Jumia se concentre sur la réduction des pertes

L’inflation et les dépréciations monétaires sur les principaux marchés africains ont pesé sur les dépenses des clients de la société de commerce électronique Jumia, au deuxième trimestre, marqué par une baisse des résultats.
La société panafricaine de commerce électronique Jumia a perdu environ 1 million de consommateurs actifs et a enregistré 3,8 millions de commandes en moins et près de 70 millions de dollars de moins en valeur brute des marchandises entre le deuxième trimestre 2022 et le deuxième trimestre 2023.
Ces chiffres ont été révélés dans les résultats financiers négatifs de la société pour le deuxième trimestre clos le 30 juin 2023 : publication qui a entraîné une baisse du cours de l’action de plus de 16 % le lendemain de la publication des résultats, sur le marché américain Nasdaq.
Le chiffre d’affaires a atteint 48,5 millions $ au deuxième trimestre 2023, en baisse de 15% d’une année sur l’autre et en hausse de 6% à taux de change constant.
La société réduira ses dépenses de publicité et ses frais généraux, dans une proportion plus importante que prévu jusque-là.
Jumia attribue les résultats à des conditions macroéconomiques difficiles dans les principaux marchés africains où elle opère. « Les défis macroéconomiques continus avec des niveaux d’inflation élevés ont affecté le pouvoir d’achat des consommateurs et la capacité des vendeurs à s’approvisionner en marchandises en raison des restrictions à l’importation », précise la communication financière de la société.
« Le niveau d’inflation moyen dans notre secteur a atteint 14,1 % en juin 2023, avec des pics de 42,5 % au Ghana et 35,7 % en Égypte, respectivement. Au Nigeria, l’inflation a atteint 22,8 % en juin 2023, son plus haut niveau depuis 18 ans », poursuit-elle.
La dépréciation de neuf des dix monnaies locales par rapport au dollar au cours du premier semestre 2023 par rapport à la même période en 2022 a également contribué à réduire les revenus de Jumia.
« En particulier, la libéralisation du régime de change au Nigeria, annoncée le 14 juin 2023, a conduit le naira à chuter de plus de 60% par rapport au dollar en juin 2023 », justifie l’entreprise.
Des observateurs prudents
Néanmoins, la société a déclaré avoir fait des progrès dans la réduction des pertes au cours du premier semestre 2023, ce qui lui a permis d’ajuster sa perte prévue au titre du bénéfice avant intérêts, impôts et amortissements (EBITA), de 90 à 100 millions $ en 2023, par rapport à la fourchette de 100 à 120 millions de dollars communiquée jusque-là.
« Nous restons déterminés à réduire nos pertes et à accélérer nos progrès vers la rentabilité », commente Jumia.
La société réduira les dépenses de vente et de publicité de 20 à 30 millions $, par rapport à la fourchette précédemment communiquée de 30 à 40 millions $ – et 76 millions $ dépensés en 2022. Il en sera de même pour les frais généraux et administratifs, qui devraient atteindre entre 85 et 95 $, par rapport à la fourchette précédemment communiquée de 90 à 105 millions $ ; chiffres à comparer aux 118 millions $ de l’exercice 2022.
Attention, avertit la société, « les déclarations prospectives ci-dessus reflètent nos attentes au 15 août 2023, sont sujettes à changement et comportent des risques inhérents, qui échappent partiellement ou totalement à notre contrôle ». Dans le détail, « ces risques comprennent, sans s’y limiter, les conditions politiques et économiques à travers les pays où nous opérons, l’impact économique plus large du conflit Russie-Ukraine en cours, et les problèmes de la chaîne d’approvisionnement mondiale ».
Bien que les progrès réalisés en matière de réduction des pertes soient un « signe positif », Dair Sansyzbayev, blogueur financier sur la plateforme de services de contenu à la demande Seeking Alpha, rappelle que les marchés redoutent toujours que l’entreprise ne se retrouve à court de liquidités.
« L’amélioration des prévisions signifie, en moyenne, une amélioration d’environ 4 millions de dollars pour la consommation de trésorerie trimestrielle, ce qui n’annule pas la forte probabilité de manquer de liquidités à l’été 2024. »
« L’effet des vents contraires macroéconomiques n’est que partiel, et le reste est lié à la faible performance globale de l’entreprise », commente ce spécialiste. Jumia a reçu 1,2 milliard $ de financement de la part de onze investisseurs depuis 2012, y compris des géants tels que MTN et Mastercard.
Lors de la conférence téléphonique sur les résultats du deuxième trimestre, le PDG de Jumia Group, Charles Ballard, n’a guère rassuré : « Nous sommes confrontés à la pire situation macroéconomique depuis une décennie ou plus dans les marchés émergents et en particulier en Afrique… Cela a un impact considérable sur le pouvoir d’achat des consommateurs. »
@AB