Cameroun : L’essentiel des recettes pétrolières est préservé

Au Cameroun, la baisse des recettes pétrolières sera moins prononcée qu’envisagé. Les cours mondiaux du pétrole rebondissent et la demande étrangère de gaz reste soutenue. Le budget de l’État est néanmoins ajusté à la baisse.
Par Kimberly Adams
Un scénario moins mauvais qu’attendu, pour l’industrie pétrolière et donc pour les recettes de l’État, au Cameroun.
Les cours semblent s’installer au-dessus de ce seuil de 40 $. Les membres de l’OPEP et leurs alliés, dont la Russie, se sont accordés pour prolonger en juillet la réduction de production à laquelle ils s’astreignent depuis le 1er mai.
La Société nationale des hydrocarbures (SNH) avait alerté, voici quelques jours, d’une possible chute de 70% de ses recettes versées au Trésor en 2020. Finalement, le dernier collectif budgétaire signé par le gouvernement retient l’hypothèse d’un recul de 40%.
La loi de Finances rectificative, qui sera déposée dès ce 10 juin au Parlement, fixe à 286,7 milliards de F.CFA (437 millions d’euros) les recettes pétrolières au cours de l’exercice budgétaire 2020, contre 468 milliards de F.CFA dans la loi votée par le Parlement en novembre 2019. Soit un poste de recettes réduit de 181,3 milliards de F.CFA, et non de 327 milliards comme envisagé par la SNH.
Il est vrai que celle-ci basait ses prévisions sur des hypothèses particulièrement pessimistes. Les cours mondiaux du pétrole étant passés un temps sous la barre des 20 $ le baril, à cause du choc économique occasionné par l’épidémie de Covid-19. Ces dernières semaines, le baril est revenu aux alentours de 40 dollars. Et la dernière réunion de l’OPEP, achevée le 6 juin, a semble-t-il rassuré les investisseurs.
Les cours semblent s’installer au-dessus de ce seuil de 40 $. Les membres de l’OPEP et leurs alliés, dont la Russie, se sont accordés pour prolonger en juillet la réduction de production à laquelle ils s’astreignent depuis le 1er mai.
En effet, ils s’étaient entendus sur une réduction historique de leur production de 9,7 millions de barils par jour (mbj) pour les mois de mai et de juin. Elle sera également de 9,6 mbj pour le mois de juillet.
Le Mexique refusant de se plier à l’effort du groupe, il n’a pas été possible de réduire davantage la production, comme initialement envisagé. Cet écueil ne semble pas affecter les marchés, plutôt satisfaits qu’un accord global soit trouvé.
Si la pandémie ralentit, notamment dans les pays industrialisés, les cours pourraient rebondir vers les 50 $. D’ailleurs, un tel scénario rapprocherait le baril du brut des 54,4 dollars, hypothèse sur laquelle le budget initial 2020 de l’État du Cameroun avait été élaboré.
Un budget 2020 revu en baisse de 11%
D’autre part, les performances du secteur gazier sont également plutôt rassurantes. La production demeure haussière depuis plus de deux ans. Selon la SNH, en 2019, le Cameroun a exporté sept cargaisons de gaz naturel liquéfié en plus par rapport à l’année précédente, grâce à l’unité flottante installée à Kribi. Une autre source de revenus majeure pour l’État.
Pour autant, le chef de l’État, Paul Biya, a signé le 3 juin 2020 une ordonnance modifiant la loi de Finances 2020. Ce collectif budgétaire consacre une baisse de 11% de l’enveloppe budgétaire initiale, soit 542,7 milliards de F.CFA en valeur absolue.
Le budget 2020 de l’État passe de 4 951,7 milliards de F.CFA à 4 409 milliards de F.CFA (6,72 milliards d’euros), un ajustement de -11%.
Une « ligne de soutien » (taxe) de 47,88 F.CFA a été introduite dans les tarifs réglementés du prix du litre à la pompe pour soutenir l’unique raffinerie du Cameroun.
En dehors de cette réduction drastique de l’enveloppe globale, l’autre fait majeur de ce collectif budgétaire est la création d’un compte d’affectation spécial dénommé « Fonds spécial de solidarité nationale pour la lutte contre le coronavirus et ses répercussions économiques et sociales ».
Pour le compte du deuxième semestre 2020, ce Fonds, financé aussi bien par les contributions des partenaires au développement que des personnes physiques et morales, sera alimenté à hauteur de 180 milliards de F.CFA (274 millions d’euros).
À l’inverse, toutes les allocations initiales des administrations publiques ont été revues à la baisse, y compris la présidence de la République, dont l’enveloppe a été amputée d’environ 15 milliards de FCFA, selon le site Investir au Cameroun.
Seules trois institutions échappent à cette mode des coupes budgétaires : l’Assemblée nationale, le Sénat et Elections Cameroon, organe en charge de l’organisation des consultations électorales, qui prépare activement les premières régionales de l’histoire du pays, annoncées pour octobre 2020.
ENCADRE
La Sonara toujours à l’arrêt
La réhabilitation de la Société nationale de raffinage (Sonara), à l’arrêt depuis un an suite à un incendie, nécessiterait la mobilisation d’une somme d’environ 250 milliards de F.CFA (381 millions d’euros), selon le ministre camerounais de l’Eau et de l’énergie, Gaston Eloundou Essomba.
« Le démarrage de ces travaux est tributaire de la disponibilité des financements. C’est ainsi que des négociations sont en cours avec plusieurs structures financières pour la mobilisation des ressources nécessaires. »
Une « ligne de soutien » (taxe) de 47,88 F.CFA a été introduite dans les tarifs réglementés du prix du litre à la pompe pour soutenir l’unique raffinerie du Cameroun.
« Cette ligne permettra à la Sonara d’assainir ses relations avec ses partenaires financiers et ses fournisseurs, et d’envisager le processus de réhabilitation de la raffinerie », a confié Gaston Eloundou Essomba à la presse camerounaise.