Déclin attendu de la production africaine de pétrole en 2024

Dans un marché mondial redevenu plus calme, la production de pétrole des pays africains devrait progressivement ralentir l’an prochain, dans le sillage des exigences de l’OPEP, prévient la Chambre africaine de l’énergie qui appelle les États à agir en conséquence.
La Chambre africaine de l’énergie publie l’édition 2024 de son rapport consacré au secteur du pétrole et du gaz. L’occasion de prendre note des prévisions des marchés et d’en tirer les conséquences pour l’Afrique.
Tandis que l’OMS a déclaré que la Covid-19 n’était plus une urgence sanitaire, « il est encore difficile de saisir pleinement les dommages considérables que la pandémie a infligés, qu’il s’agisse du nombre considérable de vies humaines ou de la dévastation économique », observe l’influent NJ Ayuk. « Le chaos s’est certainement fait sentir dans l’industrie pétrolière, qui a connu des distorsions records pendant la période de la pandémie, en particulier au cours des premiers mois. »
« Nos gouvernements doivent créer des environnements favorables pour que les entreprises puissent opérer dans leurs pays et faire tout ce qui est en leur pouvoir pour minimiser les risques des investisseurs. »
À ce choc s’est ajoutée une guerre de l’offre entre la Russie et l’Arabie saoudite, membres de l’OPEP+, entamée dès 2020.
« Bien sûr, le marché pétrolier est volatil, mais peu d’époques ont connu des hauts et des bas aussi spectaculaires que ces dernières années », note la Chambre. Selon laquelle, à court terme, les variations extrêmes de l’ère pandémique semblent être derrière nous. L’organisme prévoit d’ailleurs « un calme relatif » sur le marché des énergies fossiles pour le reste de l’année 2023. Et prévoit qu’en 2024, « le marché restera équilibré et quelque peu plat, avec seulement une croissance marginale ». Il en sera de même pour l’Afrique, mais avec un déclin progressif de la production de pétrole en 2024.
Si, d’un côté, l’arrêt des fluctuations spectaculaires du marché est jugé « intéressant », une croissance marginale et une baisse de la production « ne sont pas vraiment des nouvelles réjouissantes ». Pour autant, juge NJ Ayuk, les professionnels du secteur ne doivent pas céder à l’attentisme : « Nous devrions saisir toutes les opportunités de capitaliser sur nos ressources pétrolières et gazières. Chaque goutte de pétrole extraite est une voie vers la croissance économique – des revenus qui peuvent financer des programmes sociaux, le développement d’infrastructures et des transferts de technologie indispensables de la part des compagnies pétrolières internationales qui investissent en Afrique. »
Un tassement graduel
Néanmoins, quelques tendances sont inévitables, juge le rapport. Par exemple, la demande de produits liquides provenant du transport routier et de l’aviation, principalement des États-Unis et de l’Asie, représentera probablement plus de la moitié de la demande mondiale au cours des 18 prochains mois. La demande industrielle, en particulier celle du secteur pétrochimique au Moyen-Orient, en Asie et aux États-Unis, ainsi que les projets de production d’électricité, constitueront un autre facteur clé. De leur côté, les pays africains seront obligés de suivre le mouvement de l’OPEP, à savoir les exigences de réduction de la production. « Les pays membres sont censés adhérer à ces réductions afin que le cartel (l’OPEP) maintienne son contrôle sur les marchés mondiaux et ne perde pas sa part de marché et son contrôle au profit du schiste nord-américain », explique le rapport.

Pour autant, il faut tenir également compte de l’augmentation de la demande de pétrole dans l’hémisphère nord au cours des troisième et quatrième trimestres de 2023, ainsi que de la diminution de l’offre due à la baisse des exportations russes et aux réductions volontaires de la production par l’Arabie saoudite. « Il en résultera un déficit de l’offre qui ouvrira la voie à une augmentation de la production, au moins dans certaines régions du globe, en 2024. »
Et la Chambre de prévoir une hausse de la production mondiale, à plus de 84 millions de barils par jour (bpj) en 2024, ce qui représente une augmentation de 1,6 % par rapport à 2023. Le continent américain connaître une croissance marginale de 4 % de la production en 2024, tandis que le Moyen-Orient devrait connaître une croissance plus faible de 2 %. « Ces augmentations seront probablement compensées par des baisses marginales de la production dans d’autres régions, notamment la Russie, l’Asie, l’Europe et l’Australie. »
En ce qui concerne l’Afrique, la production pour 2023-2024 devrait rester relativement stable, à environ 6,77 millions de bpj. Mais la production mensuelle semble un peu plus sombre, avec une baisse de la production de 6,9 millions de bpj en janvier 2024 à environ 6,62 millions de bpj en décembre 2024.
Actuellement, une poignée de pays africains sont à l’origine de la production de pétrole et de condensats. Il s’agit notamment du Nigeria, de la Libye, de l’Algérie et de l’Angola, pays membres de l’OPEP, qui devraient produire respectivement 1,51 million de bpj, 1,31 million de bpj, 1,18 million de bpj et 1,01 million de bpj en 2024. Dans ce groupe, le Nigeria est un producteur de premier plan, puisqu’il représente un peu plus d’un cinquième du volume annuel total combiné de ces pays.
Mieux accueillir les investissements
L’Égypte, le Tchad et le Ghana sont également des moteurs de la production pétrolière africaine. L’Égypte, par exemple, devrait voir sa production de pétrole atteindre 560 000 bpj d’ici la fin 2023 et 520 000 bpj en 2024.
Pendant des années, les membres africains de l’OPEP ont eu une capacité de production supérieure au quota du cartel et ont eu tendance à produire davantage, même pendant les périodes de baisse de la production en glissement annuel. Ce n’est plus le cas. Le Nigeria, par exemple, a connu des arrêts de production dus au vandalisme sur les oléoducs, à des activités militantes et à des cas de force majeure imposés par les opérateurs, exacerbés par le déclin des anciens champs et l’absence de nouvelles mises en production. L’Angola et la Guinée équatoriale ont également connu des arrêts de production, qui atteindront probablement une moyenne de 25 000 bpj en 2023.
Ces interruptions doivent être résolues, considère la Chambre africaine de l’énergie : les projets de production en cours dans les pays africains de l’OPEP représentent environ 44 % du potentiel total des réserves de liquides de notre continent, qui s’élève à plus de 70 milliards de barils. On estime que 33 % supplémentaires se trouvent dans les découvertes non exploitées de ces pays, ainsi que 2 % dans les projets sous-développés.
« C’est pourquoi les dirigeants africains doivent faire tout leur possible pour stimuler et exploiter l’activité pétrolière et gazière dans leur pays. Nos gouvernements doivent créer des environnements favorables pour que les entreprises puissent opérer dans leurs pays et faire tout ce qui est en leur pouvoir pour minimiser les risques des investisseurs en créant des environnements commerciaux sûrs et accueillants et des conditions fiscales attrayantes pour les investissements », conclut NJ Ayuk.
@AB