Djibouti inaugure son premier parc éolien

Le parc éolien Red Sea Power fournira 60 mégawatts d’énergie propre, augmentant de 50 % la capacité globale de production énergétique de Djibouti, et évitant annuellement environ 250 000 tonnes de CO2. Un modèle de financement pour les futurs projets.
Le président Ismaïl Omar Guelleh procède, ce 10 septembre à l’inauguration du tout premier parc éolien de Djibouti, incarnant ainsi son ambition annoncée de faire du pays le premier d’Afrique à s’appuyer exclusivement sur des sources renouvelables pour son électricité d’ici à 2035.
Le parc éolien Red Sea Power (RSP) est situé à proximité de la baie de Ghoubet. En pleine exploitation, il fournira 60 mégawatts d’énergie propre, augmentant de 50 % la capacité globale du pays et évitant annuellement 252 500 tonnes d’émissions de CO² soit l’équivalent de plus 55 000 bus.
En plus du nouveau parc éolien, les partenaires de Red Sea Power ont construit une usine de dessalement à énergie solaire. Elle fournira de l’eau potable aux villages environnants, permettant d’atténuer la crise de l’eau que traverse Djibouti.
Le projet, premier investissement international notable dans le secteur énergétique à Djibouti d’un montant de 122 millions de dollars, crée le premier producteur indépendant d’électricité (IPP) du pays et servira de modèle aux futurs investissements privés.
Une capacité supplémentaire de 45 MW d’énergie renouvelable est déjà attendue par le consortium d’investisseurs dirigé par RSP et composé du fournisseur de solutions d’infrastructures Africa Finance Corporation (AFC) en tant que développeur principal ; de la banque néerlandaise de développement entrepreneurial FMO ; du gestionnaire de fonds de financements mixtes Climate Fund Managers (CFM) ; et de Great Horn Investment Holding (GHIH). Cette société d’investissement est détenue par une unité de l’Autorité des Ports et des Zones Franches de Djibouti et du Fonds souverain de Djibouti.
Jusqu’à aujourd’hui, Djibouti dépendait entièrement d’une électricité produite à partir de combustibles fossiles importés, ainsi que de l’électricité produite à l’hydrogène importée de l’Éthiopie voisine. Moins de la moitié des 123 MW de la capacité nationale installée est opérationnelle en raison de l’ancienneté des centrales au diesel.
La nouvelle centrale éolienne stimulera l’industrialisation, la création d’emplois et la stabilité économique alors que Djibouti cherche à tirer parti de sa position stratégique en tant que plaque tournante mondiale du transbordement, estiment ses promoteurs.
D’autres centrales en vue
Avec son vaste littoral et ses installations portuaires positionnées stratégiquement le long de la mer Rouge et du golfe d’Aden, Djibouti a un rôle central à jouer sur le marché mondial de l’énergie. Le pays dispose de suffisamment de ressources éoliennes, solaires et géothermiques pour tripler sa capacité actuelle et dépasser les 300 MW. Le pays accueille également la plus forte concentration au monde de bases militaires étrangères en raison de sa situation géographique à l’entrée du détroit de Bab el-Mandab, le corridor emprunté par 30 % du commerce mondial. Le nouveau parc éolien de Djibouti fournit une opportunité pour ces bases et d’autres entreprises actuellement hors réseau de se décarboner et de remplacer leur électricité produite principalement par du diesel par une énergie propre.
Le parc éolien s’étend sur 387 hectares, soit l’équivalent de plus de 700 terrains de football. Les 17 turbines Siemens du site produisent chacune 3,4 MW, desservies par une sous-station de 220 mégavolts ampères (MVA) et reliées par une ligne de transmission aérienne de 5 km au gestionnaire de réseau local et aux installations d’entreposage.
L’électricité produite sera vendue dans le cadre d’un contrat d’achat d’électricité à long terme à Électricité de Djibouti (EDD), l’entreprise publique nationale. Utilisant le projet comme modèle pour les futures IPP, l’État travaille déjà sur plusieurs autres centrales en vue d’accroître la capacité géothermique et solaire.
« La solution de prêt-relais par capitaux propres que nous avons déployée a atténué les risques de construction et d’achèvement », se félicite Samaila Zubairu, président de l’AFC.
« Djibouti dispose d’abondantes ressources renouvelables pour une production d’énergie durable et propre », déclare de son côté Aboubaker Omar Hadi, président de GHIH. « L’investissement dans les infrastructures d’énergie renouvelable est la clé de nos ambitions, et l’inauguration du parc éolien révolutionnaire Red Sea Power est une étape importante. Une solution énergétique fiable et rentable est essentielle pour stimuler la croissance des infrastructures de Djibouti. Avec le développement de projets de zones franches industrielles, nous estimons que le pays devrait faire face à une demande de 3 700 MW au cours de la prochaine décennie. Il est essentiel d’exploiter des ressources renouvelables telles que l’énergie solaire, géothermique, éolienne et marémotrice pour répondre à cette demande. »
Les avantages du financement mixte
En plus des impacts socio-économiques du projet, l’innovation dans la structure transactionnelle elle-même a le potentiel de créer des retombées systémiques en encourageant les investissements dans la région. La structure transactionnelle a considérablement réduit le risque lié à l’investissement. Les obligations de paiement d’EDD en vertu de l’accord d’achat d’électricité (PPA) sont adossées à une garantie gouvernementale, et les obligations du gouvernement sont à leur tour soutenues par la couverture du risque politique fournie par l’Agence multilatérale de garantie des investissements (MIGA) de la Banque mondiale.
« Cela témoigne des avantages du financement mixte », ajoute Andrew Johnstone, directeur général de Climate Fund Managers. « Des opérations révolutionnaires comme celle-ci sont extrêmement difficiles à financer par un financement de projet traditionnel étant donné que ce domaine restait inexploré et qu’il n’existe donc pas de précédent, rendant presque impossible pour les prêteurs et les partenaires de capitaux propres d’assumer un tel risque. Le financement mixte combine à la fois des capitaux concessionnels et commerciaux, permettant aux investisseurs d’assumer une part plus importante du risque et fournissant une source unique de financement, du développement jusqu’à l’exploitation. Dans le cas présent, le projet n’aurait tout simplement pas été possible sans une approche mixte. »
François Maze, directeur de Red Sea Power, rappelle l’enjeu : « L’accès à l’électricité est essentiel à la croissance des entreprises, à la création d’emplois, à l’éducation, aux soins de santé, aux services sociaux et aux infrastructures. Dans un pays actuellement entièrement desservi par les importations de combustibles fossiles et d’électricité, des solutions d’énergie renouvelable à grande échelle sont requises de toute urgence pour accroître la résilience au changement climatique. »
En plus du nouveau parc éolien, les partenaires de Red Sea Power ont construit une usine de dessalement à énergie solaire. Elle fournira de l’eau potable aux villages environnants. Certaines régions de Djibouti connaissent actuellement une crise majeure de l’eau, 20 % des zones rurales n’ayant pas accès à l’eau potable. De nombreux foyers n’ont pas suffisamment d’eau pour répondre à leurs besoins de base, en particulier pendant la saison sèche, ce qui entraîne une perte généralisée des moyens de subsistance et des revenus.
@AB