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African Business

Des innovations digitales au service des agricultrices

Des innovations digitales au service des agricultrices
  • Publiéjuillet 7, 2023

Des outils permettent aux populations de faire face aux risques climatiques, mais ils sont souvent mal adaptés aux réalités et aux besoins des femmes. Des entreprises privées innovantes sont associées avec succès aux programmes d’inclusion.

 

Les risques de catastrophes climatiques, tels que les inondations ou la sécheresse, affectent les femmes et les jeunes filles de manière disproportionnée par rapport aux hommes. Ces chocs entraînent souvent des pertes financières plus importantes pour les productrices et créent ainsi une spirale de vulnérabilité et de pauvreté, constate une note du Fonds d’équipement des Nations unies (UNCDF).

L’organisme onusien soutient, avec le concours financier d’Innovation Norway et logistique d’ONU Femmes, des projets digitaux innovants qui permettent de renforcer la résilience des productrices face aux risques de catastrophe et au changement climatique.

En moins de trois mois, OKO a enrôlé 1100 nouvelles agricultrices ; lesquelles ont pu accéder pour la première fois à une assurance agricole et pourront mieux faire face aux risques de sécheresse et d’inondations.

Le contexte dans lequel les productrices évoluent dans de nombreux pays en développement n’est souvent pas compatible avec les intérêts de rentabilité et les modèles d’affaires des professionnels de la gestion et du financement des risques de catastrophes : les superficies cultivées par les femmes sont trop petites, les canaux de distribution trop coûteux, et les besoins en formation des productrices trop importants.

Bien qu’il existe de nombreux mécanismes de financement et de transfert de risque de catastrophe visant à réduire la vulnérabilité des personnes et des collectivités (tels que l’assurance, la réassurance, ou encore le crédit agricole) ou de prévention du risque de catastrophe (systèmes d’alerte, formations sur les bonnes pratiques agricoles, etc.) visant à augmenter le niveau de préparation des communautés, ceux-ci ne bénéficient pas toujours aux populations féminines, qui sont moins bien représentées dans les instances de décision et pôles d’information de ces communautés.

La phase de recherche a permis d’identifier les besoins prioritaires des femmes productrices en termes de protection contre les risques climatiques dans cinq pays : Haïti, Liberia, Malawi, Mali, Sénégal. Elle a également permis de réaliser une cartographie des solutions et des innovations existantes ayant le potentiel de répondre à ces besoins et renforcer ainsi la résilience des femmes agricultrice.

 

Un jeu audio interactif

La phase d’appui aux innovations, à laquelle ont été associées quelque 150 entreprises privées, a permis d’identifier et d’accompagner deux partenaires dans deux pays pilote : Viamo au Sénégal et OKO au Mali. L’assistance technique est adaptée aux besoins des partenaires et fournie par WRMS, une entreprise indienne spécialisée dans la gestion des risques dans l’agriculture.

Viamo, le partenaire principal du projet au Sénégal, conçoit avec des partenaires de terrain (organisations agricoles, autorités locales, assureurs) des contenus de formation ludiques et accessibles avec n’importe quel type de téléphone mobile.

Bien que certaines agricultrices aient déjà bénéficié d’une assurance-récolte par le passé, l’analyse des besoins a permis de constater que l’assurance reste mal comprise et la demande reste faible chez les femmes.

Pour répondre à cette situation et accroître l’adoption de l’assurance agricole parmi les productrices de riz de la Vallée du fleuve Sénégal, deux produits ont été conçus avec Viamo : un jeu audio interactif pour sensibiliser les productrices aux enjeux de la protection contre les risques de catastrophe, et une formation audio plus complète permettant d’avoir accès à des informations détaillées sur ces risques, mais également sur l’offre locale en matière d’assurance agricole.

En moins de neuf mois, plus de 1 600 femmes ont participé à la formation et ont manifesté un grand intérêt pour ce format qui leur permet de recevoir l’information sur leur téléphone, en langue locale (wolof ou pulaar), de manière conviviale, au moment où elles sont disponibles. Ce dernier aspect est très important, car les femmes rurales ont une charge de travail très élevée, qu’elle soit domestique ou professionnelle. De plus, les formations traditionnelles affectent leur emploi du temps. En fin de formation, 52% des femmes interrogées estimaient bénéficier de meilleures connaissances des risques liés à la production agricole, des mécanismes, produits et tarifs d’assurance.

L’identification et l’animation des organisations de femmes agricultrices est un facteur clé de succès pour ce type de campagne de sensibilisation. Viamo Sénégal a bénéficié de mises en relation avec des organisations partenaires d’ONU Femmes dans la région de Saint Louis, notamment le Réseau des Femmes Agricultrices du Nord (REFAN), ce qui a facilité la dissémination rapide des contenus de formation.

 

Des produits spécifiques

De son côté la Compagnie nationale d’assurance agricole du Sénégal (CNAAS), qui a travaillé aux cotés de Viamo, a supervisé le contenu des formations et le jeu interactif en vue d’une éventuelle réplication et mise à l’échelle de l’intervention.

De son côté, OKO fournit des produits d’assurance indicielle aux agriculteurs des pays d’Afrique subsaharienne accessibles via le téléphone mobile ce qui lui permet de servir des populations reculées et non bancarisées.

Dans le cadre de ce projet, OKO a conçu un produit d’assurance pour protéger la culture de l’arachide des pertes liées à la sécheresse et aux inondations. Ce produit a permis de renforcer la résilience des femmes agricultrices dans les régions de Koulikoro, Ségou, Sikasso bénéficiaires du programme d’autonomisation économique AgriFeD d’ONU Femmes au Mali.

Aux difficultés rencontrées face aux risques de catastrophe, s’ajoutent pour les femmes productrices maliennes un faible niveau d’alphabétisation, des compétences numériques et financières limitées et des connaissances limitées en matière d’assurance, un accès et une possession limités de téléphones portables, une offre limitée de produits financiers et d’assurance adaptés. C’est pourquoi OKO a conçu un produit d’assurance spécifique.

Son offre inclut une équipe commerciale 100% féminine pour aller à la rencontre des femmes productrices et faciliter le dialogue. Ces agents ont été sensibilisés aux besoins spécifiques des femmes productrices, y compris leurs contraintes en termes d’emploi du temps dues à leur charge de travail rémunéré et domestique. Cette initiative a été un succès puisque l’équipe commerciale féminine a enrôlé trois fois plus de femmes que les équipes commerciales mixtes.

OKO a également conçu un produit spécifique pour les plantations d’arachides, qui est une production majoritairement gérée par des femmes. Le succès de ce produit d’assurance a été immédiat : 73% des bénéficiaires de ce produit sont des femmes, contre 18% en moyenne sur les produits d’assurance des autres productions.

Cette approche sensible au genre et aux besoins des femmes a permis d’avoir un impact sur l’accès des femmes à l’assurance et sur les ventes globales : en moins de trois mois, OKO a enrôlé 1100 nouvelles agricultrices, des agricultrices qui ont pu accéder pour la première fois à une assurance agricole et qui pourront mieux faire face aux risques de sécheresse et d’inondations dans la prochaine campagne agricole.

 

AD, d’après compte-rendu de l’UNCDF.

@AB

Écrit par
Aude Darc

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