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L’attractivité passe aussi par la sécurité juridique

L’attractivité passe aussi par la sécurité juridique
  • Publiéfévrier 7, 2023

Une réunion autour de juristes, à Paris, a permis au président du Conseil marocain de la Concurrence, Ahmed Rahhou, de présenter les enjeux de son institution. Et d’expliquer l’intérêt d’offrir une base de données de la jurisprudence européenne aux juges de son pays.

 

Le Conseil marocain de la concurrence, « une organisation transverse » comme il se présente, offre désormais davantage d’autonomie et de souplesse dans ses décisions. En effet, l’organisation de la concurrence au Maroc, qui avait fait l’objet d’une réforme en 2011, a bénéficié en 2022 d’une révision de son cadre réglementaire.

En matière de concurrence, d’ailleurs, le droit marocain compte encore peu de jugements, donc peu de jurisprudence. Le Conseil fournit alors à la justice la jurisprudence européenne ainsi que les textes français.

Les lois modernes sur la concurrence, au Maroc, ne datent que de 2018 ; elles sont encore mal connues du monde des affaires, a reconnu le président du Conseil de la Concurrence, Ahmed Rahhou, devant un parterre de juristes réunis la Maison des Avocats, le 2 février 2023. En revanche, l’orientation du pays vers l’économie de marché ne date pas d’hier, et des pans entiers de l’économie sont désormais libéralisés, a-t-il tenu à rappeler. Il demeure quelques grands monopoles, notamment dans les aéroports (ONDA) et les chemins de fer (ONCF). De même, il reste quelque 18 produits pour lesquels les prix sont administrés. Le Maroc n’échappe pas au courant actuel, qui veut la suppression des prix administrés au bénéfice de « filets sociaux ». Chaque secteur a son instance de régulation, et la liberté d’investir est inscrite dans la Constitution du Maroc. En matière de finance, par exemple, en plus de la Bank Al-Maghrib, figure l’AMMC (Autorité marocaine du marché des capitaux), créée en 1993, ainsi que l’ACAPS (Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance), créée en 2016.

De son côté, le Conseil de la concurrence est une institution indépendante chargée, « dans le cadre d’une concurrence libre et loyale, d’assurer la transparence et l’équité dans les relations économiques ». Ce qui veut dire, d’un côté, prendre le parti des consommateurs, en évitant les pressions à la hausse sur les prix, la perte de qualité ou de choix. Et, d’un autre côté, de préserver une concurrence saine en mettant tous les acteurs sur un pied d’égalité.

 

Des bonnes pratiques

L’institution est dotée d’un pouvoir décisionnel en matière de lutte contre les pratiques anticoncurrentielles et de contrôle des opérations de concentration économique. Elle peut délivrer des amendes, faire respecter des seuils concurrentiels. Quitte à se montrer souple, privilégiant les remontées rapides d’information aux coûteux et fastidieux dossiers longs à traiter. Ahmed Rahhou se montre un chaud partisan des procédures « fast track ». Son institution se réserve la possibilité, en matière de seuil ou de concentration, d’examiner des dossiers après une opération de fusion, sans alourdir inutilement les procédures et les éventuelles sanctions. L’objectif est d’inscrire le Maroc dans le concert des nations attractives en matière d’investissements.

En matière de contrôle des concentrations, le président du Conseil de la Concurrence a fait état de 140 notifications en 2022 et de 150 demandes de régularisation, dont 25 ont été retenues.

Ahmed Rahhou s’exprimait dans le cadre d’une conférence organisée par des associés du cabinet LPA-CGR avocats avec la Commission Afrique OHADA du Barreau de Paris.

Son organisation peut également ester en justice, y compris contre une instance de régulation ou un Ordre professionnel. Par exemple, Ahmed Rahhou attend l’avis des juges marocains après avoir déposé une plainte contre une corporation qui imposait des tarifs minimums à ses clients.

En matière de concurrence, d’ailleurs, le droit marocain compte encore peu de jugements, donc peu de jurisprudence. Le Conseil fournit alors à la justice la jurisprudence européenne ainsi que les textes français. Les juges sont libres dans leurs décisions, bien sûr, mais ce corpus de données permet d’assoir leurs attendus, et rassure les investisseurs étrangers. Cette méthode « sécurise les investissements », considère l’ancien ambassadeur.

Cette base de données des jurisprudences européennes a été élaborée dans le cadre du jumelage institutionnel conclu en décembre 2021 entre le Conseil de la concurrence et un consortium composé de la Commission hellénique de la concurrence, l’Autorité de protection de la concurrence et des consommateurs polonaise et l’Autorité italienne de la concurrence. Elle est destinée aux juges, aux rapporteurs du conseil, aux avocats, etc.

Il ne s’agit pas que de combler un manque, a insisté Ahmed Rahhou. L’objectif est bien d’encourager la convergence réglementaire vers les acquis de l’Union européenne et vers « les bonnes pratiques » internationales.

Enfin, le Conseil de la Concurrence devait annoncer, dans les jours qui viennent, la création d’un prix spécifique de la Recherche et du Droit de la concurrence, qui permettra d’associer davantage le monde universitaire à ses travaux.

@AB

 

Écrit par
Laurent Soucaille

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