de long terme. L’une des voies réside dans l’exploitation raisonnée et durable de son immense parc forestier. La croissance verte se niche aussi dans les engagements de son fonds souverain.
Par Laurent Soucaille
Plus que jamais, le Gabon mise sur le développement durable pour attirer les investissements. Tel est le sens, par exemple, du message adressé par la Première ministre Rose Christiane Ossouka Raponda lors du récent CEO Forum. La gestion raisonnée des forêts, est, depuis longtemps, l’une des préoccupations majeure des autorités gabonaises. Un rapport récent de la BAD (Banque africaine de développement) souligne les apports de la Zone économique dite « à régime privilégié » de Nkok, qui combine amélioration des rendements forestiers et réduction des émissions de carbone.
Le FGIS, Fonds gabonais d’investissements stratégiques, est le premier fonds souverain africain à s’engager au financement d’activités émettant zéro émission de gaz à effet de serre, d’ici à 2050.
Cela ne va pas sans contrainte, reconnaît la BAD. Le Gabon a décidé l’annulation de 1,3 million d’hectares de concessions forestières dans les sanctuaires et les parcs nationaux et a interdit l’exportation du bois non transformé. Autant de mesures qui ont entraîné une baisse de 50 % de l’exploitation forestière et une réduction significative de la dégradation des forêts. Parallèlement, l’entrée en vigueur du standard national de gestion forestière issu de la norme FSC, de l’organisation indépendante non gouvernementale Forest Stewardship Council, témoigne de la volonté du Gabon de parvenir à une gestion durable et transparente de ses ressources naturelles.
De son côté, la puissante compagnie des bois du Gabon (CBG) vient de conclure un partenariat avec le géant français TotalEnergies afin de développer un nouveau modèle de gestion forestière. Les deux partenaires tenteront, là encore, de concilier une exploitation durable du bois, transformé sur place, permettant la séquestration du carbone, voire la production de « crédits carbone ». Il s’agira de réduire l’impact des activités forestières, reboiser, privilégier l’agroforesterie et de conserver des forêts naturelles.
Des engagements précis
« Les forêts sont d’une importance cruciale dans la lutte contre le réchauffement climatique, il est nécessaire d’anticiper, d’être progressiste, de relever les défis pour les populations », expliquent Hubert et Guillaume Fenart, patrons de la CGB.
Le Gabon profite à plein du rebond des secteurs du bois et de la construction, souligne d’ailleurs la dernière note de conjoncture pays du FMI. L’organisme vient de décaisser, ce 27 juin 2022, 155 millions de dollars supplémentaires pour soutenir l’économie du pays, éprouvée, comme tant d’autres, par le ralentissement soudain de la croissance mondiale.
Dernier élément, et non des moindres, on apprenait le 27 juin que le Fonds gabonais d’investissements stratégiques (FGIS) rejoignait l’alliance Net-Zero Asset Owner, une initiative des Nations unies. Il est le premier fonds souverain africain à s’engager au financement d’activités émettant zéro émission de gaz à effet de serre, d’ici à 2050. Le FGIS s’engage à se fixer des objectifs ambitieux tous les cinq ans et à présenter chaque année un rapport de suivi. Un engagement important tandis que la mauvaise « redevabilité » des actions menées au Gabon est régulièrement pointée du doigt par les institutions comme le FMI.
Créée en septembre 2019, la Net Zero Asset Owner Alliance est un groupe international d’investisseurs qui s’engagent à réaliser la transition de leurs portefeuilles d’investissement vers une neutralité carbone. Ainsi, le FGIS bénéficiera-t-il des conseils et des outils de l’Alliance pour fixer et atteindre ses engagements et ainsi soutenir la transition du Gabon vers un objectif zéro carbone.
Visite scolaire de l’Arboretum Raponda, au nord de Libreville
Akim Mohamed Daouda est administrateur et directeur général du FGIS. « En tant que pays dont 88% du territoire est couvert de forêts et qui a absorbé 187 millions de tonnes de CO2 entre 2010 et 2018, le Gabon est un puits de carbone. La réduction des émissions dans la poursuite d’un objectif zéro carbone est ainsi une ligne directrice des activités de FGIS. Notre adhésion à l’Alliance s’inscrit dans cet engagement, ainsi que dans notre volonté de promouvoir davantage les investissements verts au Gabon. »
De son côté, Günther Thallinger, membre du conseil d’administration d’Allianz SE et président de l’Alliance Net-Zero Asset Owner, considère que la démarche du FGIS « soutiendra sans aucun doute la transition du pays vers la mise en œuvre des engagements de l’accord de Paris », invitant « d’autres fonds souverains à faire le même pas ».
@AB