De faibles progrès dans la marche vers les ODD

La pandémie de coronavirus, la guerre en Ukraine et les changements climatiques entravent les efforts de l’Afrique pour atteindre les Objectifs de développement durable. Un rapport constate que l’Afrique avance, mais à pas lent, vers les objectifs qu’elle s’est fixés.
À mi-parcours de l’Agenda 2030, la plupart des pays africains peinent à atteindre la plupart des cibles des ODD (Objectifs de développement durable). Sans des politiques visant à accélérer les progrès vers les ODD, au moins 492 millions de personnes se retrouveront en situation d’extrême pauvreté d’ici à 2030, et au moins 350 millions d’ici à 2050.
Tels sont les principaux enseignements d’un rapport mené conjointement par la Commission de l’Union africaine (UA), de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA), de la BAD (Banque africaine de développement) et du PNUD (Programme des Nations unies pour le développement). Rapport intitulé Mieux reconstruire après la maladie du coronavirus, tout en faisant progresser la pleine mise en œuvre de l’Agenda 2030 pour le développement durable.
Afin de maintenir le cap, l’Afrique doit favoriser la mobilisation des ressources et l’épargne nationales, et stimuler les nouvelles technologies pour accélérer la mise en œuvre de ses objectifs.
En effet, résume Ahunna Eziakonwa (PNUD), L’« Afrique ne peut plus attendre, et le moment est venu pour le continent de redéfinir sa voie de développement et de s’approprier son programme de développement ».
Sans surprise, la triple crise de la Covid-19, des changements climatiques et de la guerre en Ukraine ont un impact négatif sur les performances du continent sur ces deux agendas.
Le rapport 2022 sur les ODD en Afrique présente une analyse approfondie de cinq objectifs de développement durable : l’objectif 4 (éducation de qualité), l’objectif 5 (égalité des sexes), l’objectif 14 (vie aquatique marine), l’objectif 15 (vie terrestre) et l’objectif 17 (partenariats pour les objectifs).
L’Afrique n’a progressé que lentement dans l’offre d’une éducation de qualité pour tous (ODD 4). Malgré une amélioration considérable de la scolarisation, quelque 288 millions d’enfants en âge d’être scolarisés ne le sont pas, en particulier dans les pays touchés par des conflits. Selon le rapport, il faut accroître le financement des infrastructures éducatives, en se concentrant notamment sur l’enseignement pré-primaire et primaire, en investissant dans la formation des enseignants et dans la connectivité numérique.
Les partenariats font encore défaut
Le rapport fait également état de progrès lents en matière d’inclusion des genres (ODD 5) et recommande l’application de cadres juridiques pour protéger les femmes et les filles contre les discriminations, les violences domestiques, le mariage des enfants et les mutilations génitales féminines. Par exemple, bien que les femmes constituent une grande partie de la main-d’œuvre africaine, seuls 29,8 % des postes de direction en Afrique – hors Afrique du Nord – étaient occupés par des femmes en 2022, soit une modeste augmentation par rapport aux 29,3 % de 2015.
Les polluants organiques et chimiques issus des activités humaines continuent de mettre en péril l’écosystème marin de l’Afrique, contrairement aux préconisations de l’ODD 14. Le rapport préconise le renforcement des capacités institutionnelles pour faire appliquer les lois et les réglementations relatives à l’utilisation durable des ressources marines. La vie sous l’eau est une source importante de moyens de subsistance dans de nombreux pays africains, notamment les petits États insulaires en développement.
Le rapport note que la perte de couverture forestière, de biodiversité et de dégradation des sols reste élevée et généralisée en Afrique, en dépit de l’ODD 15. Cela est dû principalement à la déforestation des terres pour l’agriculture et le pâturage, et aux changements climatiques. Les données montrent que la dégradation des sols affecte 46 % des terres et 65 % de la population africaine, ce qui coûte 9,3 milliards de dollars par an à la région. Il est essentiel de multiplier les partenariats publics et privés afin de mobiliser et canaliser les fonds pour intensifier la gestion durable des terres, des forêts et de la biodiversité, en vue d’une reprise verte et résiliente.
Selon le rapport, le continent a peu progressé dans la mise en œuvre de l’ODD 17, qui préconise des partenariats afin de réaliser les objectifs. La production de recettes intérieures et les flux d’investissements étrangers vers l’Afrique continuent de stagner par rapport aux autres régions. La gestion de la dette a été un défi pour les gouvernements africains, le service de la dette amputant des ressources en capital déjà rares pour le développement durable. Le rapport note qu’en 2020, l’Afrique a perdu près de 89 milliards de dollars, en raison des flux financiers illicites.
Pour faire progresser le développement durable, le rapport suggère de renforcer la mobilisation des ressources domestiques et de réduire ces flux illicites. Il invite également les acteurs internationaux à soutenir le déploiement d’instruments financiers innovants, tels que les obligations vertes et bleues et les échanges dette-climat.
« Nous devons en faire plus, en tant que continent, pour obtenir de meilleurs résultats. Connaissant les défis à relever, il est important de faire une introspection et de trouver le moyen de mettre en œuvre des initiatives locales pour relever ces défis », commente Vincent O. Nmehielle, secrétaire général de la BAD.
Afin de maintenir le cap, l’Afrique doit favoriser la mobilisation des ressources et l’épargne nationales, et stimuler les nouvelles technologies pour accélérer la mise en œuvre de ses objectifs. Un vœu exprimé notamment par Hanan Morsy (CEA), qui espère que les conclusions et recommandations du rapport « aideront les États membres à prendre des mesures urgentes pour accélérer la réalisation des ODD et de l’Agenda 2063 ».

@NA